La Cour suprême indienne doit se prononcer le 13 février sur l’autorisation d’accès de l’ex-porte-avions français Clemenceau en Inde.
À cette date, le bâtiment désarmé, dont le remorquage est assuré par la société Ship Decomissionning Industies (SDI), se sera beaucoup rapproché des eaux territoriales indiennes. Parti de Toulon le 31 décembre 2005, il effectue en effet un voyage deux mois pour rejoindre le chantier de démolition d’Alang (JMM 6-1-2006, p. 18). Il a franchi le canal de Suez le 23 janvier après avoir reçu, la veille à 23 h, l’autorisation annoncée le 15 janvier par le ministère égyptien de l’Environnement.
En France, la démolition à l’étranger du Clemenceau fait l’objet d’une polémique politico-judiciaire.
Interrogée à l’Assemblée nationale le 17 janvier lors des questions au gouvernement, la ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie a rappelé que "la Marine est, en effet, le premier armateur au monde qui a décidé de procéder à un désamiantage préalable en France. La Marine est aussi le premier armateur qui a veillé à choisir un chantier de qualité pour procéder au démantèlement et en se faisant accompagner par la société française qui avait suivi les travaux faits à Toulon. Au total en 2002 grâce aux plans du navire, la Marine a pu estimer que la quantité restante d’amiante était de 220 t. Après une étude préalable et plus précise, il est apparu que la cheminée contenait, en fait, non pas de l’amiante mais des plaques de fibre de verre. Ce qui veut dire qu’il restait en réalité 160 t d’amiante. 115 t ont été retirées à Toulon, comme le prouvent les procès-verbaux d’enfouissement. Il reste donc 45 t. Malgré tout cela, certains et notamment quelques associations ont contesté les différentes décisions et les différentes procédures à différents niveaux. Tous les recours qui ont été intentés ont été systématiquement rejetés par la justice".
L’amiante restant n’a pas été retiré, afin que le Clemenceau tienne la mer pendant son dernier voyage. "Le désamiantage résiduel sera effectué sous l’encadrement de SDI, qui se fixe pour objectif de garantir le respect de la réglementation européenne en matière de sécurité des travailleurs, d’hygiène et de protection de l’environnement", avait précisé le porte-parole du ministère de la Défense Jean-François Bureau dès le 5 janvier. D’après l’état-major de la Marine, le bâtiment ne contient ni hydrocarbures, ni PCB (polychlorobiphényls), ni un quelconque agent polluant.
En outre, Mme Alliot-Marie a indiqué que tous les renseignements demandés par les autorités égyptiennes ont été fournis. Le porte-avions avait été bloqué pendant une semaine au large de Port-Saïd.
De même, la Cour suprême indienne a reçu tous les renseignements qu’elle voulait, a précisé la ministre. Le 6 janvier, une commission de la Cour suprême avait en effet recommandé d’interdire au Clemenceau l’accès au territoire indien, faute d’informations nécessaires sur les matériaux toxiques transportés.
Selon l’agence Reuters, 90 % des démolitions de navires dans le monde sont effectuées dans cinq pays: Inde, Pakistan, Bangladesh, Chine et Turquie.
PROCÉDURES JUDICIAIRES
Le 6 janvier, Greenpeace, le Comité anti-amiante Jussieu et l’Association nationale de défense des victimes de l’amiante (Andeva) ont saisi le Conseil d’État, en vue d’annuler une décision du tribunal administratif de Paris du 30 décembre qui avait permis le départ du Clemenceau.
De son côté, le ministère de la Défense a décidé le 19 janvier de saisir le président du tribunal de grande instance de Versailles d’une tierce opposition à l’encontre de l’ordonnance rendue le 11 janvier 2006 à la demande de ces quatre associations. Celles-ci, souligne le ministère dans un communiqué "ont sciemment induit le tribunal de Versailles en erreur en masquant de nombreux éléments du dossier".
D’autre part, le tribunal de grande instance de Paris a rejeté le 10 janvier une précédente procédure en référé, lancée le 27 octobre 2005 et réitérée le 2 janvier à l’encontre de l’État et de SDI, par la société Technopure qui a participé au désamiantage (70 t) du Clemenceau.