Marseille appuie sur l’accélérateur

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Avec l’élection présidentielle, la conjoncture politico-économique dégage-t-elle une fenêtre de tir exceptionnelle pour mettre Marseille-Fos sur orbite internationale? L’ascension continue des échanges maritimes finira-t-elle par l’entraîner? Ou lassé de "la vision décalée de certains médias aux propos désolants", le PAM a-t-il décidé de mettre le turbo? Le conseil d’administration de l’établissement portuaire, qui s’est tenu le 1er juin, a adopté la taille supérieure. Alors que Fos 2XL ne sera opérationnel qu’en 2009, le lancement des études pour la réalisation de Fos 3XL et Fos 4XL a été lancé. Ces deux nouveaux terminaux à conteneurs devront faire l’objet d’un appel international à candidature pour cet automne. "Fos 2XL ne constitue qu’une opération de rattrapage du retard pris depuis 20 ans, le PAM souhaite poursuivre son développement par le déploiement de Fos 3XL et Fos 4XL", explique Christian Garin, son président.

UN DÉVELOPPEMENT EN XXL

Fos 3XL, nouveau terminal de 800 m s’inscrit dans la continuité de Fos 2XL, le long de la rive ouest de la darse 2. Le projet n’est pas nouveau; il a été inscrit au contrat de projets État-Région 2007-2013 pour un investissement infrastructures de 200 M€. Ses 800 m de quai seront totalement intégrés dans la continuité du pôle Graveleau (terminal public, les deux lots de Fos 2XL/Fos) et visent à recevoir 800 000 EVP.

Projet tout à fait nouveau, Fos 4XL sera implanté en vis-à-vis du terminal public de Graveleau à l’entrée de la darse 2, sur une partie des terrains (25 ha) réservés depuis 2002 par Suez pour réaliser son grand complexe énergie-utilités; le groupe industriel ayant rabattu dans son ambition. Suivant le PAM, Fos 4XL bénéficiera d’une excellente accessibilité nautique; le nouveau terminal de 1 000 à 1 200 m ne nécessitera pas d’importants travaux de dragage limitant ainsi les investissements. Un trafic de l’ordre de 1 à 1,2 MEVP est attendu.

Même si Fos 4XL devrait être inscrit au contrat de projets État/Région suivant, le PAM lance les deux extensions en parallèle, sans chronologie préconçue; elles pourraient être opérationnelles entre 2015 et 2018. Les deux nouveaux terminaux "seront exploités sous le régime de la « convention d’exploitation de terminal » prévu par le code des ports maritimes et feront l’objet d’une mise en concurrence à l’échelle mondiale", précise-t-on. Interrogé, Renaud Spazzi, directeur "aménagements, travaux et projets", reconnaît que des groupements d’armateurs, principalement asiatiques, ont montré leur intérêt de s’installer à Fos.

CLARIFIER LA POSITION DE L’ÉTAT

Marseille-Fos va-t-il enfin surfer sur la vague mondiale des conteneurs? "Il faudra avant clarifier la situation", avertit Christian Garin. "Les problèmes de Marseille-Fos ne sont pas dans son outil PAM, ni dans ses projets, mais plus dans la question: comment par rapport à une évolution accélérée, son actionnaire, l’État, se positionne-t-il?". Et de préciser: "Quand on s’aperçoit que la part de l’État dans les investissements de Fos 2XL est finalement de 8 % (au lieu des 60 % prévus par les textes), ne faut-il pas aller vers une refonte, une redéfinition de la politique portuaire?". Autrement dit, comment tenir compte de la nouvelle part et place du privé dans le développement portuaire? La question du commandement du personnel s’inscrit en corollaire. Des négociations sont toujours en cours avec les agents portiqueurs du PAM. "Elles ne devront pas s’éterniser. Nous ne voulons pas aboutir à un protocole la veille de l’ouverture de Fos 2XL comme cela fut le cas pour Port 2000. La question devra être tranchée en 2008", promet-il. C’est un gage pour la réussite de Fos 2XL et encore plus pour la faisabilité de Fos 3XL et 4XL.

Plein, Fos Distriport s’étendsur 100 ha supplémentaires

Ça y est, le site de Fos Distriport (180 ha) est plein. Démarrée lentement dans les années quatre-vingt-dix, la commercialisation de la plate-forme logistique s’est effectuée ces derniers temps sous la pression de la demande. Les quatre dernières parcelles disponibles ont été concédées à trois sociétés déjà présentes sur les sites et qui souhaitaient disposer de surfaces supplémentaires. Ainsi, la société Gazeley – avec un entrepôt de 20 000 m2 et le projet d’un 2e de 36 000 m2 – s’est vu autorisé la cession d’une nouvelle parcelle de 14 ha pour y développer son concept de “Magna park”. Deux autres parcelles de 14 ha ont été attribuées au promoteur immobilier Nexity-Geprim adossé à l’investisseur AMB et à la société Francesca. Nexity-Geprim construit actuellement un entrepôt de 50 000 m2 sur Distriport tandis que Francesca y exploite un entrepôt de 32 000 m2. Enfin, la société IRDS, filiale du groupe belge Eurorail International, implantera sur une parcelle de 5 ha un entrepôt embranché au réseau ferroviaire.

Avec ces quatre dernières opérations de cession, plus aucun terrain n’est disponible sur les 180 ha de Fos Distriport. La montée en charge de l’exploitation des 600 000 m2 que doit compter la plate-forme se fera à l’horizon 2010 à 2012. Toujours sollicité pour de nouvelles implantations dans la perspective des projets d’extension des capacités de traitement de conteneurs à Fos, le conseil d’administration du PAM a décidé d’étendre Fos Distriport de 100 ha. Partagée en quatre lots, cette extension représentera environ 250 000 à 300 000 m2 d’entrepôts logistiques supplémentaires pour environ 800 à 1 000 emplois directs créés.

Les terminaux conteneurs embranchés directement sur le Rhône

Plus de 56 000 EVP ont été transportés par voie fluviale depuis Fos en 2006, l’objectif du PAM est d’atteindre 130 000 EVP en 2010-2015. Notamment en aménageant une liaison fluviale entre la darse 2 et le canal du Rhône à Fos. La connexion directe entre les terminaux à conteneurs du PAM et le Rhône serait ainsi assurée. Jusqu’à présent, les barges devaient sortir en mer. En creusant un chenal de 3,5 km de long, les convois fluviaux au gabarit européen pourraient bénéficier d’une voie navigable. Cette nouvelle liaison fluviale permettra de réduire de 9 km le trajet d’accès des barges fluviales aux terminaux à conteneurs et de gagner en temps de parcours. Cette connexion fluviale, inscrite au contrat de projets État-Région 2007-2013 représente un investissement évalué à 22 M€; les travaux pourraient être entrepris début 2009 pour une mise en service en 2010.

La communauté marseillaise demande un "new deal" portuaire

Lors de l’assemblée générale du Medef 13, le 4 juin, une refonte du statut des ports autonomes a été demandée.

Marseille-Fos va-t-il devenir la tête de pont de la modernisation portuaire? C’est bien parti pour. Le 4 juin, à l’occasion de l’AG de l’UP13/Medef 13 qui a rassemblé plus de 1 500 patrons du département, le titre d’affiche proclamait “Quel avenir pour les ports français?”. Au débat qui devait s’en suivre prônant un “new deal” (ou “un Grenelle portuaire”) des ports français devaient se succéder Laurence Parisot, présidente du MEDEF, Jacques R. Saadé, président du directoire de la CMA CGM, Jean-Claude Gaudin, sénateur maire de Marseille, Jacques Pfister, président de la CCIMP, Marc Reverchon, président de l’UMF, Christian Garin, président du PAM et Jean-Louis Schilansky, délégué général de l’Union française des industries pétrolières. Du beau monde qui est allé dans le même sens ramassé dans une formule par Stéphan Brousse, président de l’UPE13/MEDEF13: “Il faut faire bouger les lignes, remettre les ports français, véritables outils de développement économique locaux dans la compétition internationale.

À CHACUN SON REMÈDE

En fait, dans les interventions, plusieurs lignes étaient concernées. Et si tout le monde s’accordait sur le diagnostic, chacun établissait des remèdes à partir de sa propre feuille de maladie. Pour la présidence du PAM et de la CCI Marseille-Provence, l’heure était à une clarification du statut des ports autonomes par l’État. Une urgence que la communauté économique marseillaise, traumatisée par la grève de mars des agents pétrole du PAM, a martelée tout au long des propos. Mais derrière l’implosion exigée de l’établissement portuaire dont les fonctions “régaliennes” devraient être circonscrites à la sécurité, au contrôle et à l’aménagement, s’exprimaient plusieurs intérêts.

Tout en dénonçant à nouveau “l’archaïsme de la CGT qui ne veut pas évoluer” et le parisianisme du commandement du port autonome, Jean-Claude Gaudin était plutôt intéressé par la libération d’une partie de la façade des bassins Est pour coller à “l’évolution du marché de la croisière”. Son premier adjoint à la mairie et président d’Euroméditerranée, Renaud Muselier, abondait avec une vision encore plus promotionnelle. Il voudrait remonter le long des quais afin de poursuivre l’opération de reconstruction urbano-portuaire engagée. Jacques Saadé leur a donné quitus en concédant que l’activité conteneurs de Mourepiane (dont la CMA CGM assume l’essentiel) pourrait parfaitement être rapatriée vers Fos, laissant libre les postes à quai pour l’activité croisière

Très pragmatique comme à l’accoutumée, le patron de la CMA CGM a mis à profit la tribune patronale pour “tendre la main aux syndicats en temps de paix sociale”. Il a invité les partenaires sociaux à se réunir dès ce mois-ci avec les acteurs portuaires et les clients afin de trouver une solution au manque de fiabilité et de compétitivité du port de Marseille. “Je participerai personnellement à cette réunion”, a-t-il assuré. “Une solution spécifique à Marseille peut être trouvée avec un réajustement des revenus liés à la performance, mais surtout l’assurance d’une paix sociale avec un préavis de grève porté à une semaine.” Visiblement, le futur opérateur de Fos 2XL n’entend pas attendre 2009 pour régler le problème du commandement unique sur les terminaux privés. Convaincu que les fonctions commerciales et opérationnelles du port doivent désormais appartenir aux intervenants privés pour des durées de 30 ans ou plus, il s’est prononcé, dans un accès de colère, pour la transformation du port autonome en société anonyme, “comme à l’aéroport de Paris”. Un point de vue que les autres intervenants n’ont pas osé partager. Même si tous faisaient leur la conclusion de Marc Reverchon, président de l’UMF: “Le temps est venu de la rupture et de l’action.”

R.V.

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