Nommé pour un premier mandat le 13 mars 2019, Jean-Frédéric Laurent conservera ses fonctions à la tête du directoire de Bordeaux Port Atlantique pour cinq années de plus si une décision présidentielle, dont dépendent ces commis de l'État, n'y contrevient pas. Les membres du conseil de surveillance ont émis à l’unanimité un avis favorable à sa reconduction le 27 juin. Le décret actant sa nomination a été publié au Journal Officiel en date du 8 juillet.
Économiste de formation, le patron du plus petit port des Grands Ports maritimes (6,14 Mt en 2023, - 7 %) a rejoint le secteur portuaire en 2010 après avoir travaillé pendant plus de 15 ans dans le privé. Il a successivement occupé les postes de directeur de la stratégie et du développement, puis de président du directoire par intérim du GPM de Dunkerque avant d'être nommé en octobre 2014 à la tête du port de la Réunion où il a notamment accompagné la mise en place du hub de transbordement régional de CMA CGM.
Un contexte portuaire agité
Il s'est posé à Bordeaux avant la pandémie dans un contexte portuaire agité, marqué par de nombreux conflits sociaux dans la manutention. À son arrivée, le dirigeant avait immédiatement placé son propos sur la nécessaire relance du dialogue entre les différentes parties prenantes, qui s'est matérialisé par une charte de coopération quadripartite.
L'urgence était aussi au redéploiement de l'activité sur l'ensemble des sept terminaux. Parmi les sites problématiques, celui du Verdon, à la pointe du Médoc, cherche son positionnement alors que les escales de navires marchands ont déserté, hormis des trafics d'opportunité. Et celui de Bassens, qui loge le terminal à conteneurs, où CMA CGM est l'unique opérateur depuis le départ de MSC en 2018 avec des escales de feeders.
Bordeaux, qui réceptionnait jusqu’à 55 000 EVP par an il y a dix ans, reste le seul à encore à traiter du conteneur parmi les quatre ports de la région aquitaine (Bayonne, Bordeaux, Rochefort, La Rochelle) depuis l'abandon rochelais. Le terminal a bénéficié (chantier livré en 2021) d'un investissement de 11 M€ pour porter les capacités de traitement à 80 000 EVP par an et être en mesure d'acceuillir en simultané deux escales de porte-conteneurs (jusqu’à 1200-1400 EVP. Il reste à stabiliser les trafics.
Place à l'économie circulaire
Dans ses différentes interventions publiques, et dès son arrivée sur les quais, Jean-Frédéric Laurent s'est posé en apôtre de l'économie circulaire. Il y voit un moyen d'accompagner les mutations écologiques et énergétiques en cours et à venir dans les ports français, où les produits pétroliers représentent toujours peu ou prou la moitié des tonnages. C'est le cas de Bordeaux.
La presqu’île chimique d’Ambès semble s'affirmer en terre d’accueil de ce nouvel écosystème industriel. C’est en effet là que GH2 prévoit, via une AOP, l’implantation d’une usine de production à grande échelle d’hydrogène décarboné, produit par électrolyse de l’eau, transformé directement sur site en ammoniac (des e-carburants maritimes sont également projetés). L'entreprise, qui développe des usines électrochimiques pour la production et valorisation d’hydrogène vert, envisage d'implanter en 2027 un électrolyseur de 300 MW couplé à une ferme photovoltaïque sur 46 ha. L’entreprise a obtenu en fin d’année dernière des financements dans le cadre du plan France 2030 pour finaliser ses études de développement nécessaires à sa prise de décision finale.
Dans une même logique, le port est engagé, aux côtés de Storengy (filiale d’Elengy) et Nexeya, dans un projet de valorisation de l’hydrogène fatal émis par l’industriel Nouryon, pour l’heure, « perdu ».
Avec la capacité de traiter jusqu’à 25 000 t de matières organiques par an issues des activités portuaires et industrielles dans un rayon moyen de 18 km, l’usine de méthanisation portée par CVE, producteur indépendant d’énergies renouvelables, pourrait aussi être opérationnelle à Bassens cette année après quatre ans de développement.
Enfin, le marqueur de la nouvelle industrie à Bordeaux, qui n'est plus vraiment à l'état de projet, reste Hydrogène de France (HDF Energy) qui a inauguré fin mai, à l’endroit de l’ancien site de Ford de Blanquefort, une usine de production de piles à combustible de 12 000 m2.
Adeline Descamps