Pour développer ses transports à la voile, TOWT fait construire deux navires sur trois chantiers différents. L’armateur de voiliers cargos, né en Bretagne mais désormais implanté au Havre, a confié ces constructions au chantier Piriou de Concarneau (Finistère).
La première coque a été mise en chantier en septembre 2022 en Roumanie, sur les bords du Danube à Giurgiu. Le 28 août 2023, soit onze mois plus tard, elle est arrivée à Concarneau, au siège de Piriou. L’ancien chantier roumain ATG, racheté par Piriou fin 2021, était en charge de la coque.
Concarneau va désormais assurer l’aménagement du navire avec l’installation de tous les équipements de navigation, dont le mât qui doit être implanté en décembre prochain.
Nouvelle course contre la montre
La coque de l’Anemos, large de 12 m et longue de 69 m sur un navire de 80 m hors tout, a été mise à l’eau le 18 juillet et a quitté Giurgiu trois jours après.
Descendant le Danube grâce à deux remorqueurs, les Coremar 15 et 16, le navire a atteint le port roumain de Constantza le 24 juillet.
Là, il a été pris en charge par le Hunter, remorqueur de haute mer qui l’a acheminé jusqu’à Concarneau.
« C’est un moment fort car on voit désormais ce navire flotter, se réjouit Guillaume Le Grand, fondateur de TOWT. C’est désormais une nouvelle course contre la montre qui commence pour l’installation dans les mois qui viennent du câblage et des équipements électroniques. Le mâtage est prévu pour décembre, et les premiers tests à la mer sont envisagés au printemps. »
Premier voyage commercial au printemps
La fin du printemps devrait donc voir le premier voyage commercial transatlantique de l’Anemos qui assurera les dessertes de l’Amérique du Nord et de l’Asie, en escalant dans les terminaux moins fréquentés des plus grands ports d'où son faible tirant d'eau.
Un deuxième navire, commandé neuf mois après le premier, est également en construction chez le Breton Piriou.
La découpe de la première tôle a eu lieu le 3 octobre 2022, quelques jours à peine après celle du premier sistership. Le schéma de construction, cependant, est différent. En effet, ce n’est pas en Roumanie que Piriou opère mais sur son site de Ben Luc, près de Hô-Chi-Minh-Ville, au Vietnam, où le chantier breton est implanté depuis 2006.
Offre premium avec des taux de fret compétitifs
C’est là que le navire sera livré, en même temps que le premier à Concarneau. « Les mêmes fournisseurs envoient au Vietnam les mêmes pièces qu’à Concarneau, y compris le mât, et les mêmes techniciens pour les installer », explique Guillaume Le Grand.
« C’est en faisant construire le premier navire à Giurgiu qu’on a pu mettre au point ce prototype à proximité de chez nous. Pour la suite, nous pourrons bénéficier de prix asiatiques en ayant acquis en Europe l’expérience de la construction. Nous avons beau proposer une offre premium, nos taux de fret sont comparés à ceux des autres transporteurs maritimes et nous devons réduire le coût de construction des navires, qui représente un investissement important. »
Un départ par mois
Les prochaines unités de TOWT devraient donc, elles aussi, être construites par Piriou au Vietnam. L’armateur affirme déjà travailler à son troisième navire. Cependant, rien n’est encore décidé quant à une future construction, même si augmenter le nombre de navire en flotte sera une nécessité pour augmenter la fréquence des rotations. « Avec un départ par mois, nous proposons une solution de décarbonation intéressante. Mais avec deux départs par semaine nous pourrons, dans les années à venir, capter l’intégralité des flux d’un chargeur », espère Guillaume Le Grand.
Étienne Berrier
TOWT, un cas d'école
Après avoir affrété pendant 10 ans des vieux gréements (19) et avoir transporté plus de 2 000 t de marchandises а la voile, l’entreprise née en Bretagne mais désormais implantée au Havre, a changé d'échelle en se lançant dans l'armement de navires neufs dont elle a la propriété.
Elle se positionne, non sans risques au-delà des engagements financiers dans ce secteur hautement capitalistique, avec une proposition de valeur de surcroît techniquement radicale du point de vue de la décarbonation : 95 % en propulsion vélique.
Si son expérience avec des goélettes a été probante sur un plan commercial avec dix ans d’usages rentables, elle est attendue au tournant pour répondre à une question fondamentale : le transport maritime décarboné peut-il s’opérer dans un coût d’exploitation comparable à la façon dont il est opéré aujourd’hui.
En cela, TOWT est un beau cas d'école.
Adeline Descamps
Lire aussi
Propulsion vélique : changement d’échelle pour TOWT
[Enquête Propulsion vélique 1/3] Douze ans pour installer 24 voiles mais seulement un an pour 24 de plus
[Enquête Propulsion vélique 2/3] Marfret, CMN : Retour sur expériences véliques
[Enquête Propulsion vélique 3/3] Ayro, CWS, Chantiers de l'Atlantique : les fabricants déploient leurs ailes