Quelle sera la position future d’Anvers dans le trafic des fers et aciers? Tel était le thème du séminaire organisé, le 11 décembre à Anvers, par les publications Le Lloyd et Transport Echo. Sans assurance sur l’avenir de ce trafic, le débat a néanmoins permis de mettre en évidence les problèmes qui se posent et d’évoquer les solutions permettant d’améliorer une situation qui s’est dégradée ces dernières années.
D’une part, le trafic des fers et aciers souffre des mutations de l’industrie sidérurgique en Europe, le trafic se faisant maintenant plus à l’importation qu’à l’exportation. La production d’aciers belgo-luxembourgeoise est en régression constante: 10,4 Mt en 2005 (− 10,3 %). Parallèlement, les importations de minerai et charbon sont en baisse.
Selon le représentant du comité de la sidérurgie belge, Luc Braet, les exportations de produits finis au départ de ports belges iront en diminuant, notamment avec la fermeture du dernier haut-fourneau à Liège en 2009.
D’autre part, Anvers est soumis à une forte concurrence de la part de ports voisins, plus précisément néerlandais, qui sont moins chers. À Anvers, une douzaine de terminaux se partagent un trafic de quelque 14 Mt, mais certaines installations devraient être modernisées.
LES MOYENS À METTRE EN ŒUVRE
Le directeur général du port d’Anvers, Eddy Bruyninckx, constate que les coûts d’escale sont élevés, que le port souffre d’un manque d’investissements et que l’organisation du trafic y est peu flexible; autant de défis à relever, mais autant de facteurs qui ont causé des pertes de trafic. Il préconise une modernisation des terminaux, de manière à être en ligne avec les nouveaux types de navires qu’exploitent des armements comme Rickmers. Cela implique les adaptations suivantes:
• établir un diagnostique du trafic sur base de chiffres corrects et objectifs de manière à avoir une vue réelle de l’évolution des tâches par produit;
• revoir la constitution des équipes par type de fret et par terminal;
• assouplir la législation régionale flamande (Codex) et former différentes équipes pour le shortsea (demi-shift);
• mettre en place une autre organisation du travail, mais pas au détriment de la sécurité et de la qualité;
• augmenter la formation interne;
• investir dans des entrepôts modernes équipés d’installations de contrôle des températures et de l’humidité;
• procéder à d’autres méthodes de manutention.
Pour Eddy Bruyninckx, le succès ne peut être obtenu que si toutes les autres parties concernées y contribuent.
L’autorité portuaire pour sa part a déjà fait de sérieux efforts en procédant à des baisses de tarifs pour le pilotage dans les bassins. Depuis 1998, cinq zones d’opérations ont été déterminées, ce qui s’est traduit par une diminution des tarifs de 37 %. Des réductions supplémentaires sont accordées:
• pour les navires devant changer de postes pour diverses opérations de manutention (− 50 %);
• dans le cas où il y a plus de 300 opérations de remorquage par armement (− 18 %).
Les droits d’accostage sont eux passés de 0,126 4 €/Mt en 1997 à 0,050 7 € pour les fers et aciers, le bois, le papier et autres diverses. Des réductions ont été accordées en fonction de la croissance des escales sur base du tonnage fret, ceci pour les lignes régulières, de même que pour les services shortsea. D’autres dispositions sont à l’étude comme une exemption de pilotage pour le cabotage, une tarification plus flexible pour les concessions et une assistance à l’infrastructure lors d’investissements.
Le représentant des services du pilotage (mer et rivières), Tony Vuylsteke, a mis l’accent sur le fait que la facture du pilotage ne représente que 3,22 % du coût global d’un voyage et que les tarifs n’ont augmenté que de 7,8 % au cours des six dernières années, contre 20,7 % pour les ports de la Zélande.
L’adaptation prévue pour le 1er janvier ne sera que de 2,75 %.
VERS UNE REFONTE DES CONDITIONS DE TRAVAIL?
Représentant la Fédération maritime d’Anvers, le point de vue de Philippe Oyen (Belgo Iberian Maritime) était quelque peu différent. Se basant sur un type de navire aligné dans les trafics sidérurgiques, il affirme qu’Anvers en matière de coûts d’escale, comparé à Flessingue, Rotterdam, Brême et Brake, est le plus cher. Il insiste donc pour une baisse des coûts du pilotage et d’escale, et surtout pour une réorganisation du travail côté manutention.
Quant au représentant d’Arcelor Logistics, William Moyersoen, il insiste sur la nécessité d’une qualité maximale des prestations.
En réalité, l’élément crucial de la problématique du trafic des fers et aciers réside au niveau des conditions du travail portuaire et de la refonte du Codex. Si le représentant du syndicat Ubot (Union belge des ouvriers du transport), Marc Loridan, n’a pu assister au colloque, le patron de la centrale patronale (CEPA), Paul Valkeniers, a bordé cet aspect. Il reste partisan du système de pool, même si celui-ci est onéreux, et avance des propositions en matière d’équipes pour les fers et aciers, qui comptent actuellement huit dockers. Le concept actuel est pénalisant par rapport aux autres ports.
Les manutentionnaires, qui veulent avoir une maîtrise générale et totale des coûts, souhaitent une plus grande flexibilité de l’emploi pour faire face aux pointes de trafic. Des équipes devraient être ramenées de six à quatre dockers, et devraient également être revues à la baisse pour les barges et les caboteurs. En pratique, les négociations se poursuivent entre patronat et syndicats, mais n’ont jusqu’ici guère donné de résultats.
Nouveau trafic de fers et aciers en provenance de Chine
Depuis quelques semaines, le port d’Anvers réceptionne d’importantes quantités de produits sidérurgiques en provenance de Chine. L’armement Hyundai Merchant Marine (HMM) a obtenu un contrat pour le chargement régulier de lots de produits sidérurgiques dans le port de Ghangshu à destination d’Anvers. Ce contrat porte sur un trafic de plus de 400 000 t pour 2007. Aucune indication n’a été donnée jusqu’ici sur son possible prolongement en 2008. Ces cargaisons sont destinées au marché belge.
Une première cargaison a été réceptionnée fin décembre lors de l’escale du Heng-Chang, un vraquier de type handymax de 45 000 tpl. Il a déchargé 40 000 t de produits sidérurgiques (coïls et tubes) aux terminaux de Nova-HNN et d’ABES. Mi-janvier, un second navire a déchargé 50 000 t d’aciers. Selon la direction de l’agence anversoise de HMM (Belgium), ces arrivages devraient se poursuivre au rythme de 30 000 à 40 000 t par mois.
EN 2006, HMM a effectué une dizaine d’escales en conventionnel/breakbulk à Anvers en y déchargeant 150 000 t d’aciers.