Le 5 janvier, le groupe Bolloré faisait savoir officiellement que "quinze ans après l’acquisition de Delmas Vieljeux", la cession à CMA CGM "des navires, des conteneurs en propriété ainsi que les fonds de commerce représentés par la compagnie et ses filiales" venait d’être "finalisée".
Au cas où cela aurait échappé à quelqu’un, le groupe Bolloré rappelle que l’accord de cession prévoit que "tous les navires du groupe CMA CGM et de Delmas vont désormais être opérés en manutention par le groupe Bolloré, dans le cadre d’un contrat long terme et sur une base exclusive, dans tous les ports du continent africain où le groupe Bolloré est implanté".
Autre rappel unilatéral, le prix que plusieurs observateurs jugent très élevé: "les actifs maritimes du groupe Bolloré, objets de la cession, ont été valorisés à près de US $ 600 millions. Le prix de vente de la société Delmas dans laquelle ont été regroupés ces actifs et compte tenu de l’endettement y afférent s’élève à US $ 345 millions. Une partie importante de la réévaluation des navires du groupe par rapport à leur valeur d’acquisition a été intégrée directement dans les capitaux propres du groupe conformément aux normes IFRS. La plus-value comptable dégagée en 2006 à la suite de cette opération est estimée à $ 78 millions, le reste de la plus-value escomptée est intégrée dans les résultats de fin 2005. Le désendettement est d’environ $ 490 millions".
L’euphorie aidant, on n’hésite pas à affirmer que "par cette cession, Bolloré permet au groupe français CMA CGM de devenir le no 3 mondial". "Le groupe Bolloré qui était de taille modeste dans le transport maritime (23e) peut se concentrer sur le transport terrestre où il occupe des positions fortes […]".
La communication est un art délicat: il y a quinze ans, que représentait la CMA?
Souvenir: lors de sa première conférence de presse, en 1994, Jacques Saadé (alors facilement approchable) soulignait avec fierté que sa compagnie venait de faire son entrée dans le Top 20 du mensuel Containerisation International (JMM du 18-11-1994-1-). Sa flotte comptait alors 23 navires essentiellement affrétés aux bons voisins allemands, exploités sur 5 lignes maritimes. Trois cents salariés occupaient le 4, quai d’Arenc.
En clair, avec du talent et de la volonté (et un peu de chance), il devait être possible en quinze ans, de devenir autre chose qu’un "niche player".
1) Cette conférence de presse fut l’occasion de dresser le bilan des 16 premières années de feu la Compagnie maritime d’armement, créée en 1978 par M. Rousset, p.-d.g. de la Compagnie méridionale de navigation (JMM du 13-10-1988: p. 2728). Son "bloody agent" à Beyrouth et à Lattaquié était le groupe Rodolphe Saadé. Compte tenu des réalités libanaises d’alors, Jacques Saadé décidait de s’installer à Marseille, rachetait la part de la CMN dans la CMA et modifiait la raison sociale de cette dernière en Compagnie Maritime d’Affrètement. Ce “fait historique“ semble subir une réécriture, actuellement.
Delmas cession finalisée: version soft
"CMA CGM a finalisé, comme prévu, en ce début d’année 2006, l’acquisition du groupe maritime français Delmas et devient ainsi le numéro 3 du secteur.
Delmas est traditionnellement spécialisé dans les liaisons maritimes avec l’Afrique. Son acquisition complète les services Nord/Sud de CMA CGM sur une zone où le groupe était encore peu présent.
Alain Wils, nouveau président de Delmas, déclare: « Avec l’appui de ses filiales, principalement ANL, MacAndrews et Delmas, le groupe CMA CGM offre désormais à ses clients la couverture géographique mondiale nécessaire à la distribution de leurs produits. »
La gestion de Delmas restera centralisée au Havre tout en bénéficiant des synergies que le Groupe CMA CGM lui apportera principalement dans le domaine de la logistique conteneurs, des achats et du service à la clientèle".