Mise en garde du fondateur d’Evergreen

Article réservé aux abonnés

À 78 ans, Yung-Fa Chang, fondateur et président (chairman) d’Evergreen a tenu une conférence de presse exceptionnelle à Londres le 22 février dernier en forme de mise en garde contre l’utilisation des très gros porte-conteneurs, de plus de 9 000 EVP; navires mis en flotte par Mærsk ou CMA CGM (Financial Times et Lloyd’s Listdu 23/12). Ces compagnies "prennent un gros risque"; M. Chang n’excluant pas des dépôts de bilan compte tenu du climat d’incertitude économique et politique. "Grand ne signifie pas meilleur". "Les grands navires sont efficaces uniquement lorsqu’il y a un boom économique. Mais que deviennent-ils durant les récessions?" s’interrogeait le président, soulignant que le coût au slot n’a aucun sens lorsque le navire est à moitié vide.

Après le désastre financier des années 70 qui avait suivi la livraison des pétroliers géants, M. Chang s’attend à celui des porte-conteneurs géants.

Soucieuse de respecter le principe de réalité, Evergreen refuse à la fois les très gros porte-conteneurs (comme jadis les dirigeants de CMA CGM; N.D.L.R. JMM), les navires d’occasion et les OPA d’autres grandes compagnies maritimes. Le fondateur d’Evergreen n’est pas non plus préoccupé par la baisse de sa part de marché, exprimée en capacité de transport.

Rappelons qu’en quelques mois, c’est la 3e mise en garde contre une sorte de folie des grandeurs: en novembre dernier, le président d’OOCL invitait ses homologues à faire l’économie d’une "concurrence destructive" (JMM du 11-11-2005, p. 13); en décembre, le président de CMA CGM les invitait à ne pas céder à la panique (JMM du 23-12-2005, p. 4).

"L’ORAGE EST LÀ"

Tel est le titre de la lettre de Morgan Stanley Equity Research Asie/Pacifique (MSER) du 14 février. "La baisse significative des taux de fret sur les principales routes Est/Ouest depuis le 4e trimestre, en particulier vers ou depuis l’Europe laisse penser que la tendance baissière longtemps attendue par l’industrie, est arrivée" lit-on avec intérêt. Cela est d’autant plus surprenant que sur le transpacifique, Eastbound qui représente près de 60 % du marché mondial Est/Ouest, la demande de transport du 4e trimestre 2005 était en croissance de plus de 14 % par rapport à la même période en 2004, soit presque 3,180 MEVP.

En se basant sur des taux de fret spot, hors surcharges, fournis par des commissionnaires de transport chinois, les économistes de Morgan Stanley estiment qu’en janvier 2006, les taux ont chuté de près de 40 % de ou vers l’Europe et de 10 % pour le transpacifique. Même en ajoutant $ 120/EVP de surcharge combustible, les taux Europe/Asie ont chuté en douze mois de 25 à 30 %.

Même s’il est encore trop tôt pour se prononcer, MSER n’exclut pas que les taux Asie/Europe retrouvent les niveaux de 2001-2002 d’ici un à deux ans. Il rappelle qu’entre le 1er trimestre 2002 et le 3e trimestre 2005, la moyenne des taux de fret sur les marchés Asie/Europe; transatlantique et transpacifique a augmenté respectivement de 56 %; 35 % et 25 % (c’est dire si cela a peu d’importance sur la demande de transport conteneurisé; N.D.L.R. JMM).

Les deux causes principales au possible désastre à venir sont:

• le déséquilibre de l’offre sur une demande, même toujours croissante;

• et le comportement erratique des très grosses compagnies; le comportement de Mærsk après le rachat de Sea-Land risquant de se reproduire après celui de P & O Nedlloyd.

En outre, fonctionnant en dehors de toute grosse alliance, MSC et CMA CGM bénéficient d’une très grande liberté sans contrainte.

C’est sur le marché Asie/Europe que les économistes du MSER s’attendent au pire: une chute annuelle moyenne de 15 % en 2006 et 2007. Sur le transpacifique et le transatlantique, les baisses pourraient être comprises entre 0 et 6 % en 2006 et 5 % en 2007.

De source "chargeur français anonyme", il est probable que la réunion armatoriale de Singapour à la mi-janvier (JMM du 20-1-2005, p. 4) se soit conclue sur une décision de gel de capacité qu’aucun transporteur n’ose annoncer. Pour faire passer discrètement la pilule, certains transporteurs seraient tentés de cacher la capacité réelle de leurs porte-conteneurs en construction. Ainsi lorsque le chantier d’Odense livre le Gerd-Mærsk (le Gjertrud- ou le Gunvor-) le 5e d’une série de porte-conteneurs, la compagnie précise… la puissance du moteur, le nombre de cylindres et le nombre de motoristes, sans oublier l’identité de la marraine. Longueur, largeur, tirant d’eau et autre détail technique élémentaire sont superflus.

Bref, le dialogue chargeurs-armateurs de ligne est comme souvent, de haute tenue.

Shipping

Shipping

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15