Née de la faillite de la Compagnie générale transatlantique et de la Compagnie de navigation mixte, l’entreprise publique a tourné la dernière page de son histoire. Elle s’est inscrite à la date du 31 mai, jour du conseil d’administration qui a entériné la prise en main de ses nouveaux actionnaires: le fonds d’investissements Butler Capital et Veolia Transports. Dans le détail, l’État conserve 25 % de la compagnie, 38 % pour Butler Capital Partner, 28 % pour Veolia Transports et 9 % pour les salariés.
La passation de pouvoir s’est déroulée suivant un scénario préétabli et cinq heures de réunion. L’État a effacé l’ardoise (dettes et passifs) de la société en recapitalisant pour 145,2 M€ tandis que pour 35 M€, les actionnaires privés reprennent un actif évalué à plusieurs centaines de millions d’euros (dont 450 millions pour la seule flotte de 10 navires).
Le nouveau cap a été salué par une dernière salve de la CGT. Jean-Paul Israël, le leader du syndicat a en effet dénoncé un arrangement surprise "politico-financier". "Alors que le conseil d’administration du 10 avril dernier indiquait que Butler Capital Partner recueillait 1 057 actions, on découvre qu’il n’en aurait que 63. Le reste est entre les mains d’investisseurs étrangers réunis dans un fonds commun de placement à risque, France Private Equity III, comprenant 50 % d’Américains, dont on ne connaît ni le nom, ni les attentes financières ou industrielles, alors qu’ils sont les premiers actionnaires de la SNCM."
"Il ne s’agit pas d’un nouvel arrivant", a rétorqué William Butler en expliquant qu’un tel montage de fonds d’investissement est classique.
Pour le reste, Bruno Vergobbi, dernier président nommé par l’État, a passé le relais à Gérard Couturier (Veolia) et Jean-Marie d’Aspe, respectivement président et directeur général. "Je souhaite bon vent à la nouvelle SNCM. Elle est bien armée pour conquérir des parts de marché et répondre aux attentes de ses clients." Des vœux que Watler Butler et Stéphane Richard, le duo d’actionnaires majoritaires, reprenaient à leurs comptes. "Notre volonté est de restaurer une véritable autorité de management", déclarait le premier tandis que le second exprimait sa volonté "que la gouvernance de la SNCM soit exemplaire avec la mise en place de comités chargés d’auditer ou de réfléchir sur la stratégie de l’entreprise". Le pari débute bien: les réservations ont progressé de 30 %.
Moins enthousiastes, les réactions des représentants des salariés montraient un réalisme de bon aloi en préférant regarder un futur… qui commencera aussi par le départ de 400 des 2 236 salariés de l’entreprise.