Depuis vingt ans, le trafic du port de Marseille est au taquet. Depuis vingt ans, il flirte avec la barre des 95 Mt après avoir atteint et même dépassé celle des 100 Mt dans les années 70-80. L’année 2005 n’aura pas dérogé à la règle. Avec un volume global estimé de 96,6 Mt, il se montre supérieur de 2,7 % par rapport à 2004 qui avait lui-même enregistré une baisse de 1,6 % par rapport à 2003. L’histoire récente de l’activité de Marseille-Fos ressemble aux marées de Méditerranée, dont il reste le premier port en tonnage, d’une imperceptible amplitude.
Le gain de 2,5 Mt a été apporté par les hydrocarbures (+ 4,1 % et 62,6 Mt) et plus particulièrement le gaz (+ 12 %). Il faut noter le dynamisme des raffinés et du GNL (+ 47 %) qui retrouve son niveau d’avant l’accident de l’unité de Skikda (Algérie) début 2004, et la hausse de plus de 11 % du GPL qui enregistre un record historique. Seul le brut stagne à 45 Mt. Le secteur des hydrocarbures vit au rythme des échanges mondiaux et semble faire fi des mouvements sociaux. N’a-t-on pas vu le débit du robinet pétrolier grossir en plein conflit du PAM fin septembre-début octobre? Si Marseille-Fos se montre difficilement évitable pour l’approvisionnement en pétrole et gaz, ce qui le fait baptiser par la direction du PAM de "port majeur dans le domaine de l’énergie", ce n’est malheureusement pas le cas de son trafic conteneurs et de marchandises diverses.
CONTENEURS: MARSEILLE PERD ENCORE DU TERRAIN
Le secteur des diverses baisse de 2,2 % (15,5 Mt). Affaibli par la fragilité des trafics de fruits et légumes, le conventionnel perd 5 % par rapport à 2004 (2,9 Mt) tandis que le roulant est en retrait de 1 % (3,7 Mt).
Quant aux conteneurs, ils perdent 1 % en EVP (916 000 EVP) et 2 % en tonnage (8,84 Mt). Une fois de plus, Marseille-Fos a raté son pari de devenir millionnaire en conteneurs. Un objectif qu’il se fixe en vain depuis dix ans. La progression de 9 % enregistrée en 2004 n’aura donc pas été poursuivie.
Pire, un nouveau et important retard est marqué par rapport à ses concurrents portuaires directs. Certes, le niveau aurait pu se révéler meilleur sans le conflit (PAM, SNCM) qui a paralysé les terminaux pendant 15 jours et vu le limogeage du directeur général du PAM. Mais la gestion des relations sociales ne fait-elle pas partie prenante du management de tous les ports? De plus, le fléchissement sur ce secteur était déjà perceptible avant le conflit. Les statisticiens du PAM indiquent ainsi que le terminal conteneurs de Marseille qui a chuté de 8 % (301 000 EVP), a semblé souffrir de la faiblesse des échanges avec le Maghreb. Ce recul n’a pu être compensé par la très légère progression de 3 % (607 000 EVP) du terminal Fos. Plus que jamais le projet de Fos 2XL avec l’investissement de CMA CGM et de MSC paraît le seul susceptible d’arracher le port phocéen à la seconde division du conteneur.
STABILITÉ POUR LES VRACS ET LES PASSAGERS
Les autres trafics ne détonnent pas. Les vracs solides affichent un progrès de 2,7 % avec 15,3 Mt dû à la bonne tenue des importations de minerais sur le terminal sidérurgique (+ 3 %) et à la progression de 21 % des vracs alimentaires. Avec 3.1 Mt, les vracs liquides restent stables. L’activité passagers a également souffert des mouvements sociaux avec la perte de 50 000 passagers de lignes régulières sur le Maghreb et la Corse. Avec 1,8 million de voyageurs, ce secteur baisse légèrement (− 2 %) par rapport à 2004. Côté croisière, le détournement d’une vingtaine d’escales en octobre a limité la progression de l’activité à + 3 %.
RÉSULTAT POSITIF POUR LE PAM
Le phénomène devient récurrent. Selon les premières estimations, l’évolution du tonnage de Marseille-Fos se montre inférieure à celle du chiffre d’affaires net du PAM. Ce dernier devrait s’établir à 174 M€ soit une progression de l’ordre de 5 % par rapport à 2004. La direction de l’établissement public confirme un résultat positif sous "l’effet du dynamisme des trafics d’hydrocarbures compensant le ralentissement des autres secteurs et de la maîtrise de l’évolution des charges". Du déjà entendu.
Marseille
• Réservé par les dockers CGT, un train spécial de 650 places était au départ de Marseille le 16 janvier pour rejoindre, devant le Parlement européen de Strasbourg, la manifestation contre la directive européenne "d’auto-assistance" (lire en pages 6-7). La CGT du PAM a appelé à soutenir le mouvement des dockers. Conséquence, l’activité du port de Marseille a été paralysée et les navires bloqués à quai pendant deux jours.
• Le groupe SEB, un des leaders du petit électroménager et de la cocotte-minute, fait passer 70 % de ses flux (parmi lesquels 8 000 EVP) par le port de Marseille. Le fer et fleuve représentent par ailleurs plus des trois quarts de ses pré et post acheminements.
• De son navire câblier René-Descartes en escale à Marseille, France Télécom a présenté la dernière réalisation à laquelle il a participé au sein d’un consortium international: un réseau optique sous-marin de 19 000 km reliant la Méditerranée à Singapour, dénommé "Sea-Me-We-4".
• Non lieu dans l’affaire Goubert: il n’existe toujours pas de piste éclairant la disparition d’Edmond Goubert, directeur de manutention au passé sulfureux mystérieusement disparu le 11 janvier 2002 à Marseille. Mais l’affaire, déclenchée à travers des écoutes téléphoniques dans le cadre d’une enquête et impliquant le directeur de cabinet du maire de Marseille pour "trafic d’influence" et "corruption active et passive", devrait se traduire par un non-lieu à la demande du Parquet de Marseille. On se souvient que lors d’une conversation téléphonique enregistrée, ce dernier s’était déclaré le "débiteur" d’Edmond Goubert.