Panama, Libéria, Îles Marshall : des positions renforcées en 2020

 

En 2020, année de terrible pandémie, où il y a eu moins de mouvements de navires, moins de commandes, moins de livraisons et au cours de laquelle les inspections et la délivrance de documents ont été entravées, le trio de tête mondial de l’immatriculation des navires a continué d’engranger des adhérents.

Pour justifier le succès des premiers pavillons mondiaux, leurs détracteurs s’enfermeront dans leurs arguments – caractère peu contraignant en matière de sécurité du navire, avantages fiscaux évidents, puissance de feu commerciale décomplexée allant jusqu’aux promos de Noël pour attirer les chalands, curiosité limitée pour les législations sociales et les droits des marins... D’autres continueront de s’étonner de cette fortune renouvelée d’année en année, que seule l’administration par des sociétés privées ne peut justifier. En attendant, en 2020, année d’entraves et de restrictions pour les échanges globalisés, ils ont fait encore mieux que les autres années. 

Entre janvier et décembre 2020, le registre panaméen a ajouté 1 033 navires à sa flotte et 29,7 millions de tonnes de jauge brute (tjb), selon le rapport de l'autorité maritime du Panama. C’est la meilleure moisson depuis 2011 avec une croissance de 4,4 %, à près de 235 Mtjb en 2020. Quelque 9 596 navires (fin octobre) naviguent désormais sous le drapeau tricolore divisé en quatre quartiers. Le pavillon panaméen maintient sa première place mondiale avec plus de 16 % de la flotte maritime mondiale, en termes de tonnage, sous ses couleurs, selon Clarksons Research.

 Il forme, avec le Liberia et les îles Marshall, les trois premiers pavillons d'immatriculation, en termes de capacité de transport et de valeur de la flotte immatriculée. Au 1er janvier 2020, le trio représentait déjà 42 % de la capacité de transport et 33,6 % de la valeur de la flotte.

Selon la Lloyd’s List Intelligence, le Panama n’est toutefois pas en tête des États du pavillon ayant enregistré la plus forte croissance parmi les dix premiers États du pavillon l’an dernier. Le Liberia est arrivé en tête (+ 9,3 %, 188 Mtjb) suivi par les îles Marshall, tandis que la Grèce a enregistré la plus forte baisse, suivie par le Japon.

Source : données Lloyd’s List Intelligence

Le Panama a revu tous ses process

Pour autant, le registre panaméen a cependant enregistré en 2020 sa plus forte croissance (+ 6,22 %) selon les données d'IHS Markit. Parmi les nouveaux entrants, 339 navires (14,3 Mtjb) sont de construction récente. Le pavillon dit avoir réduit la part d’annulations et de transferts vers les autres registres de 25 % sans en communiquer le nombre. Selon Rafael Cigarruista, nommé directeur général de la marine marchande en 2019, ces résultats sont le fruit d’une réorganisation du pavillon et de modernisation de ses processus afin d'améliorer ses offres de services, mentionnant ses certificats électroniques « cyber sécures garantis contre la contrefaçon. »

Le dirigeant revendique également une ligne dure à l'égard des navires sanctionnés, dépavillonnant de manière proactive pour toutes infractions observées dans les systèmes de suivi des navires. Le registre se targue également d’une réactivité dans ses enquêtes sur les accidents, citant en exemple le cas du capesize Wakashio, qui « a fait l’objet d’un rapport préliminaire dès septembre ». Le vraquier a heurté un récif au large de Maurice en juillet 2020, s’est brisé en deux, provoquant ce que d’aucuns considèrent comme la « pire catastrophe écologique de l'océan Indien. » 

Immatriculation des navires : le Liberia a encore accru son influence en 2020

Le Liberia, agressivité commerciale

Le nombre de navires hissant le drapeau du Liberia a augmenté de 268 unités. Le petit État africain attribue sa performance à son offre de service « 24h/24 et 7 j/ 7 » mais il la doit surtout à son agressivité commerciale, son régime fiscalement avantageux et son exigence modérée quand il s’agit de droits sociaux. Le Liberia a également accéléré la dématérialisation de ses process en 2020, offrant le télé-enregistrement, la livraison de navires ainsi que des inspections à distance mais sans pour autant rogner sur la sécurité, assure la société privée américaine qui le gère. 

En 2020, le registre a étoffé un peu plus son réseau en s’implantant à Oslo et à Houston alors qu’il dispose d’une couverture mondiale avec 28 bureaux et un réseau de 450 inspecteurs agréés. Cependant, le Libéria a perdu son éligibilité au programme Qualship 21 géré par les garde-côtes américains, très sourcilleux sur les règles et les normes en matière de sécurité et de lutte contre la pollution.

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Îles Marshall, flotte revendiquée verte et durable

Les Îles Marshall ont en revanche été renouvelés par cette labellisation pour la 16e année consécutive. La flotte de l’archipel situé dans le sud-ouest de l'océan Pacifique a connu une croissance de 4,9 % pour atteindre 171 Mtbj en 2020, selon la Lloyd's List Intelligence. Le pavillon, régi par une structure largement décentralisée grâce à 28 bureaux répartis dans le monde, s’est étoffé de 150 unités. Les Îles Marshall se vantent d’avoir la flotte la plus jeune et la plus verte du monde, selon les mots de William Gallagher, directeur du registre, qui fait de ces deux critères les marqueurs du registre.

En octobre 2020, il a engagé Alexander Schultz-Altmann, un cadre de l'Agence australienne de sécurité maritime, pour renforcer ses ressources dans la région. Est-ce en lien avec le traumatisme généré par le Stellar Banner à l’impressionnante fin ? Le minéralier avait été sabordé au large du Brésil début 2020 à la suite d'un échouage.

L'OMI, en croisade contre le pavillonnement illégal

Pavillons frauduleux

Pour lutter contre l'immatriculation illégale des navires, l’OMI a adopté une série de mesures à l’occasion de la 106e session du comité juridique en mars 2019. L'enregistrement des navires et gens de mer sous un faux registre international, qui vise souvent à échapper aux réglementations internationales sur la sécurité et l'environnement, est dans le viseur de l’Organisation maritime internationale. Le phénomène s’est exacerbé avec les sanctions internationales et américaines imposées à des pays comme la Corée du Nord, l'Iran et la Syrie. Les tactiques pour contourner les mesures sont tentantes. 

Pour y remédier, une base de données complète des registres devrait voir le jour. La décision avait été prise suite aux remontées d'un certain nombre d'États membres. Parmi les cas les plus souvent observés : l'immatriculation de navires à l'insu ou sans l'approbation de l'administration maritime nationale compétente ; le maintien d'un registre de navires après l'expiration ou la cessation du contact avec la compagnie d'immatriculation ; la soumission de documents frauduleux à l'OMI, à l'insu de l'autorité compétente de l'État du pavillon, afin d'obtenir des documents et numéros d'identification du navire ou encore la manipulation délibérée des données AIS pour modifier sensiblement l'identité du navire…

Adeline Descamps

 

 

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