Sur les 15 dernières années, le port de commerce de Brest a augmenté ses trafics de 45 %. Mais à l’aube de la passation de pouvoir de l’autorité concédante de l’État vers la Région Bretagne (JMM 24-11-2006, p. 14) qui doit intervenir d’ici la fin de l’année, la CCI brestoise lance un pavé dans la mare en révélant son schéma de développement à long terme qui vise à un doublement de ses activités. Pour ce faire, une étude stratégique a été confiée pendant deux ans au cabinet BCEOM qui a donné ses conclusions lors de cette assemblée générale. Réalisée par sept personnes au total, cette étude a été supervisée par André Graillot, ancien directeur général des ports autonomes de Nantes/Saint-Nazaire et du Havre, et ex-coordinateur du collège maritime au Conseil général des ponts et chaussées. "Passant d’une concurrence européenne dans les années quatre-vingt-dix à une concurrence intercontinentale aujourd’hui, le port de Brest doit relever le défi pour maintenir la compétitivité de l’économie bretonne", a-t-il commenté. Et s’adapter aux nouvelles donnes internationales, c’est prendre tant les aspects techniques qu’économiques. En clair, prendre en compte l’accroissement de la taille des navires (Brest va devoir passer de navires de 60 000 t aujourd’hui à des Panamax et Cape Size de 80 000 à 100 000 t), réduire les coûts de manutention des marchandises (la différence actuelle est de 15 $ la tonne), s’adapter aux nouvelles donnes des accords de l’OMC, de la Politique agricole commune (PAC) ou des nouvelles contraintes qui pèsent sur les matières premières agricoles (MPA) et rechercher activement à réduire les coûts de transit des marchandises. En résumé, selon André Graillot, "enclencher un cercle vertueux pour diminuer l’écart de compétitivité avec les ports du Nord".
117,2 M€ d’investissements
Mais cet accroissement de la productivité de la chaîne doit prioritairement démarrer par l’amélioration des conditions d’accueil des navires: approfondissement et élargissement des chenaux d’accès et des souilles, augmentation de la capacité d’accueil des quais, adaptation de l’outillage aux trafics, capacité de stockage nécessaire, augmentation des cadences et de la durée d’ouverture du port, amélioration de l’accueil des passagers et de la croisière, etc.
Extrêmement précise, cette étude stratégique analyse et chiffre finement, trafic par trafic, tout ce qui peut être amélioré. Et dans une "hypothèse réactive", elle prédit qu’à long terme, Brest passerait ainsi des 2,4 Mt de marchandises enregistrées en 2005 à 4,7 Mt en 2015 et 5,1 Mt en 2020. À titre d’exemples, les hydrocarbures et gaz passeraient ainsi de 982 000 t en 2005 à 1,7 Mt dès 2015 et 1,8 Mt en 2020, les clinkers et ciments de 121 000 t à 550 000 t en 2015 et à 650 000 t en 2020, les sables de 164 000 t à 560 000 puis 650 000 t, les ferrailles et déchets plastiques de 78 000 à 142 000 puis 181 000 tonnes, les conteneurs de 30 000 à 54 000 EVP. Idem pour les MPA vracs solides, les huiles de soja et de colza, etc. Un développement forcément synonyme de pas mal de chamboulement dans le paysage portuaire qui gagnerait alors de la place vers l’Est et le polder. Non sans quelques investissements bien sûr: 76,8 M€ pour la première phase et 40,4 millions supplémentaires pour la seconde phase. "Nous n’avons pas attendu la fin de cette étude stratégique pour lancer les premiers investissements", souligne-t-on à la CCI qui a donc déjà démarré concrètement le schéma de développement à long terme de son port.