Ce protocole a été signé entre le directeur du Port autonome de Marseille, le président de la société du pipe-line sud-européen (SPSE), les représentants de la société de remorquage portuaire, du syndicat des pilotes, de la société coopérative du lamanage des ports et surtout les représentants allemands des sociétés partenaires de la raffinerie Miro à Karlsruhe.
Depuis cinq ans, le trafic moyen annuel qui alimente la raffinerie par le pipe-line est de 7,5 Mt. Pour cet approvisionnement, Fos est en concurrence serrée avec Trieste. Il y a bientôt vingt ans, suite à un conflit portuaire à Marseille, les raffineurs allemands avaient pris la décision de réactiver un pipe désaffectée avec le port italien.
Aujourd’hui, l’entente vise non seulement à maintenir le flux de 7,5 Mt mais à le développer avec des remises tarifaires à la clé lorsque ce seuil est dépassé. Pour le PAM, "plusieurs centaines de milliers de tonnes de pétrole brut supplémentaires par an sont susceptibles d’être ainsi captées". Ce protocole fait suite à un précédent accord, très complexe et qui avait été dénoncé par la Cour des comptes.
Pour Christian Garin, le président du PAM, "la signature d’un tel protocole est révélatrice de la capacité de mobilisation des différents acteurs de la place portuaire pour l’augmentation des trafics d’hydrocarbures et pour la création d’activité et d’emplois". Ce secteur constitue le fonds de commerce de Marseille-Fos avec 62,6 Mt (dont 45 Mt de pétrole brut), soit les deux tiers de son trafic global. Des chiffres qui le consacrent d’ailleurs comme 1er port pétrolier français, 2e européen et 3e mondial. Une ressource que le PAM n’entend pas voir tarir. Ainsi, il consacrera, d’ici à 2010, un programme d’investissements de 86 M€ dédié au maintien et à la sécurité des terminaux pétroliers.
SPSE: un long fleuve tranquille de pétrole brut
En 1958, 16 sociétés pétrolières appartenant à six pays différents participent à la création de la SPSE permettant la mise en service opérationnelle, en 1962, d’une canalisation de grand diamètre reliant la Méditerranée à la région du Rhin supérieur. Celle-ci fut doublée, puis triplée en 1971-1972. Aujourd’hui, les actionnaires sont moins nombreux (1).
Des centaines de kilomètres de pipes assurent l’approvisionnement des raffineries et d’une plate-forme pétrochimique sur l’axe Fos-Karlsruhe (769 km) réparties sur trois pays (France-Suisse-Allemagne). Le transport actuel, de l’ordre de 23 Mt par an, représente en “tonnes. kilomètres” plus de 30 % du transport de pétrole brut par pipeline en Europe et le tiers de l’activité marchandises de la SNCF.
Le premier choc pétrolier de 1972 va voir le robinet se resserrer. Avec 42 Mt transportées, le record date de 1973. Sur les 12 raffineries des débuts, seuls cinq sites industriels subsistent actuellement: Feyzin, près de Lyon (TotalFinaElf), Cressier en Suisse, près de Neuchâtel (Petroplus), Reichstett (CRR) près de Strasbourg (Shell, TotalFinaElf, BP), Carling, en Lorraine (Atofina) et Miro, à Karlsruhe en Allemagne (Conoco, DEA, Esso, RuhrOel). Ils sont approvisionnés en pétrole brut pour les raffineries et en naphta/condensaSt pour la plate-forme pétrochimique de Carling.
Trois pipelines, dont deux en fonctionnement, relient Fos aux raffineries: une ligne de 40 pouces (102 cm) de Fos à Strasbourg, une ligne de 24 pouces (61 cm) de Fos à Lyon. La ligne de 34 pouces (86 cm) de Fos à Karlsruhe, actuellement inactive dans sa partie Fos/Strasbourg, est inertée à l’azote.
Comme le pétrole a besoin de l’électricité pour remonter ces centaines de kilomètres, pas moins de 34 pompes centrifuges de pompage assurent la livraison. La consommation électrique (100 GWh/an) correspond aux besoins d’une ville de 60 000 habitants.
Enfin, la SPSE dont le siège est à Neuilly-sur-Seine, emploie l’essentiel de ses 180 salariés sur le site de Fos.
R.V.
(1) Total, 27,8 %; Exxon, 22,0 %; Wintershall, 14,3 %; BP, 12,1 %; Shell, 10,3 %; Shell-DEA, 4,0 %; Ruhr OEL GmbH (détenu à parts égales entre Veba Oel AG et Petroleos de Venezuela SA), 7,5 % et Conoco, 2,0 %.
Stocks en or… noir
Si la Société du Pipeline Sud-Européen (SPSE) représente d’abord des tuyaux, c’est aussi des dépôts. À Fos-sur-Mer, sur le terminal SPSE, on ne compte pas moins de 40 réservoirs totalisant 2,26 millions de m3 destinés au stockage temporaire d’une vingtaine de qualités de pétrole brut en transit.
Au temps où la spéculation fait flamber la valeur de l’or noir, ces dépôts font rêver les traders. Olivier de Tinguy, président du SPSE, est clair. Il existe avec les réservoirs un véritable filon à exploiter sur le marché pétrolier, où la production est condamnée au retrait et la construction de raffineries se comptera au goutte-à-goutte.
Dans ce contexte, une étude vient de démontrer que la construction (ou la jumboïsation) de dépôts pouvaient s’amortir en quelques mois. La SPSE a bien reçu le message, elle pour qui la location des réservoirs de Fos figure parmi ses activités les plus rentables. Seule anicroche, les exigences environnementales rendent le montage des dossiers de réalisation explosif.
R.V.