À dix ans d’intervalle, le conseil d’administration du port autonome de Marseille est saisi d’un projet d’extension du port au-delà de la digue du Large. Une ouverture pratiquée dans cet ouvrage de 7 km de long construit en eau profonde entre 1845 et 1925, permettrait l’implantation d’un terminal croisières au plus près de la Joliette. Comme il y a dix ans, le schéma se présente sur le papier de façon idéale. Les centaines de milliers de croisiéristes qui escalent à Marseille chaque année (415 000 en 2007), pourraient embarquer ou débarquer à quelques centaines de mètres du Vieux Port, au cœur du site remodelé par l’opération Euroméditerranée. Mieux, un véritable pôle passagers s’y lèverait avec le remodelage des terminaux actuels pour la Corse et le Maghreb, ce qui permettrait d’accueillir la future génération de car ferries ou de grands cargos mixtes qui devraient dépasser les 210 m de long. En effet, la configuration nautique du bassin de La Joliette rend quasiment impossible aujourd’hui l’accueil de navires de plus de 140 m, alors que les grands navires de croisières mesurent bien plus de 300 m de long. La création d’un nouveau bassin portuaire et de terre-pleins ainsi que la démolition d’un tronçon de la digue du Large permettraient la constitution de cercles d’évitage adaptés aux manœuvres de grands navires.
Le tourisme comme levier du renouveau marseillais
Ce projet avait été un des chevaux de bataille de la municipalité dirigée par Jean-Claude Gaudin. Ce dernier, qui mise sur le tourisme comme levier du renouveau marseillais, rêve d’offrir le meilleur cadre au million de croisiéristes promis d’ici 2011. Mais qui réalisera ce rêve? Premier point, il ne pourra se concrétiser avant une dizaine d’années. Le temps nécessaire aux études et au chantier. Les études de faisabilité, pour qu’un tel projet soit stabilisé dans toutes ses dimensions techniques, financières économiques et sociales, promettent d’être complexes, d’autant qu’elles devront être menées en liason étroit avec les partenaires locaux. Une paille à côté du grain du financement. « En l’état actuel des réflexions, le coût estimé de l’investissement est évalué à environ 600 M€ », relève le PAM. Soit 200 M€ de plus que le coût total de Fos 2XL. Qui pourrait payer? Certainement pas la cité phocéenne dont le taux d’endettement touche au record. Pas plus l’État qui, malgré une réforme portuaire prometteuse en investissements, indique que ses caisses sont vides. Certains avancent un éventuel partenariat public-privé. Mais, c’est oublier qu’un récent appel à projets mené par le PAM, vient tout juste d’attribuer l’exploitation du môle Léon Gourret et sa moderne gare de croisières à un consortium constitué des sociétés MSC Crociere, Costa Crociere et Louis Cruise qui assurent à eux trois 85 % de ce trafic à Marseille. Et qu’un super complexe de commerces et de loisirs de 40 000 m2 va être construit à proximité par l’investisseur néerlandais Foruminvest. Où trouver les ressources pour mener à bien ce projet? Il ne faudra pas moins de dix ans pour résoudre le problème. Ce même laps de temps avait été annoncé en 1998, lors de la présentation du premier projet d’extension qui refait surface aujourd’hui.