L’Assemblée nationale adopte le texte par 288 voix

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Les débats au Palais Bourbon ont commencé le 17 juin et se sont déroulés jusqu’au 18 juin. La conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote se feraient en séance du 24 juin. Au final, le texte a été adopté par 288 voix sur les 485 députés présents. Avec ce vote, le projet de loi continue sa marche vers la promulgation.

Les débats de l’Assemblée nationale ont montré un nouveau visage de ce projet de loi. Certes, les questions attachées à ce texte ont été débattues mais nous avons pu entendre un certain nombre de députés, toute tendance politique confondue, déborder du simple cadre de la manutention portuaire.

Les députés de l’opposition n’ont pas cessé de rappeler leurs craintes vis-à-vis de ce projet. Des inquiétudes qui s’étendent sur de nombreux de sujets. À l’instar de ce qui s’est passé lors du vote par le Sénat, les députés socialistes ont adopté une nouvelle attitude. Ces derniers ont montré, lors du vote au Sénat, un visage plutôt compréhensif. À l’Assemblée nationale, ils ont pris le virage pour entrer dans l’opposition. Michel Delebarre, député SRC (groupe socialiste, républicain et citoyen) du Nord, a dès le début des débats exposé le point de vue de son groupe sur ce texte. « Nous sommes exigeants ». Henri Jibrayel, député SRC des Bouches-du-Rhône, a ironisé sur le nouveau nom donné aux ports autonomes. « Ce projet de privatisation des “grands ports malades” n’est rien d’autre qu’un projet de démantèlement du service public et du domaine public maritime. »

Après quelques jeux de mots, les députés se sont concentrés sur le fond du texte. Pour le groupe SRC, « la réforme est nécessaire », « elle est dans le prolongement de celle de 1992 » ont reconnu les députés de l’opposition. « Oui, la situation de nos ports se dégrade, mais nous n’approuvons pas votre diagnostic, ni les remèdes », a souligné Michel Vaxès, député GDR (Gauche démocrate et républicaine). Et pour lui répondre Roland Blum, député UMP des Bouches-du-Rhône, l’a interrompue en lui rappelant que cette dégradation est principalement due à la CGT. Le débat est lancé. Rapidement les députés de l’opposition ont voulu démontrer les points sur lesquels ils s’opposent. « Ce projet souffre de trois insuffisances graves », s’est alarmé Philippe Duron, député SRC et membre de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire. Les trois domaines incriminés sont le manque d’investissement, une concertation qui porte plus sur le fond que la forme et, enfin, une distorsion de concurrence entre les ports autonomes et les ports décentralisés. Pour le député du SRC, ce projet doit permettre de « saisir la chance pour toiletter le code des ports maritimes. » Le député du Calvados a fait référence à la constitution pour s’opposer à ce texte. « Le préambule de la constitution de 1946 (repris par la constitution de 1958, ndlr) donne aux salariés le droit de déterminer leurs conditions de travail. Or, le projet bafoue ce principe puisque les salariés des ports autonomes, transférés à des opérateurs privés, ne seront plus représentés dans les organes de décision », a expliqué Philippe Duron. « Je constate qu’il a fallu pagayer pendant longtemps pour trouver des motifs d’inconstitutionnalité dans ce projet », a répondu le Secrétaire d’État aux transports, Dominique Bussereau.

Sur le commandement unique, les députés ont reconnu le consensus pour que soit amenée cette méthode de travail dans les ports français, cependant, « les modalités de son application font débat », a rappelé Michel Delebarre. Le député du Nord a cité l’exemple du port de Dunkerque. « Laissons à chaque port la liberté de choisir la voie qu’il lui convient. Évitons d’édicter des règles respectives car chaque port a ses spécificités. » Maxime Bono, député SRC de Charente, a été plus loin que le député nordiste. Reconnaissant que le commandement unique n’est pas « scandaleux en soi, votre précipitation compromet la réussite de cette réforme indispensable. » Le député charentais regrette le manque de consensus avec les syndicats. Le Secrétaire d’État a répondu à ses attaques par une image: « nous ne comptons pas que le soleil se lève à la même heure sur chaque port. »

Sur la gouvernance des ports, les députés de l’opposition ont largement critiqué ce projet. Ils ont regretté le manque de pouvoir laissé aux personnels portuaires et aux manutentionnaires. François de Rugy, député GDR, a présenté un amendement pour « mobiliser davantage les salariés et les collectivités locales autour de leurs ports et non d’assurer une hégémonie de l’État. » Jean-Yves Besselat, rapporteur de la Commission des affaires économiques, s’est défendu face à ces attaques. « Le conseil de développement n’est pas un lot de consolation pour les salariés qui suent sang et eau sur les quais. Celui-ci est consulté sur les grands principes stratégiques. » À l’intérieur de la majorité parlementaire, Roland Blum est venu proposer l’idée de voir le président du directoire nommé par le conseil de surveillance. Un moyen, pour le député des Bouches-du-Rhône, de séparer encore plus le directoire de l’État.

Lors du débat de ce projet de loi, un point a largement fait débat: les investissements qu’ils concernent les ports ou les dessertes terrestres. Le texte prévoit une enveloppe de 387 M€. Un chiffre bien insuffisant pour les députés de l’opposition qui prennent en exemple les ports du nord de l’Europe. « Dans un petit pays comme la Belgique, qui investit chaque année 400 M€ dans ses ports et octroie 150 M€ de subvention au seul port d’Anvers. Le port de Hambourg reçoit 1,1 Md€ et Rotterdam 2,9 Md€. Je vous laisse mesurer le fossé qui sépare l’engagement de l’État français et celui de nos voisins européens », a indiqué Henri Jibrayel, député SRC. Et dans les rangs de l’opposition, les parlementaires ont mis en doute la capacité du gouvernement à tenir ses engagements, sur le long terme, sur le financement des ports. Dominique Bussereau s’est défendu de cette attaque.

L’autre volet des investissements s’est porté sur les dessertes terrestres et notamment le recours plus important au ferroviaire et au fluvial. François de Rugy a regretté le manque de liaisons fluviales sur la Loire, sans avoir lu le Journal de la Marine Marchande et son article sur le projet de la ligne de Marfret. Marie-Odile Bouillé, député SRC de Loire Atlantique a qualifié ce projet de « demi-réforme ». « Il ne dit rien – ou si peu – sur les liaisons avec l’intérieur du pays. […] Il n’y a pas d’engagement sur les liaisons fluviales. » Et enfin, « à quoi sert de nous vanter la gestion des grands ports du nord si vous laissez de côté le meilleur pour en copier le moins bon. » Le Secrétaire d’État aux transports a renvoyé ces questions à la loi qui fera suite au Grenelle de l’environnement. Lors de la discussion avant le vote du 24 juin, Marc Vampa, député Nouveau Centre, a regretté que sur ce point « le texte n’aille pas plus loin » tout en reconnaissant qu’il est équilibré.

À savoir

Les grèves s’amenuisent

La FNPD-CGT n’a pas appelé à un mouvement social dans les ports pour 24 heures cette semaine malgré le vote formel de l’Assemblée nationale. Le syndicat maintient son mot d’ordre de grève de suppression de trois shifts par semaine, des heures supplémentaires et des travaux de nuit. Daniel Fidelin, député UMP, a indiqué que cette semaine le port du Havre a perdu 25 escales et de nombreux navires patientent au large de Marseille.

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