En décembre, le gaz naturel extrait des côtes du Golfe et de l'Atlantique s’est moins exporté que celui d’origine américaine. Les États-Unis sont devenus le mois dernier, et pour la première fois, le leader mondial pour l’exportation de GNL.
Selon l’EIA (Energy information administration), l’Agence américaine de l’énergie, la capacité nominale de liquéfaction de GNL devrait atteindre 182 Mtpa d’ici fin 2022, une fois les nouveaux trains de liquéfaction – le train 6 de Sabine Pass et les 18 trains de Calcasieu Pass (+19,4 milliards de m3 de capacité) – mis en service. Le continent nord-américain aura alors la plus grande capacité d'exportation de GNL au monde et supplantera les deux plus grands acteurs en la matière, l'Australie et le Qatar. La petite monarchie du Golfe prévoit toutefois de porter sa capacité de 77 à 126 Mt/j d’ici 2027. Elle porte, dans cette perspective, un vaste programme de construction d’une centaine de méthaniers (151 avec les options) exploités par Qatar Petroleum.
Parcours de météorite pour les États-Unis qui ont commencé à exporter du GNL en 2016. En 2020, le continent était encore le troisième plus grand exportateur de GNL au monde. Au-delà de 2022, une autre capacité de liquéfaction américaine de 21,2 milliards de m3 sera mise en service d'ici 2025 d’après ING.
De 40 à 200 € le MWh
En 2021, le gaz naturel américain a été porté par la forte demande de gaz, notamment par l’Europe. Près de la moitié des volumes records de GNL américains expédiés en décembre étaient destinés à l'Europe, cselon les données l’EIA.
L’an dernier, les États-Unis ont été la principale source de croissance de l'offre de GNL, ajoutant 25 Mt métriques grâce à la croissance de la capacité de liquéfaction et à la montée en puissance des unités fermées en 2020 (l'utilisation moyenne des usines américaines est ainsi passée de 43 % à 98 % entre le troisième trimestre 2020 et 2021).
Transfert du trafic de méthaniers
La situation est la résultante de la flambée des prix du gaz (+ 400 % au cours des six derniers mois, de 40 à 200 € le MWh) et de l’offre abondante et compétitive du gaz nord-américain. Le boom du pétrole et du gaz de schiste au cours des deux dernières décennies a conduit à une production nationale qui a dépassé la demande américaine d'environ 10 %.
Les données de suivi des navires montrent qu'environ 7,15 Mt de GNL ont été expédiées le mois dernier (106 méthanier), soit une augmentation de 16 % par rapport aux 6,14 Mt le même mois de l'année précédente.
Alors que les prix du gaz en Europe atteignaient des niveaux record – douze fois plus élevés que les prix de référence américains du Henry Hub –, le trafic des méthaniers s'est déporté de l’Asie vers l'UE en raison de l’écart de prix. Les prix sur les marchés spot européens ont même éclipsé les cours observés sur le hub de l'Asie de l'Est, ce qui a eu pour effet de doper la demande de GNL américain.
Mais selon Rystad Energy, la demande de GNL en Asie pourrait bondir en janvier, ce qui mettrait fin aux détournements vers l'Europe.
Les ports de Grande-Bretagne, des Pays-Bas et de Belgique comptent environ 30 méthaniers dont la livraison est prévue ce mois-ci, dont au moins 13 en provenance des États-Unis.
L’UE sous tension
Plusieurs facteurs ont contribué au boom des prix du gaz. Les projets de production de gaz repoussés à cause de la crise sanitaire, la reprise économique chinoise couplée avec la volonté de réduire la production d’électricité à partir de centrales à charbon, les tensions avec la Russie, qui fournit 35 % des besoins de l’Union européenne, au sujet l'Ukraine et du gazoduc Nord Stream 2, ont dopé la demande.
A.D.
Photo : Terminal d'exportation Cameron LNG en Louisiane. ©DR