Il y a quelques jours, l'administrateur du canal de Panama, Ricaurte Vásquez Morales, indiquait devant un parterre réuni à l'occasion du New York Maritime Forum que l’exercice fiscal (octobre 2023-septembre 2024) s’était caractérisé par la perte d’un tiers de son trafic en raison des conditions météorologiques. Moins de 10 000 (9 944 dont 2 856 néo-panamax et 7 088 panamax) passages ont transité par la voie navigable pour un volume de 423 Mt contre 511 Mt pour l’exercice précédent.
Le déficit hydrique – le principal ennemi de l'infrastructure –, que le réchauffement climatique a exacerbé ces dernières années (évaporation plus marquée des deux lacs artificiels qui fournissent en eau le système de ses écluses), a été de surcroît aggravé en 2023-2024 par le phénomène de sécheresse intense El Niño, qui se produit tous les sept ans.
Durant la saison sèche (jusqu’en avril-mai), les autorités ont été contraintes de réduire la jauge des passages à plusieurs reprises. Ce n’est que depuis le 1er juin que le gestionnaire s’autorise à lever progressivement les barrières. En septembre, il était enfin revenu à son niveau de fonctionnement quasi normal, soit 36 transits quotidiens contre 24 en janvier. L’augmentation des précipitations a permis de ramener les réservoirs des deux lacs Gatùn et Alajuela à leur niveau optimal et de porter le tirant d’eau aux 50 pieds habituels (15,24 m).
La situation s’est normalisée mais le trafic a été sanctionné.
3,45 Md$ de bénéfices
Pour autant, ses résultats financiers ne sont pas à l’avenant. Le résultat net du canal de Panama a atteint 3,45 Md$ (+ 300 M$ par rapport à l'exercice précédent). La réduction de 5 % des coûts opérationnels a permis d'atténuer l'effet financier de la sécheresse. Les recettes ont augmenté de 18 M$ pour atteindre 4,99 Md$, selon des chiffres préliminaires. « Les transits se rétablissent lentement », a déclaré au cours d’un point avec la presse Victor Vial, vice-président des finances de l'autorité, reconnaissant toutefois ne pas être en mesure de garantir les 36 créneaux de passage chaque jour.
Familier des incitations commerciales pour faire revenir le chaland, le canal offre actuellement des ristournes à certains de ses « clients », notamment les vraquiers et les méthaniers, qui ont déserté l’infrastructure alors que les porte-conteneurs sont restés fidèles.
8,5 Md$ pour lutter contre le manque d'eau
Pour « assurer la durabilité du canal à l'avenir » et « faire face aux événements climatiques extrêmes », en complément des stratégies de conservation qui ont permis de réduire de 12 % la consommation d'eau pour chaque passage au cours de l'année fiscale, les autorités avancent 8,5 Md$ de projets pour les sept prochaines années. Le Panama devrait commencer par consacrer 1,6 Md$ pour endiguer le fleuve Rio Indio mais la création du nouveau réservoir nécessiterait le déplacement de centaines de familles résidant près de la zone du canal.
L’État du Panama prévoit d'augmenter ses recettes de près de 20 % pour l’exercice 2025, gageant sur 5,62 Md$ et 12 582 (sic) passages, soit 520 Mt en volumes.
Adeline Descamps
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