Construit par les chantiers coréens Hyundai Heavy Industries, le Marfret-Guyane a été livré le 17 octobre dernier. Du cousu main puisque sa longueur (170 m) est celle maximale autorisée pour opérer dans le port de Degrad-des-Cannes en Guyane. Son faible tirant d’eau (9,35 m) lui permet également de naviguer en eaux peu profondes. Le navire est équipé de trois grues, deux de 45 t et une de 25 t, afin d’embarquer des conteneurs dans des ports qui ne sont pas équipés de portiques. Le navire a une motorisation de 15 820 kW (soit 21 490 chevaux) et peut atteindre les 20 nœuds. Il est également doté de deux propulseurs d’étrave dont un situé à l’arrière; ce qui lui permet, le cas échéant, de se passer de remorqueur. Sa consommation en fioul lourd équivaut à 57 t/j. Le navire transporte du bois, du poivre, des cœurs de palmier. « La présence de Marfret prouve que le port du Havre est le port de tous les armements et de tous les trafics. Nous offrons une large palette de services y compris pour les marchés de niche », estime Jean-Pierre Lecomte, le président du Port autonome du Havre (PAH).
Le client d’abord
Raymond Vidil, le p.-d.g. de Marfret souligne que le Marfret-Guyane, qui a coûté 40 M$, fait partie d’une série de six navires identiques commandés avec CMA CGM. Tous deux disposent en effet d’un service commun sur la Guyane. Et la politique commerciale? « Notre stratégie est de nous rapprocher d’un service hebdomadaire à jour fixe, c’est-à-dire donner à la clientèle du Havre la garantie que l’on arrivera toujours en temps et en heure. Lorsqu’on fait plus d’une dizaine de ports dans la rotation, ce n’est pas toujours un objectif facile à tenir. Il faut donc des ports efficaces, mais aussi des navires adaptés. Notre prochain navire sur la ligne sera le Marajo qui sera livré au mois de septembre. Ce sera le dernier de la série des six porte-conteneurs ». La Guyane est-elle un marché de niche? Raymond Vidil ne le pense pas. « La notion de niche n’a pas le même sens géographique que par le passé. On peut juste dire que la ligne Guyane et l’Amazonie sont en dehors des grandes routes maritimes, c’est-à-dire l’Est-Ouest, les États-Unis, l’Asie et l’Europe. Nous Marfret, nous nous positionnons sur des routes Nord/Sud. Nous allons dans des ports à très faibles tirants d’eau comme en Guyane. Il y a de la concurrence, mais nous avons de l’avance, car nous sommes les seuls à desservir ces ports avec de la régularité et des navires adaptés. L’Amérique Centrale ou le nord de l’Amérique du Sud sont des zones qui se développent beaucoup, notamment dans l’industrie du bois. »
L’enjeu de la réforme des ports
Il y a plusieurs semaines, le port de Degrad-des-Cannes, situé en Guyane, a été secoué par une grève des dockers de l’Union des travailleurs guyanais (UTG). Les grévistes réclamaient notamment une prime de prise de poste pour différents agents. Selon le directeur du port, 200 conteneurs déchargés avaient même été bloqués sur le port. Un médiateur venu de métropole avait finalement fait le voyage pour débloquer la situation. « Nous sommes extrêmement dé pendants du temps de passage dans les ports. Ce conflit dure depuis très longtemps et porte sur la durée du temps de travail et les conditions qui s’y rattachent. Nous avons attendu pour voir si les choses se débloquaient. Mais là, nous avons débarqué toutes nos marchandises d ans le port de Trinidad et nous les avons réacheminées plus tard avec un feeder, car nous avons des obligations avec la Guyane et l’Amazonie. Il y a forcément un manque à gagner lorsqu’on procède de la sorte… Il faut qu’il y ait une adéquation entre nos investissements et les ports qui doivent fonctionner normalement. C ’est d ’ailleurs l’objectif de la politique de relance des ports français. »