La Corsica Ferries pose une option sur Marseille

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La reprise de la SNCM par "une société du CAC 40", comprenez Veolia, ne trouble pas la stratégie de la Corsica Ferries. Conformément à sa trajectoire initiée par l’ouverture à la concurrence du cabotage par la Communauté européenne, l’armement bastiais pousse l’avantage. Après avoir abordé Nice en 1996, s’être ancré à Toulon en 2000, il posera sa candidature pour la délégation de service public au départ de Marseille à partir de 2007. L’annonce à la presse de Pierre Mattéi, son directeur général, alors qu’il était à Toulon, a fait grand bruit.

En 2002, sa flotte n’avait pas l’envergure suffisante pour s’aligner sur la métropole phocéenne. Conséquence, aucun dossier n’avait été déposé par la compagnie pour décrocher le contrat de délégation de service public. Depuis, forte du volume et des cadences apportées par l’expérience toulonnaise où les Megas Express ont fait merveille, cette desserte ne lui fait pas peur. "Si les conditions sont les mêmes, nos nous alignerons. Ne serait-ce pour ne pas laisser le champ libre à nos concurrents."

Pour ceux qui douteraient encore de la sincérité de son annonce, le directeur de la Corsica Ferries précise que, grâce à la garantie obtenue des banques, jusqu’à trois navires pourraient être rapidement acquis selon les besoins. "Nous pouvons nous doter en quelques mois de ro-ro. Neuf ou d’occasion, il s’agit de navires standard facile à trouver sur le marché." Le positionnement sur Marseille ne manquera pas de s’accompagner d’un redéploiement de la flotte entre Nice et Toulon, et sans doute d’Italie. Mais même avec des nouvelles acquisitions, le pavillon jaune aura certainement besoin d’un partenaire.

VERS UN RETOURNEMENT D’ALLIANCE?

La CMN qui a toujours fait alliance avec la SNCM, continuerait-elle à figurer sur le bord opposé? Peut-on s’attendre à un retournement d’alliance? Questionné, Pierre Mattéi affiche un sourire et préfère évoquer les très bonnes relations qu’entretiennent les présidents des deux compagnies. Prudent, il concède juste que la CMN semble avoir des velléités d’indépendance et que la compagnie marseillaise présidée par Robert de Lambilly pourrait "y aller toute seule". Ce qui ne manquerait pas de provoquer un énorme remous à Marseille.

Évoquant "le repreneur du CAC 40" de la SNCM, Pierre Mattéi rappelle en riant un dicton italien: "Tu as voulu la bicyclette, pédales maintenant". Puis plus sérieusement, il se défend de tenter de prendre à la gorge les repreneurs. "Je n’aime pas qu’on fasse appel à des termes militaires", corrige-t-il lorsqu’on lui parle de bataille navale.

Pourtant, c’est moins le fret que le bras de fer avec son concurrent qui semble appeler la Corsica à Marseille. "Ce qui nous intéresse, ce sont les passagers. Le fret est attaché à Marseille et à la continuité: ce port dispose des entreprises, des hangars et d’un savoir-faire difficilement exportables." Toulon qui aurait traité 15 % du fret sur la Corse à la faveur de plusieurs semaines de paralysie de la SNCM, a atteint le summum de ses possibilités.

LES OSP SUR MARSEILLE: UNE ABERRATION ÉCONOMIQUE

Pour le reste, le directeur de la Corsica Ferries campe sur les mêmes positions de principe. Mis en place dans le cadre de l’appel d’offres de 2002, le service complémentaire au départ de Marseille est, pour lui, "une aberration économique". D’après ses calculs, avec les obligations de service public (OSP), la subvention par passager serait de l’ordre de 120 € au départ de Marseille et de 10 € par Toulon et Nice.

Partisan "d’une subvention par passager et par tonne transportés", le directeur de la Corsica Ferries pense que son point de vue ne sera pas retenu par l’Assemblée corse. "On ne peut pas préjuger de la loyauté de l’appel d’offres, mais nous serons vigilants sur la transparence et l’impartialité de la mise en concurrence."

En attendant le dénouement du prochain appel d’offres de continuité à la fin de l’année, Pierre Mattéi se dit très confiant pour 2006.

"La tendance positive ne peut que se confirmer. Nous accroîtrons notre offre 220 000 places entre Nice et Toulon."

Pascal Lota sibyllin

Pascal P. Lota, le président de la Corsica Ferries a confirmé sa réputation d’homme discret. Lors de la cérémonie qui célébrait le titre de 1er port de desserte de la Corse de Toulon à bord du Mega-Express, son allocution a été sibylline. Après avoir évoqué les liens historiques entre la capitale varoise et l’île de beauté, il a rejeté "les chausses trappes, les obstacles placés sous nos pieds par des intérêts particuliers et corporatistes".

Le PAM aura la mémoire longue

Si, gestionnaire du port, la CCI du Var fait équipe avec la Corsica Ferries. Il en sera autrement avec le PAM. Questionné sur un possible positionnement de l’armateur bastiais à partir de Marseille, le président Christian Garin répond qu’aucune approche particulière n’a été faite. "Ils seront les bienvenues. Mais nous saurons nous souvenir qu’il y a des armateurs qui ont toujours été présents à Marseille, même lorsque tout allait mal. Nous ne les oublierons pas."

Le port de Toulon au summum

Le titre était inespéré. En 1999, le port de Toulon était au plus bas avec 6 % des passagers sur la desserte corse. Aujourd’hui il arrache à Marseille le titre de 1er port passagers sur la Corse avec 34 % de parts de marché. Grâce au miracle de la Corsica Ferries et de ses Mega Express. Grâce aussi à plusieurs semaines de paralysie de la SNCM. Sur la desserte Corse, Marseille aurait perdu 136 000 passagers à cause des grèves. Toulon peut-il encore améliorer son score historique? En toute hypothèse, la limite se situerait dans le trafic automobile que peut supporter son centre ville. Un seuil que les représentants de la CCI établissent à 1,3 millions de passagers, soit une marge de 300 000 passagers par rapport à 2005.

La Corsica Ferries en fiche

• Flotte: un total de 11 unités qui se répartissent comme suit: 4 unités dont 2 Mega Express, 1 NGV et 1 ferry, alignées sur les lignes entre le continent français et la Corse. 7 unités dont 1 Mega Express, 2 NGV, 2 cruise-ferries et 2 ferries sur les lignes entre l’Italie et la Corse et la Sardaigne.

• Personnel: 1 300 salariés dont 300 sédentaires en Corse, la plupart sur Bastia. Parmi ses 950 navigants, 30 seulement sont de nationalité française. Battant pavillon italien, les équipages sont essentiellement transalpins exceptés sur les lignes Italie/Corse où la part des extra-communautaires est de 30-35 %.

• Passagers: en 2005, la barre des 2 millions de passagers a été franchie: 2 012 085 précisément (France et Italie) dont 1 320 959 sont passés par Nice et Toulon.

• Management: "Un bon armement pour la Corse, c’est celui qui amène le plus de passagers dans les meilleures conditions de prix et de service". Comment expliquer le succès de la stratégie de Corsica Ferries? "Nous travaillons sur des modèles de réactivité. Nous savons nous adapter aux circonstances et aux réalités."

• Chiffre d’affaires: en 2005, la Corsica Ferries devrait doubler ses bénéfices (ils étaient de 3 M€ en 2004). Le groupe maritime CF représenterait une activité de l’ordre de 172 M€.

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