Ce rapport du BINLEA, organisme dépendant du Département d’État américain, est formé de deux tomes: Drug and Chemical Control (600 p.) et Money Laundering and Financial Crimes (450 p.). Il s’agit pour les experts américains d’estimer, pays par pays, en 2006 l’importance des activités de production, de transformation, d’acheminement et de distribution des produits illicites ou des substances chimiques servant à leur élaboration ainsi que les activités de blanchiment des revenus financiers. Les actions plus ou moins efficaces de chaque État sont également décrites.
En matière de principaux fournisseurs de produits chimiques servant à produire des drogues, figurent, par ordre alphabétique, l’Argentine, le Brésil, le Canada, la Chine, l’Inde, le Mexique, les Pays-Bas et les États-Unis eux-mêmes.
La liste des "meilleurs" États en matière de blanchiment d’argent est bien plus longue: une soixantaine, dont presque tous les États membres de l’Union européenne des 15, ainsi que les États-Unis.
LES PAYS-BAS: SON PORT, SON AÉROPORT.
"Grâce à la densité de ses infrastructures de transport et à son port le plus actif d’Europe, les Pays-Bas restent l’une des principales plates-formes de distribution de drogues illicites destinées ou provenant d’Europe. Un pourcentage significatif de la cocaïne consommée en Europe est passé par les Pays-Bas qui restent un important producteur d’ecstasy", précise la fiche "pays" consacrée aux Pays-Bas. Rotterdam, le très grand aéroport de Shiphol et son réseau de transport rendent le pays particulièrement attractif pour les trafiquants et les "blanchisseurs" d’argent sale, poursuivent les experts américains. Sa production de produits chimiques attire également les acheteurs illégaux. La relative indifférence de l’opinion publique néerlandaise vis-à-vis de ces activités n’échappe pas aux Américains.
LA BELGIQUE: ANVERS ATTIRE LA COCAÏNE
"La Belgique reste un important point de transit pour les trafiquants du fait de son infrastructure portuaire (Anvers est le second port d’Europe), de ses deux aéroports internationaux, de ses autoroutes, de son réseau ferré relié au reste d’Europe et de sa proximité avec les Pays-Bas où le trafic de drogue est un problème majeur", explique le paragraphe sur les flux "marchandises" de la fiche consacrée à la Belgique. "On estime qu’environ 25 % de la drogue sud-américaine arrivant en Europe, transite éventuellement par la Belgique, en particulier la cocaïne […] Le port d’Anvers reste la destination préférée des importateurs de cocaïne en Europe. […] Ce flux est principalement contrôlé par des organisations colombiennes" […] Des employés du port d’Anvers sont également soupçonnés d’être impliqués dans la réception et le déchargement de la cocaïne (1)."
Le rapport rappelle que l’accord bilatéral sur la Container Security Initiative permet aux douaniers américains de "conseiller" leurs homologues belges pour les expéditions maritimes vers les États-Unis.
LA FRANCE ET SA SITUATION GÉOGRAPHIQUE
"La France reste une plate-forme importante de transbordement en Europe. Compte tenu de ses frontières communes avec l’Espagne, l’Italie et la Belgique, la France est le point de passage naturel des drogues destinées à l’Amérique du Nord et au Moyen-Orient. Ses possessions dans les Caraïbes, sa proximité avec l’Afrique du Nord et sa participation à l’accord de Schengen contribuent à l’attractivité de la France en matière de transit des substances illicites. […] Le tunnel sous la Manche est de plus en plus utilisé par les trafiquants pour alimenter la Grande-Bretagne et l’Irlande", est-il souligné.
Compte tenu du sujet, il est délicat pour les autorités néerlandaises, belges voire françaises de se servir du rapport américain pour promouvoir les activités de logistique de leur pays respectif, mais l’organisation, semble-t-il, très rigoureuse de ce document laisse perplexe, notamment sur l’un des aspects collatéraux de l’internationalisation croissante de la division du travail.
1) "Antwerp port employees are also documented as being involved in the receipt and off-loaded facilitation of cocaine upon arrival at the port", p. 361.
