Les transporteurs de produits pétroliers confrontés à des vents contraires

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Le transport maritime de pétrole et de produits pétroliers connait actuellement des rendements parmi les plus élevés depuis des décennies. Pour autant, en attendant la demande hivernale au quatrième trimestre, plusieurs facteurs tirent le marché dans des directions opposées.

Porte-conteneurs, tankers, mêmes symptômes : les deux secteurs connaissent actuellement des rendements parmi les plus élevés depuis des décennies. Mais comme pour la boîte, tout peut basculer en un battement d’aile. Car la situation est liée à des effets artificiels. Un assouplissement des sanctions envers la Russie, le rétablissement du passage de la mer Rouge, où les troubles font voyager le brut et les produits raffinés sur de plus longues distances, ou la persistance des difficultés en Chine feraient baisser la demande en tonnes-milles et les taux de fret.

Pour autant, en attendant la demande hivernale au quatrième trimestre, qui devrait extraire le transport pétrolier de sa phase de faiblesse actuelle avec le ralentissement des raffineries, plusieurs facteurs tirent le marché dans des directions opposées.

Historiquement, les taux des pétroliers – qu’il s’agisse des VLCC pour le transport du brut ou des navires de produits pétroliers (dits propres) –, sont fortement corrélés, mais cela n’a pas été le cas au deuxième trimestre. Les pétroliers à moyen (MR) et à long rayon d'action (LR) se sont très bien comportés alors que les superpétroliers ont patiné, a fait observer Ole Rikard Hammer, analyste du secteur au sein de la société norvégienne Arctic Securities. Pour le spécialiste, le marché du transport des produits raffinés bénéficie plus que le brut des perturbations en mer Rouge, car le commerce de produits d'Est en Ouest est proportionnellement plus touché.

Faible demande de brut en Chine

Le commerce du pétrole brut au cours du premier semestre a augmenté de 1 % par rapport à l'année précédente, après avoir progressé de près de 5 % en 2023 et de 9 % en 2022, a indiqué Enrico Paglia, directeur de recherche du coutier Banchero Costa dans une de ses notes hebdomadaires.

Les VLCC souffrent de la faible demande de brut en Chine, avec une baisse des raffineries et des importations au deuxième trimestre. Historiquement, la demande de pétrole est plus élevée au troisième trimestre d'environ 1,0 à 1,5 million de b/j par rapport au deuxième trimestre, mais si l'économie chinoise continue de ralentir, la demande de transport de pétrole brut pourrait être encore plus faible.

Le nombre de cargaisons spot pour les VLCC dans le golfe Persique et la mer Rouge, y compris les contrats d'affrètement, a été estimé par les courtiers à environ 140 en juillet, contre 160 en mars.

Maritime Strategies Internationa (MSI) prévoit de son côté que les revenus quotidiens moyens des VLCC seront de 33 700 $ au troisième trimestre pour les voyages depuis les États-Unis et le Golfe persique vers la Chine contre 40 600 $ au deuxième trimestre.

Convergence des segments

L’écart se resserre toutefois entre les différents segments du transport pétrolier. Les taux de fret des navires de produits raffinés ont touché début août leur point le plus bas jusqu'à présent pour cette année sur les routes clés du golfe Persique et de l'Asie du Nord. Sur la route de référence pour les LR1 (Golfe Persique-Japon), les taux ont été divisés par plus de deux au cours des dix dernières semaines, selon les données de S&P Global Commodity Insights.

Attirés par la meilleure conjoncture du transport de produits raffinés, au moins 60 pétroliers de brut, dits « sales », toutes tailles confondues, sont devenus « propres » depuis le début de l'année selon les courtiers, ce qui a eu pour effet d’augmenter l'offre et de tirer le fret vers le bas.

Selon MSI, les revenus moyens des pétroliers LR2 seront de l’ordre de 39 000 $/j au troisième trimestre sur la route Golfe Persique-Japon, à comparer aux 52 500 $/j du deuxième trimestre.

Équilibre parfait entre l'offre et la demande

Propre ou sale, les taux de fret ne seront pas impactés par un excès d’offre : depuis le début de l'année, seuls un VLCC, un suezmax et cinq aframax ont été livrés. Une douzaine devraient être mis à l'eau cette année. La taille de la flotte restera également inchangée en 2025 quand bien même l'EIA prévoit une augmentation de la production mondiale de 2,2 millions de barils par jous (Mb/j) et que l’Opep prévoit de revoir ses restrictions de production dans les 12 mois. Il y aurait donc potentiellement plus de volumes à expédier par pétroliers, selon les courtiers.

Toutefois, selon l'association d'exploitants de navires Bimco, les contractions de 2023 et 2024 (194 navires-citernes de plus de 10 000 tpl contractés au cours des sept premiers mois de cette année) ont contribué à gonfler le carnet de commandes (+ 135 % en 2023 et de 45 % jusqu'à présent cette année pour atteindre 37,1 Mtpl). En conséquence, le ratio entre le carnet de commandes et la flotte en exploitation est passé de 5,9 % au début de 2023 à 13,6 % au début de 2024 et s'élève désormais à 19,6 %. « En 2025-2027, 90 % du carnet de commandes est prévu pour la livraison, ce qui suggère un potentiel important de croissance de la flotte au cours de cette période », a

Adeline Descamps

 

194 navires-citernes affrétés entre janvier et juillet

« Au cours des sept premiers mois de cette année, 194 navires-citernes de plus de 10 000 t de port en lourd (tpl) ont été contractés pour une capacité combinée de 13,3 millions de tpl (Mtpl). Il s'agit d'une augmentation de 17 % par rapport à l'année dernière et du niveau de contractualisation le plus élevé depuis 2006 », pose Niels Rasmussen, analyste en chef du transport maritime chez BIMCO.

Depuis le début de l'année dernière, le carnet de commandes de pétrolier, qui a augmenté de 241 %, a connu la croissance la plus rapide de tous les secteurs du transport de marchandises. L'âge moyen des navires-citernes (13,6 ans) pourrait favoriser le recyclage des navires plus anciens et ainsi compenser la croissance de la flotte, estimée à 23,3 Mtpl (12,5 %) d'ici la fin de 2027.

A.D.

 

 

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