CMN: la déclaration d’indépendance

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Avec ses trois navires mixtes (Girolata, Kallisté et Scandola) et 460 salariés, la Compagnie Méridionale de Navigation (CMN) est le poids plume de la desserte de la Corse. À partir de sa base marseillaise, la “Méridionale” fait pourtant mieux que résister. L’outsider a toujours su tirer son épingle du jeu face à son puissant “allié” public, la SNCM. Là où la compagnie publique recule (passagers et fret) en part de marché face aux coups de boutoir donnés par la Corsica Ferries au départ de Nice et Toulon, la CMN conforte tranquillement ses positions. En tonnage fret par exemple, elle a encore gagné 3, 9 % l’année dernière (et non perdu comme une coquille dans le rapport de l’Observatoire régional des transports de Corse nous l’a fait écrire. N.D.L.R.).

Des amis de 30 ans

Aujourd’hui, il se fait grand cas de la volonté d’indépendance de l’armement présidé par Robert de Lambilly, ex cadre supérieur de la CGM publique. La tension ne cesse d’augmenter entre les amis de 30 ans: CMN et SNCM font, en effet, alliance depuis 1976 dans le cadre de la concession de continuité territoriale. Pour comprendre ce qu’il se passe, il faut remonter au pacte d’actionnaires conclu le 7 juillet 1992 entre la SNCM et la Compagnie de navigation d’Orbigny devenue depuis lors STM d’Orbigny, filiale maritime du groupe STEF-TFE. Il était établi à l’occasion du désengagement de la CGM et du retrait progressif du groupe familial Rousset/Rastit fondateur de la CMN (retrait achevé en juin 2005). Actuellement, la STIM d’Orbigny détiendrait 55 % du capital de la Compagnie Méridionale de Participations (CMP) qui contrôle elle-même 53,51 % du capital de la CMN. La SNCM disposerait, via sa filiale CGTH, de 45 % de la CMP et de 45 % de la CMN en direct. C’est parallèlement à ce pacte, que l’accord commercial lie les deux compagnies marseillaises dans l’offre et l’exploitation de la desserte de la Corse au départ de Marseille.

STEF-TFE veut racheter les parts de la SNCM

Avec la privatisation de la SNCM, les dirigeants de la CMN, c’est-à-dire au premier plan le groupe STEF-TFE, considèrent que le pacte d’actionnaires devient caduc. Dans un communiqué de presse en forme de démenti à la rumeur, Robert de Lambilly rappelle en substance que “STEF-TFE a toujours affiché sa volonté d’acquérir la totalité du capital” et encore plus depuis le processus de privatisation engagé à la SNCM. Il précise par ailleurs que “cela ne remet nullement en cause la coopération commerciale qui se poursuit entre les deux armements”, ni pour un futur “partenariat technique équilibré et efficace entre les deux armements dans le seul intérêt de la desserte maritime de la Corse”. C’est le dernier point qui demeure le moins clair. Aucune discussion n’aurait à ce jour commencé. Et si on prête des liens entre un des repreneurs de la SNCM, le fonds d’investissement Buttler et STEF-TFE, la concurrence serait plutôt frontale avec l’autre repreneur, Veolia Transport. Distillées ou subies (la CMN pratique volontiers l’omerta dans sa communication), des rumeurs insistantes font état d’une possible association directe ou indirecte avec la Corsica Ferries afin de concurrencer la SNCM.

Des parts jugés “stratégiques

À l’évidence, l’État, comme les repreneurs privés de la SNCM, ne veut pas entendre parler de vente des parts détenues dans la CMN, même si cette vente venait alléger le concours financier de la privatisation. Rappelons que la direction publique de la SNCM comme les représentants des salariés considèrent depuis toujours cette participation comme “stratégique”. Interrogé dernièrement sur France 3, le ministre des Transports Dominique Perben a ainsi indiqué que le pacte d’actionnaires qui lie la CMN à la SNCM “ne peut pas être défait de cette façon” (par la séparation, N.D.L.R.). “Il faut maintenant que grâce à la recapitalisation qui est envisagée, la SNCM puisse reprendre toute sa place dans le transport maritime, on y a suffisamment travaillé les uns et les autres pour que quand l’aboutissement est en vue on ne le remette pas en question.” La position du groupe Veolia Transport, pilote industriel de la privatisation, est encore plus claire. “Dans notre projet de reprise, ce partenariat (CMN/SNCM, N.D.L.R.) est un point important du dispositif. S’il n’existe plus, cela pose un vrai problème”, a déclaré Gérard Couturier, directeur régional de Veolia et futur président du directoire de la SNCM, dans le quotidien économique Les Échos.

La diagonale du fou tentée par la CMN pourrait se révéler un coup décisif dans la partie d’échec maritime qui se joue actuellement autour de la desserte de la Corse.

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