En quoi consiste votre système d’aile de traction ?
Stéphanie Lesage : Il s’agit d’un système de kite installé à l’avant du navire, composé d’une voile de 1 000 m² déployée au bout d’un mât télescopique de 35 m et d’un ordinateur qui en automatise le pilotage. L’équipement de pont, cylindre de 5 m de diamètre, assure le déploiement et le repliage automatique de l’aile. Un dispositif de routage permet au capitaine d’adapter la vitesse, optimiser la route et l’utilisation du kite en fonction des informations aéronautiques envoyées par l’aile déployée et indications météorologiques reçues par le navire.
Où en sont les tests et quand aura lieu la première utilisation réelle à bord d’un navire ?
S.L. : Une démonstration de faisabilité avait été faite dès 2016 à bord d’un navire de Louis Dreyfus Armateurs, avec une voile beaucoup plus petite. Des essais ont ensuite été menés pendant un an et demi à terre dans le Morbihan, dans les Landes et en Charente-Maritime. Nous avons enfin réalisé en juin et juillet dernier des tests en mer à bord d’une barge au large de Sète. Deux clients vont pour le moment être équipés. Le premier, dès décembre prochain, sera Airbus, pour son roulier Ville de Bordeaux, opéré par LD Seaplane, qui fait la navette entre Saint-Nazaire et Mobile (Alabama). Le second est pour K-Line, dont nous équiperons un vraquier mi-2022. Nous venons de contracter pour une deuxième commande avec l’armateur coréen, qui a par ailleurs pris une option sur 50 futures commandes.
Le système peut-il s’adapter à tous types de navires ? Quelles sont les conditions d’utilisation ?
S.L. : Nous ciblons des navires de 100 à 400 m : vraquiers, porte-conteneurs ou tankers. Nous visons les gros navires car la réduction de la consommation de fuel sera la plus importante. SeaWings fonctionne à des vents de 9 à 40 nœuds, au portant, et même au près jusqu’à 30 degrés du vent sans occasionner de gîte.
Comment quantifiez-vous les économies de carburant ?
S.L. : Des simulations ont été faites en prenant en compte les conditions météorologiques sur le même trajet pendant quatre ans. Confirmées par l’armateur K-Line, ces simulations prévoient une économie de carburant 8 à 40 %. L’utilisation du kite est plus avantageuse en haute mer que sur les lignes courtes. Nous attendons une économie moyenne de 20 %, qui peut cependant être supérieure sur les lignes transocéaniques.
Quel est le coût d’installation à bord d’un navire existant et pour quel retour sur investissement ?
S.L. : L’économie de fuel réalisée permet un retour sur investissement à un horizon de trois ans, voire cinq ans dans le pire des cas. Tout dépend de l’intégration d’une taxe carbone dans le business plan. La voile doit être remplacée régulièrement, mais un service d’opération et de maintenance est prévu avec une contractualisation avec nos clients sur une durée de vingt ans.
Propos recueillis par Étienne Berrier