En dépit de la surenchère tentée par le candidat éconduit CVC Capital, de l'opposition des syndicats de DB Schenker et du puissant syndicat allemand des services Ver.di, qui estime la casse sociale à 5 300 postes sur les 15 000 emplois, de la levée de boucliers politique, le conseil de surveillance de la Deutsche Bahn a approuvé le 2 octobre la vente de DB Schenker au danois DSV.
Perclus de dettes (34 Md€ pour un chiffre d'affaires de 57 Md€), l’opérateur historique du rail allemand, qui cherche à se concentrer sur la refonte de l'infrastructure ferroviaire nationale, a cédé sa très lucrative filiale de commission de transport (1,1 Md€ de bénéfice d'exploitation en 2023 bien qu'en baisse) et vache à lait du groupe (42 % de ses revenus en 2023) au prix de 14,3 Md€. L'opération représente la plus importante transaction pour le Danois qui a multiplié les prises depuis 2016 (UTi Worldwide pour 1,35 Md$, Panalpina pour 4,92 Md€, Global Integrated Logistics pour 4,2 Md€).
Le vote du conseil de surveillance a néanmoins été serré. Neuf voix se sont élevées pour contrer la vente. Dix se sont prononcées en faveur de la transaction et une s'est abstenue. Le syndicat des chemins de fer EVG avait déclaré que ses membres rejetteraient l'accord, notamment en raison des risques pour l'emploi et en dépit des engagements sociaux de DVS à l'égard des employés de Schenker en Allemagne. Le groupe danois a également fait un geste à l'intention des dirigeants politiques en promettant 1 Md$ dans le pays dans les trois à cinq prochaines années.
12,3 % de la valeur de son capital social
Dans la foulée de l'aval de la Deutsche Bahn, le groupe danois a annoncé le 4 octobre, par un communiqué boursier, avoir levé 4,99 Md€ via une émission de 26,4 millions d'actions nouvelles. La vente au prix de 1.410,5 couronnes danoises chacune (189,11 €) correspond à son cours de clôture à la bourse de Copenhague. Une augmentation de capital réalisée en quelques heures et sans décote. Faut-il que l'opération ait suscité une totale confiance de la part des investisseurs pour qu'elle ait pu permettre de lever l'équivalent de 12,4 % de la valeur du capital social actuel de DSV et 11 % après la réalisation de l'augmentation de capital.
Les acquéreurs sont des investisseurs institutionnels danois et internationaux (Blackrock, Office d'investissement du régime de pensions du Canada, Capital Group, Norges Bank Investment Management, BLS Capital Fondsmæglerselskab, ATP...).
Naissance d'un nouveau leader mondial
Le numéro trois de la commission de transport avait précédemment indiqué qu'il comptait financer l'achat du quatrième acteur mondial en combinant un financement par actions (d'environ 4 à 5 Md€), sans droits de préemption pour les actionnaires existants, et de la dette. L'entreprise a notamment obtenu des facilités de financement de BNP Paribas, Danske Bank, HSBC et Nordea pour la transaction.
DSV et DB Schenker devraient réaliser un chiffre d'affaires pro forma d'environ 39,3 Md€ sur la base des chiffres de 2023 (147 000 personnes dans plus de 90 pays) avec des fonds propres de 11 Md€. Ils se hissent à la première place mondiale actuellement occupée par Kuehne+Nagel en 2023.
La vente devrait être finalisée dans le courant de l'année 2025, une fois que toutes les autorisations réglementaires auront été reçues.
Adeline Descamps
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