Avec une stratégie de développement reposant sur les secteurs du transport et de l’énergie, la banque australienne Babcock and Brown a créé une structure dédiée aux investissements dans ce secteur. BBI, Babcock and Brown Infrastructure déploie ses activités dans son pays d’origine, en Europe et aux États-Unis.
Les premiers pas de BBI dans le monde des transports remontent à juin 2002, lorsque la société a repris le Dalrymple Bay Coal Terminal (DBCT), un terminal situé dans le territoire du Qeensland et qui exporte une grande partie du charbon australien. La société a ensuite étendu son champ d’action vers le transport ferroviaire en reprenant, en mai 2006, les actifs de WestNet Rail, un réseau ferroviaire dans l’ouest du pays, notamment au départ du port de Fremantle.
L’EUROPE, DU NORD AU SUD
Puis, BBI s’est tourné vers l’Europe où l’entreprise était déjà présente au travers de ses intérêts dans l’énergie. En février 2006, elle a pris pied dans la manutention portuaire en reprenant PD Ports, une société en charge des ports de Tees et Hartlepool. Et en juillet de la même année, BBI reprend 51 % du capital de WaterContainer Transport (WCT), société qui gère le terminal à conteneurs de Meerhout, en Belgique. En mai 2007, c’est en Espagne que BBI prend pied en rachetant 51 % de Tarragona Port Services (TPS), société en charge du terminal vracs solides de Tarragone. En juillet, BBI intensifie sa présence en Belgique et prend la majorité du groupe Manuport.
Manutentionnaire de vracs secs et de marchandises générales à Gand et Anvers, Manuport dispose d’intérêt en France et en Bulgarie. Manuport possède Norfram, commissionnaire et agent en douane, avec des bureaux au Havre et à Marseille. En août, BBI traverse les Alpes et pose un pied en Italie. Il reprend 50,3 % de TRI (Terminal Rinfuse Italia) qui traite des vracs secs, principalement du charbon et des cokes, depuis les ports de Gênes, Savone et Venise. Enfin, plus récemment, le groupe australien a étendu son rayon d’action au nord du continent en reprenant les Finlandais Oy Rauma Stevedoring and Oy Botnia Shipping, manutentionnaires de conteneurs et de produits forestiers dans les ports de Rauma et de Botnia. Enfin, BBI accroît sa présence dans la Péninsule ibérique avec la reprise de terminaux sur le port de Sagonte (voir encadré).
ET LA FRANCE?
Face à l’intensification de la présence de l’opérateur en Europe, la société a créé une structure, BBI Euroports, basée à Luxembourg, qui est dirigée par Nick West. Il fut directeur commercial de P&O Ports en Grande-Bretagne, société de manutention du groupe anglais P&O, qui était basée en Australie. Une analogie avec BBI Euroports, filiale européenne d’une société elle aussi d’origine australienne. "BBI Euroports est en charge de tous nos intérêts sur le continent. En Grande-Bretagne, nous sommes représentés au travers de PD Ports, une société que nous avons reprise en février 2006", explique Nick West.
BBI n’est pas présente dans la manutention en France, même si elle fut à un moment pressentie. En effet, elle a postulé à la reprise du terminal à conteneurs de Dunkerque, NFTIOU, face à APM Terminals et CMA CGM. Et si la direction du groupe assure regarder attentivement toutes les opportunités sur le continent, le marché français a ses particularités. "En France, la situation portuaire se révélait difficile en raison des interconnexions entre les différents opérateurs: CCI, collectivités locales et le gouvernement. La régionalisation des ports crée une situation plus claire. La création de sociétés en charge de la gestion des ports pourrait nous ouvrir de nouvelles opportunités sur ce marché."
Mais, sur le vieux continent, l’expansion de BBI Euroports alarme certains qui craignent de voir des financiers prendre des parts dans des sociétés de manutention pour en tirer les bénéfices uniquement. "Nous nous défendons d’une telle attitude, répond Nick West. Notre approche est claire: nous investissons sur le long terme." De plus, les membres de la direction de BBI Euroports alignent plusieurs années d’expérience dans la gestion de sociétés de manutention.
"Les sociétés reprises sont intégrées dans le réseau de BBI Euroports. Nous favorisons le maintien en place des équipes qui connaissent mieux le secteur et l’économie locale", continue le président de BBI Euroports.
La société a réussi, au cours des mois, à diversifier sa présence dans les différents types de terminaux: vracs solides, marchandises diverses et terminaux à conteneurs. "Notre stratégie n’est pas de reprendre des terminaux majeurs de conteneurs, mais plutôt de nous cantonner sur des unités de taille plus modeste. En intégrant les trafics conteneurisés britanniques, nous traitons environ 1 MEVP par an sur nos ports européens", souligne Nick West.
BBI Euroports ne souhaite pas en rester là. La société regarde attentivement les différentes opportunités. "Nous voulons équilibrer notre portefeuille pour avoir une meilleure répartition entre les différents types de terminaux: vracs secs, marchandises diverses, conteneurs et pétroliers. Aussi, nous voulons étendre notre couverture géographique en Europe", poursuit-il. Et le groupe affirme être dans une démarche de création de sociétés si le besoin s’en fait ressentir dans des ports.
Après la cession à DP World de P&O Ports, société australienne du groupe britannique P&O, BBI vient relever le flambeau de la manutention portuaire australienne en Europe.
L’Espagne, un marché cible pour BBI
L’entrée de BBI en Espagne est récente puisqu’elle date du 30 mai 2007 avec l’acquisition de 51 % du capital de Tarragona Port Services (TPS), le principal opérateur privé du port de Tarragone qui a traité 7,3 Mt en 2006. BBI a une option de rachat des 49 % restants d’ici le 30 juin 2009.
Tout récemment, TPS a constitué à son tour une coentreprise à 50-50, Sagunto Bulk Terminal, avec Cyes Participadas y Concesiones, filiale de l’entreprise de la construction Cyes. L’objectif est la construction d’un nouveau terminal dans le port de Sagonte, qui dépend de l’Autorité portuaire de Valence (APV). L’investissement prévu est de 110,5 M€ pour une concession de 35 ans.
BBI a donc choisi d’être présent dans les deux principaux ports de vracs secs de la façade méditerranéenne espagnole. Le pari est audacieux, car, contrairement aux conteneurs, le trafic de ce type de marchandises progresse lentement (+ 2,1 % pendant les neuf premiers mois de 2007 à 85,4 Mt après − 0,5 % sur l’ensemble de 2006). Ces investissements témoignent d’un regain d’intérêt des investisseurs étrangers pour la manutention espagnole.
Daniel Solano
BBI en quelques chiffres
– Chiffre d’affaires 2007 (BBI clôt ses comptes le 30 juin): AUS $ 1 239,3 millions (743,85 M€), + 55 %
– CA division transport: AUS $ 717,4 millions (430,6 M€), + 145 % dont:
– DBCT (Darlympe Bay Coal Terminal): AUS $ 168,1 millions (100,9 M€), + 10 %
– WestNet rail: AUS $ 190,4 millions (114,28 M€), + 1 260 %
– PD Ports: AUS $ 321,7 millions (193,09 M€), + 156 %
– European ports: AUS $ 37,2 millions (22,32 M€), + 100 %.
– Ebitda BBI Transport: AUS $ 299,4 millions (179,7 M€) dont:
– DBCT: AUS $ 82,4 millions (49,45 M€), + 3 %
– WestNet Rail: AUS $ 106,2 millions (62,42 M€), + 1 430 %
– PD Ports: AUS $ 106,2 millions (63,74 M€), + 165 %
– European ports: AUS $ 6,8 millions (4,08 M€), + 100 %.