Marseille voit de nouveau s’éloigner les autoroutes de la mer

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La volte face de l’italien GNV (Grandi Navi Veloci-Grimaldi Gênes) qui s’est retiré de la concession négociée avec le PAM pour le futur terminal des autoroutes de la mer, deux mois à peine après avoir signé un contrat, a laissé un goût amer sur le port de Marseille. Le PAM pensait amener un client important qui lui promettait 100 000 passagers, 40 000 remorques et un minimum de quatre escales hebdomadaires. Son départ(1) n’a peiné personne mis à part le seul établissement public.

La crainte de la venue d’autres armements

Au contraire, le PAM qui a conduit l’affaire, s’est vu critiquer pour son modus operandi. Les marins de la SNCM et de la CMN se sont mis en grève 24 heures pour dénoncer l’arrivée potentielle d’un nouvel opérateur. « Laisser venir Grimaldi à Marseille, c’était comme faire entrer le loup dans la bergerie, parce que la compagnie aurait pu se positionner sur la prochaine délégation de service public sur la Corse. On a déjà eu le précédent avec la Corsica Ferries», attaque Patrice Marty, délégué CGT à la CMN. Malgré l’annonce du retrait de GNV, la CGT craint toujours que le PAM « propose cet espace public à d’autres armements ».

Le Ropax est « un domaine dans lequel nous avons une légitimité et une pertinence ». Cette assertion, ce n’est pas le syndicat des marins qui l’énonce mais le président de la SNCM, Gérard Couturier dans une de ses très rares interviews. Il a fait part à La Marseillaise de « sa surprise que le PAM se (soit) engagé à réserver une partie du port à l’armateur italien Grimaldi ». « Nous lui avons fait part de notre étonnement et l’avons interrogé sur un égal traitement des usagers du port », poursuit l’ex-responsable de Veolia en évoquant un « combat commun » avec son personnel.

Le dossier de la création d’un terminal des autoroutes de la mer (ou ropax) est pourtant évoqué depuis plusieurs mois par le PAM. Le 28 septembre 2007, son conseil d’administration adoptait à l’unanimité un plan de développement des aménagements rouliers de 23 M€ comme en témoigne le BO de la délibération accessible sur le site Internet du PAM. Gérard Couturier ne peut guère ignorer ce dossier qui concerne de près sa compagnie. Par contre, la démarche du PAM qui a traité bilatéralement avec l’armement italien sans passer par un appel d’offres ou un appel à projets, était plutôt inusitée.

Le trafic roulier constitue un domaine réservé du port de Marseille où cinq compagnies (CMA CGM, CMN, Cotunav, Louis Dreyfus et SNCM) se partagent 85 % des échanges réalisés dont la moitié avec… la Corse.

« Nous allons réfléchir aux autoroutes de la mer »

Un marché de rentier qui émarge pour une grosse part sur la notion de service public avec l’Île de beauté et l’Algérie. Force est de constater qu’avec la privatisation de la SNCM, l’ambition du groupe Veolia ne s’est guère manifestée sur le secteur des autoroutes de la mer. Il a fallu l’affaire de GNV pour apprendre de la bouche de son président que la SNCM allait « étudier, compte tenu des subventions qui seront décidées, (ses) possibilités en matière d’autoroutes de la mer en Méditerranée » et souhaitait « s’engager dans une réflexion, pourquoi pas, d’ailleurs, avec notre partenaire la CMN, pour vérifier si l’aventure est viable ». Il n’est jamais trop tard pour bien faire, même si l’heure est plus à l’action qu’à la réflexion si on en croit le Grenelle de l’environnement. C’est aussi oublier le précédent dans lequel l’armement du boulevard des Dames était impliqué. Il y a cinq ans tout juste, l’autoroute de la mer Fos-Savone sombrait à la veille de son ouverture.Porté par la Société des autoroutes maritimes du Sud où se retrouvaient aux côtés de la SNCM, Marfret, Sudcargos, CMN et CMA CGM, le projet n’avait pu aboutir au dernier moment malgré des subsides de l’Union européenne (programme Marco Polo). La ligne de flottaison du business plan établi par les compagnies marseillaises se révélait trop basse pour naviguer. Une baisse du coût du transport routier avec l’arrivée des camionneurs de l’Est envoyait définitivement par le fond ce projet préparé pendant des années.

Des explications de ce retrait italien, seul le PAM a avancé des raisons: des questions de gestion (flotte) et d’équilibre financier de GNV. La notification d’une clause suspensive du contrat signé le 4 avril 2008 qui prévoyait un droit de retrait pendant deux mois à compter de la signature, a été ajoutée à la demande de la compagnie génoise. Sentait-elle depuis le début que la rentabilité de l’opération était sujette au roulis?

Le Ropax international en retard

Aujourd’hui, on apprend que le port de Marseille qui s’est longtemps proclamé « roi du roulier » est en retard sur l’activité Ropax internationale. « Ce segment de marché bénéficie d’ores et déjà dans les ports méditerrannéens de nombreuses initiatives et d’investissements importants de la part d’acteurs dynamiques convaincus du potentiel de développement de cette activité », constate amèrement le PAM. La croissance sur ce secteur se fera t-elle de manière exogène? C’est ce que semble penser le port qui recherche activement un successeur à GNV, au grand dam des opérateurs, patrons et salariés, en place. À Marseille, les marges de la concurrence sont si sensibles qu’elle dérange immédiatement les positions établies dans un port qui vit beaucoup de sa rente de situation. Le développement, la compétitivité de Marseille-Fos passe pourtant par la mise en concurrence.

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