Si l’A8 entre Marseille et Lyon et le réseau ferré fret sont proches de la saturation, le trafic de l’autoroute fluviale du Rhône pourrait encore être « multiplié par cinq ». Mieux, le Rhône offre une alternative à la traversée complètement engorgée de l’agglomération lyonnaise. C’est ce qu’ont indiqué les signataires du contrat de progrès fluvial: Voies navigables de France (VNF), le Port autonome de Marseille (PAM) et la Compagnie nationale du Rhône (CNR) dont les responsables s’étaient réunis à Marseille pour la 3e fois en comité d’orientation en cinq ans.
En cinq ans, le trafic fluvial du Marseille-Fos a progressé de 60 % pour atteindre aujourd’hui 2,71 Mt dont 60 000 EVP. La satisfaction était grande pour les trois partenaires, François Bordry (VNF), Guy Janin (PAM) et Michel Margnes (CNR). La part modale du fluvial sur Marseille-Fos a atteint l’an dernier 5,34 % contre 3,65 % en 2002, et celle de l’activité conteneurs de Fos 8,3 % contre 4 %. Pour 2012, l’ambition est de porter ces parts à respectivement 12 % et 10 %. Un objectif appréciable, mais qui laissera le port de Marseille encore loin des standards nord européens; la part du fleuve pour Rotterdam, no 1 européen, avoisinant les 40 %.
Un conteneur sur 10 prendra le Rhône
À terme, un conteneur sur 10 de Fos prendrait ainsi le Rhône. Avec la mise en service de Fos 2XL, il pourrait s’agir de 200 000 EVP. « Le fleuve a des atouts. Il coûte 15 % moins cher que la route. Un seul convoi de pousseurs c’est 300 camions en moins sur la route », rappellent les partenaires. Un transfert que la convention signée entre les ports de Lyon et de Marseille et la douane aidera beaucoup. Elle autorise le dédouanement des marchandises à l’import, ce qui fait gagner un à deux jours sur le transit time Lyon/Marseille. Une nouvelle convention douanière à l’export est à l’étude.
Le Rhône vient de loin. Pratiquement inexistant, il y a encore une dizaine d’années sur la carte des dessertes fluviales. Il est aujourd’hui l’axe « le plus dynamique de l’Hexagone », d’après François Bordry. Une centaine de grosses unités sillonnent sa voie. Pour l’essentiel des petits armements et des artisans. L’an dernier, le naufrage d’Alcotrans a suffi pour plomber la progression à deux chiffres du trafic conteneurs. « La croissance de + 2,1 % en 2007 est décevante par rapport à un début d’année fortement prometteur, concèdent les partenaires. Les difficultés de l’un des 2 opérateurs fluviaux (Alcotrans devenu Logirhône depuis début janvier 2008), et la montée en puissance des services ferroviaires en direction de Lyon (10 nouvelles offres de navettes en 2007) ont contribué à ce ralentissement de croissance. » Avec trois dessertes hebdomadaires entre Fos et Lyon pour River Shuttle Containers (filiale CMA CGM) et deux pour Logirhône (filiale CFT), les services conteneurs semblent aujourd’hui calés. D’autant que les deux opérateurs ont en commande des unités neuves.
Des investissements à la pelle
Confortés par le Grenelle de l’environnement, les partenaires et opérateurs logistiques font tomber une pluie d’investissements sur les 550 km au gabarit européen de l’axe Rhône/Saône. De la plate-forme logistique de Pagny (sud de Dijon), de Lyon Terminal, dont Michel Margnes, se félicite du titre de « port avancé de Marseille », jusqu’à la darse 2 de Fos, c’est à coup de millions d’euros que l’axe se renforce entre Bourgogne, Rhône-Alpes et PACA. Désormais 1er port fluvial de l’Hexagone pour les conteneurs, Lyon vient de voir la CNR investir 16 M€ dans le doublement de sa capacité portée à 130 000 « boîtes ». Alors que la CNR effectue des travaux de modernisation et d’extension des installations de la voie fluviale (6 M€) dont les écluses pourraient être automatisées avant 3 ans, Fos va connaître d’importants chantiers. 22 M€ (12 de coopératives céréalières; Cerevia, 10 public) vont étendre le terminal céréalier des Tellines (Port-Saint-Louis-du-Rhône) avec un deuxième silo et une bande transporteuse qui le reliera au quai Gloria, une extension opérationnelle à l’été 2009 qui devrait presque doubler le trafic céréales sur le site en le portant à 1 Mt. Enfin, 22 M€ supplémentaires, inscrits au contrat de projet État-région, iront dans la réalisation d’une nouvelle liaison fluviale de 3,5 km entre le pôle conteneurs (darse 2) et le Rhône.
Autre perspective, veuf de son projet de liaison avec le Rhin, le Rhône étudie une possible connexion de 200 km avec la Moselle via la Saône. De quoi étendre un peu plus la ligne d’hinterland de Marseille-Fos.
Les investissements fluviaux du PAM
• 2 portiques de type Panamax à chaque extrémité du terminal à conteneurs de Fos. Coût: 3 M€.
• Depuis le 1er janvier dernier, création d’un tarif spécifique au fluvial, qui ne sera plus payable au shift, mais au nombre de conteneurs à partir d’un minimum de 30 mouvements. Ce tarif entraîne, en moyenne, une réduction de 35 %.
• Création d’une liaison fluviale entre le fond de la darse 2 et le canal du Rhône à Fos. Le chantier, d’un coût de 22 M€, est inscrit au Contrat de Projet État-Région 2007-2013. Ce nouveau canal, d’une longueur de 3,5 km, permettra le croisement de convois fluviaux de grand gabarit et réduira de 1 h 30 environ, le trajet entre le Rhône et les terminaux.
• 3 rénovations et 6 créations de postes à l’intérieur du Port de Fos, sont prévues courant 2008 et 2009. Montant estimé: 6 M€ (cofinancement dans le cadre du CPIER Plan Rhône)
• Adaptation du terminal céréalier du bassin des Tellines et liaison avec le quai Gloria à travers une bande transporteuse. L’ensemble des travaux (bande transporteuse + outillages) s’élève à 10 M€, dont 5,6 seront financés en propre par le PAM (Le reste est cofinancé dans le cadre du CPIER Plan Rhône). Le manutentionnaire occupant le terminal céréalier des Tellines, sera incité à développer les trafics, grâce à des tarifs dégressifs en fonction du tonnage traité.
