P&O Ferries licencie brutalement 800 personnes

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La compagnie transmanche a annoncé le 17 mars le licenciement, avec effet immédiat, de 800 marins sous contrat britannique. Tous les ferries de P&O en Europe sont en conséquence à l’arrêt. Trois des navires qu'ils exploitent entre Calais et Douvres sont immobilisés dans le port britannique. L’entreprise envisagerait-elle de s’inspirer des pratiques de management du nouvel outsider du détroit, Irish Ferries ?

P&O Ferries a temporairement suspendu toutes ses traversées, déclarant que ses services ne « sont pas en mesure d’être assurés au cours des prochains jours ». Les clients ayant réservé des traversées sont invités à se rendre au comptoir d’enregistrement où une alternative de transport leur sera proposée, alors que les Pride of Kent, Pride of Canterbury et Spirit of Britain, trois des ferries opérant entre Calais et Douvres, sont immobilisés dans le port britannique.

Cette décision fait suite au licenciement brutal (convocation générale à une réunion sans préavis et trois minutes de visioconférence préenregistrée, selon les salariés), « avec effet immédiat », par P&O de l'ensemble de ses 800 membres d'équipage britanniques. Des sources syndicales indiquent que les postes seront pourvus par des travailleurs intérimaires à moindre coût, principalement originaires de Colombie. Les syndicats ont conseillé au personnel licencié de ne pas quitter leur poste à bord et d'organiser la résistance par un « sit-in ». Dans la confusion et la panique, des informations non corroborées circulent selon lesquelles des agents de sécurité ont tenté d’expulser de force les manifestants des navires. 

Agitation à Westminster

Outre-Manche, l'opposition est vive au sein du Parlement, où l'on souligne que la société-mère DP World, qui avait acquis la britannique en 2006, a réalisé l'an dernier un bénéfice avant impôt record de 3,8 Md$ (le groupe vient de présenter ses résultats). Mais l’opérateur portuaire émirati n’a jamais caché qu’il ne pouvait pas continuellement subventionner un secteur d'activités dit non rentable. Le ministre britannique des transports, Grant Shapps, a indiqué sur Twitter que le gouvernement était « préoccupé » par cette information et qu'il s'entretiendrait « aujourd'hui », le 17 mars donc, avec la compagnie.

P&O Ferries a déclaré dans un communiqué qu'elle avait enregistré une perte de 100 M£ (118 M€) par rapport à l'année précédente, couverte par DP World, mais que la situation n'était « pas viable » et que sans des « changements rapides et importants », son activité n'avait pas d'avenir.

Concurrence sur le détroit

Le transporteur britannique est en difficulté depuis de longs mois. À l’acmé de la crise sanitaire, il avait été contraint de licencier 1 100 personnes. Il avait été plus impacté que ses concurrents par le Brexit du fait d’une plus grande exposition de ses activités au marché anglais.

La compagnie exploite actuellement des services rouliers de fret et de passagers sur quatre lignes : Douvres-Calais ; Hull-Rotterdam ; Liverpool-Dublin et Larne-Cairnryan. Elle dispose de deux grands ferries transmanche récents, les Spirit of Britain et Spirit of France, ainsi que des navires de plus ancienne construction, les Pride of Canterbury, Pride of Kent et Pride of Burgundy, tandis que les Pride of Hull et Pride of Rotterdam opèrent sur les lignes de la mer du Nord. En Irlande du Nord, P&O a déclaré qu'elle redirigerait tous les services au départ du port anglais de Larne vers Belfast « pendant une semaine, le temps que le nouveau personnel soit intégré ».

Pour Douvres-Calais, route maritime la plus fréquentée et la plus lucrative, la compagnie danoise DFDS, qui arme cinq navires sous pavillon français, a proposé de prendre en charge les passagers en détresse, dans la limite de ses capacités disponibles. P&O Ferries et DFDS ont déjà commencé à partager des capacités sur le roulier pour contrer la concurrence de l’irlandaise Irish Ferries. L’irlandaise avait annoncé son arrivée en juin dernier sur le détroit alors qu’elle exploitait jusqu’à présent des lignes entre le Royaume-Uni et l'Irlande et entre l'Irlande et la France.

Un procédé connu

Le procédé est connu en Grande-Bretagne, réagit Paul Tourret, directeur de l’Isemar. « P&O envisage depuis quelques mois de se tourner vers une agence spécialisée, ce qui signifie des équipages divers issus de pays mieux-disant socialement. L’idée serait d’adopter le modèle d'Irish Ferries. Le nouvel outsider du détroit utilise l'intermédiaire d'une agence baptisé Matrix Ship Management, dont le siège est à Limassol, à Chypre embauchant principalement des travailleurs d'Europe de l’Est. Les personnels anglophones sont, eux, maintenus dans les fonctions en relation avec la clientèle

Robert Jaques (avec contribution A.D)

 

 

 

 

 

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