Une réponse aux accusations, plurielles, chroniques, parfois exagérées, largement médiatisées, s’est longuement fait attendre. Cela fait des mois, qui se comptent désormais en années, que les paquebots (520 escales attendues en 2019) sont dans l’œil du cyclone sociétal à Marseille pour ses émissions chargées d’oxydes de soufre, d’azote et surtout de particules fines. Le sujet est explosif du fait de l’extraordinaire ascension de son port parmi les terminaux de croisière millionnaires, au 4e rang méditerranéen avec 1,78 million de croisiéristes. Ces dernières semaines, les responsables ont retrouvé de la voix. Le 28 juin, la direction portuaire annonçait un plan d’investissement de 20 M€ pour généraliser l’alimentation électrique à quai aux navires passagers à l’horizon 2023-2025. Ce que ne lui impose pas la réglementation, peu contraignante sur ce sujet, la Méditerranée ne faisant pas encore l’objet d’une zone d’émissions contrôlées (Eca). Début septembre, profitant de la visite de la ministre de la Transition écologique Élisabeth Borne et du nouveau secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari, le président de région Renaud Muselier lançait son plan « Escales Zéro fumée », avec 30 M€ destinés à accompagner les ports de sa région et les armateurs dans la transition énergétique.
Nouvelle étape. Les annonces faites le 17 octobre ne tiennent pas tant au caractère inédit des solutions avancées (elles existent ici et là, notamment en Californie, parce qu’une législation les a précédées) mais à la « simultanéité de quatre mesures auxquelles souscrivent MSC, Costa, RCCL et Ponant, représentant 83 % des escales et 95 % des passagers dans les bassins du port de Marseille alors qu’aucune législation internationale, européenne ou même nationale ne les y contraint », insiste Jean-François Suhas, le président du Club de la croisière, qui n’a jamais démérité pour faire de la pédagogie sur le sujet. Les quatre signataires de la dite « charte bleue » s’engagent en premier lieu à recourir au branchement électrique à quai que le port rendra accessible progressivement (deux paquebots en simultanée dès 2024). Pour ce faire, Enedis a créé deux nouveaux points de livraison de 20 000 volts d’une puissance unitaire de 15 MW. « Au total, le port sera alimenté par 5 points d’alimentation cumulant une puissance de 55 MW (contre 10 MW actuellement) », indique le représentant de la filiale d’EDF, qui a investi 1 million des 2,4 M€ nécessaires (le solde à la charge du port). Les quatre s’obligent aussi, dès la prise en charge par le pilotage à l’entrée du port, à basculer sur un carburant à faible teneur en soufre (en l’occurrence, ils y sont contraints). Ils limiteront également la vitesse à 10 nœuds dans la zone pilotée, mesure expérimentée en pleine torpeur estivale. MSC Cruises avait même à ce moment-là basculé sur du 0,1 %. Enfin, les armateurs privilégieront la programmation à Marseille d’escales de navires alimentés au GNL, qui, dès 2020, devraient représenter 15 % des escales et 22 % des passagers, est-il annoncé. Jean-François Suhas a œuvré pendant quatre ans pour monter cet événement, dont il ne voulait pas faire un « sommet » d’auto « quelque chose ». Il faut lui reconnaître d’avoir réussi la performance de dresser, en un seul jour, un état de l’art des technologies, contraintes, verrous… pour tendre vers une flotte zéro émission. Le visiteur professionnel sera sorti d’EuropaCorp, nouveau complexe ciné planté dans un lieu chargé de l’histoire portuaire où se profile la nouvelle silhouette urbaine de la cité phocéenne, avec une vision assez précise. Autre gageure : des organismes de réglementation aux fournisseurs et distributeurs d’énergie, en passant par les motoristes, équipementiers, armateurs, constructeurs, pas un « corps intermédiaire » ne manquait à l’appel et ils étaient quasiment tous représentés par leurs plus hauts représentants… A également été aperçu Saïd Ahamada, député LREM des Bouches-du-Rhône, qui défend notamment la réduction de la taxe intérieure TICFE pour les navires branchés à quai et un suramortissement fiscal pour les navires « verts ».
260
Selon les projections d’Alphaliner, les porte-conteneurs équipés de scrubbers devraient atteindre les 260 unités (2,3 MEVP) au 1er janvier 2020. Soit près de 10 % de la capacité conteneurisée et 4 % des navires en unités. Le 15 octobre, ils étaient 143 totalisant 1,14 MEVP.