En 1998, le manutentionnaire belge Sea Invest arrive en France en rachetant la société Saga, alors aux mains du groupe Bolloré. Cette première acquisition sera suivie, au cours des années suivantes par de nombreuses autres, à travers différents ports français. En 2003, Sea Invest reprend la Sogema, société implantée à Bordeaux, Rouen, Montoir et Sète.
En posant un pied à Sète, Sea Invest montre son intérêt pour les ports de plus faible trafic. En effet, en 2006, le port de l’Hérault a réalisé un trafic annuel de 3,42 Mt, en baisse de 10,9 %. Avec 1,5 Mt manutentionnées dans les vracs secs et les diverses, Sea Invest représente la moitié du trafic du port. Dans les vracs secs, l’opérateur traite principalement des produits industriels. Il reçoit de la bauxite produite dans la région et exportée soit par voie fluviale vers le Rhône et le réseau belge, soit par voie maritime vers l’Europe de l’Est et l’Amérique du Nord. Ce produit est ajouté au clinker pour la fabrication de ciment. À côté de la bauxite, Sea Invest gère les trafics de carbonate de soude en provenance de Bulgarie et d’Italie. Ces produits sont intégrés dans la fabrication de verre. Toujours au chapitre des vracs industriels, Sea Invest réceptionne des cokes de pétrole calcinés.
Le manutentionnaire belge traite également des trafics agroalimentaires, principalement des tourteaux et des graines oléagineuses. Ces produits sont reçus par train depuis le continent, ou par voie maritime depuis l’Amérique du Sud et les pays de la mer Noire. Les graines servent à la fabrication d’huile et de Diester par l’usine de la société Saipol installée sur le port. Les tourteaux, eux, sont utilisés en alimentation animale.
Enfin, quelque 250 000 t d’engrais entrent chaque année dans les installations de Sea Invest. Elles sont importées et ensachées directement dans les entrepôts du manutentionnaire. "Nous avons investi en 2001 dans deux lignes d’ensachage d’une capacité de 40 000 t à 50 000 t par an", explique Pierre de Boutray, directeur de Sea Invest Sète qui prévoit, pour les prochains mois, une augmentation des importations.
CONTENEURS: À LA RECHERCHE D’UNE LIGNE RÉGULIÈRE
Parallèlement aux vracs, Sea Invest Sète dispose d’une activité importante sur les marchandises diverses. Trois courants dominent: le granit, en importation du Brésil, les produits forestiers et les animaux vivants. Si le premier trafic se maintient, les deux autres vivent des heures difficiles. Tandis que les produits forestiers alimentent les usines à papier, "cinq à six usines de fabrication de papier ont disparu au cours des dernières années", explique Pierre de Boutray. Les choix logistiques évoluent. Auparavant, les exportateurs de pâte privilégiaient l’expédition par navire complet. Avec le développement de la conteneurisation, de plus en plus d’industriels optent pour ce mode de conditionnement. Et en matière de conteneurs, Sète n’est pas inscrit dans les lignes des grands armements. Les conteneurs passent donc par d’autres ports pour venir ensuite par camion dans l’hinterland. Refusant la fatalité, Pierre de Boutray et la place portuaire sétoise ont décidé de se mobiliser pour promouvoir une ligne régulière conteneurisée. "Nous avons un projet de ligne entre l’Amérique du Sud et la Méditerranée. Elle toucherait un port espagnol, Sète selon aliment, puis des ports italiens." Star Shipping assurerait cette rotation. De plus, le port dispose, dans ses cartons, d’un projet de création d’un terminal à conteneurs auquel le manutentionnaire s’intéresse. "L’espace portuaire est limité. Nous sommes un peu serrés aujourd’hui. En reprenant la gestion du port, la région travaille à la mise en place d’un schéma de développement. Il serait divisé en secteurs selon les trafics. Cela permettrait de créer un espace pour les conteneurs."
DE NOUVEAUX TRAFICS
Autre courant qui souffre, le transport d’animaux vivants. Depuis plusieurs années le port de l’Hérault a su se positionner sur ce créneau en créant un parc et des installations appropriées. Les trafics ont connu une progression constante, mais l’Europe a supprimé les restitutions à l’export sur les animaux pour la boucherie en 2005. "Depuis cette décision, nous avons perdu tous nos trafics d’animaux vivants", regrette le directeur de Sea Invest. Dès 2006, le trafic a affiché une baisse de 63 % à 15 520 t. En 2007, le parc est resté désespérément vide. Des négociations sont en cours avec les exportateurs pour trouver de nouveaux débouchés. "Le terminal répond aux normes européennes. Il a été créé avec les exportateurs. Nous travaillons ardemment pour le réactiver." Malgré tous ses atouts, ce terminal souffre de la concurrence avec Trieste et Luka Koper.
Dans ce contexte difficile, Sea Invest Sète a su développer de nouveaux trafics. D’abord, ce fut des pièces d’éoliennes. Ensuite, Sea Invest a pris un marché pour la société Cameron. Cette société américaine, basée à Béziers, est spécialisée dans le matériel de forage. À Sète, sur le terminal de Sea Invest, arrivent des tubes à l’état brut. Ils viennent du Japon, de Suède et des États-Unis. Les pièces quittent le port par train vers l’usine pour ensuite revenir sous forme de tubes finis. Démarré au début de l’année pour les importations, ce trafic devrait s’intensifier dans les prochains mois. Les premières exportations ont été réalisées au cours de l’été.
Aujourd’hui, Sea Invest mise sur d’autres projets et notamment le ciment pour la société Lafarge. Pour l’instant, la société reçoit le clinker depuis Port-la-Nouvelle pour son usine de Balaruc, ville située sur les rives de l’étang de Thau à quelques tours de roues de Sète. Sea Invest a proposé à la société cimentière de recevoir l’ensemble de son clinker et de ses laitiers par voie maritime à Sète, soit au total un trafic de 500 000 t. Autre projet, celui-ci pour la société Chane, consiste aussi en l’importation de clinker."Le port avance sur ce dossier", confie Pierre de Boutray.
Manutentionnaire, Sea Invest joue aussi le rôle de commissionnaire. "En terrestre, nous essayons de privilégier, dès que nous le pouvons des modes alternatifs comme le ferroviaire ou le fluvial." Le train intervient principalement pour les trafics de charbon et de coke. Le fluvial correspond plus à des lots pour l’agroalimentaire et la bauxite. "Avec le canal du Rhône à Sète, nous avons une alternative intéressante. Nous pouvons charger des bateaux de 1 000 t aujourd’hui et le projet de passer à 1 500 t de capacité dans les prochains mois est évoqué", indique Pierre de Boutray. Ce choix des modes alternatifs demeure minoritaire. "Notre hinterland va depuis l’Espagne jusqu’à Lyon et Toulouse. Pour les distances courtes, la route reste le moyen le plus adapté", explique le directeur.