Conteneurs : retour aux niveaux d’avant-Covid ?

 

Progressivement, et sur certaines routes de façon plus manifeste que sur d’autres, les porte-conteneurs retrouvent un emploi. Les taux d'affrètement se redressent, revenant à des niveaux de rentabilité plus sains. La plupart des segments, y compris les petits navires, bénéficient d'un regain d'intérêt.

Cahin caha, les porte-conteneurs sortent du « garage ». Le regain de la demande de transport a permis de remettre en selle l’équivalent de 169 357 EVP. Le nombre de navires au chômage est tombé à 198 unités pour 799 643 EVP, soit 3,4 % de la flotte totale de porte-conteneurs au 31 août, selon le dernier inventaire d'Alphaliner. Un mois plus tôt, ils étaient encore 313 à être hors service, soit 6,6 % de la capacité de la flotte mondiale avec près d’1,6 MEVP. La ligne régulière a donc réactivé une capacité de près de 2 MEVP en deux mois. La demande paraît soutenue pour toutes les tailles de navires, à l'exception du segment des 2 000 à 2 999 EVP.

« Dans l'ensemble, la flotte inactive devrait atteindre son point bas dans les semaines à venir, avant de remonter dans la deuxième moitié du troisième trimestre », indique le consultant. Dans ce calcul, en raison de la mise en œuvre de la réglementation sur le soufre dans les carburants effective depuis le 1er janvier, il ne faut pas oublier de retrancher le nombre de navires dont les travaux de mise en conformité sont en cours. Ils comptent pour 30 % dans le total inactif. Fin août, 25 unités étaient en cale totalisant une capacité de 237 648 EVP.

La flotte inactive diminue pour la première fois en quatre mois

Affrètement en redressement

Les taux d'affrètement se portent mieux également, revenant dans le sillage des niveaux d’avant Covid. La plupart des segments, y compris les petits navires, bénéficient du rebond, la faiblesse du tonnage disponible expliquant aussi cela.

Les écarts de marché entre l'Asie et l'Atlantique sont cependant significatifs pour certains types de navires. Les propriétaires de porte-conteneurs (non exploitants) de grande et moyenne taille profitent de la bonne santé des échanges commerciaux sur les routes Est-Ouest. « Les taux et volumes de fret élevés observés sur ces routes, notamment dans le Pacifique, alimentent la demande de tonnage de conteneurs, dans un contexte de chute des prix du pétrole, indique Alphaliner. Les corridors Nord-Sud, qui connaissent des conditions tout aussi saines, notamment entre l'Asie et l'Amérique du Sud où les taux de fret ont fortement rebondi à la suite de la pandémie, contribuent également à maintenir la demande à un niveau élevé. »

Les grandes questions qui alimentent actuellement les spéculations demeurent : la réintroduction progressive de capacités par les transporteurs va-t-elle faire baisser les taux de fret ? Dans un monde en récession, fébrile à l’idée de subir un deuxième assaut d’un virus mondialisé, quel est le potentiel de croissance des cargaisons nécessaire pour soutenir la demande ?

Golden Week : le passage du gué

Peu de porte-conteneurs disponibles

En attendant, il n’y a pas de porte-conteneurs dans la catégorie des 7 500-11 000 EVP (VLCS) qui ne soient pas affrétés. L’absence de livraison soutient le segment à la hausse et impose des conditions d’affrètement sur un temps long. Alphaliner évoque un tarif de 22 000 $/j pour une unité de 8 200 EVP.

Dans le segment des  5 300 à 7 499 EVP (LCS), l’offre est aussi contrainte, avec seulement deux navires qui devraient être offerts à l'emploi dans les quatre prochaines semaines. Les taux d'affrètement reviennent dans des niveaux de rentabilité décente : un 5 527 EVP pour un affrètement de 6 à 8 mois en Asie a été fixé à 19 500 $/j. La même dynamique encadre les navires de 4 300 à 5 499 EVP : offre asséchée, limitée à court terme et tarif en redressement. Ainsi un 4 957 EVP a été négocié pour un affrètement périodique à 19 800 $/j, « un taux en hausse par rapport aux 17 750 $/j conclus récemment pour un navire comparable. »

Dans les petits panamax (4 000 à 5 299 EVP), les courtiers ont observé un tarif à 20 000 $/j pour un aller-retour dans le Pacifique. Les plus grands de ce segment, affrétés pour une période plus standard de 12 mois, s’échangent à des niveaux moindres, autour de 16 000 $/j mais contre 14 000 $/j en août. Sur le front de l'approvisionnement, seuls trois navires sont actuellement en position de spot alors que près de 50 navires étaient au chômage en mai dernier.

La demande de la région transpacifique échappe à tout entendement

Asie-côte ouest Américaine, route actuellement la plus lucrative

En mer, le marché est hésitant du point de vue de l’offre à l’approche de la période traditionnellement morne à cette époque de l’année qui marque la Golden Week en Chine, semaine de jours fériés du 1er au 7 octobre. Toutes les grandes alliances ont fait part d’une programme à nouveau allégé sur les routes Asie-Europe et Asie-Amérique du Nord. Phénomène classique d’anticipation, les exportateurs chinois vont s’empresser d’expédier avant les vacances, ce qui augure d’une forte demande de transport en septembre, en particulier pour les deux grands trafics Est-Ouest.

En attendant, la forte demande de fret sur le transpacifique a provoqué une flambée des taux spot de Shanghai à la Californie, qui vole de record en record pour atterrir à 3 758 $/EVP le 4 septembre. C’est actuellement la route la plus lucrative, et pourtant la plus courte, pour les transporteurs, qui tirent d’ordinaire le revenu par mille nautique le plus élevé de la ligne entre l'Asie et l'Europe du Nord. Le transport d’un conteneur de 40 EVP de Shanghai vers Anvers coûterait 2 084 $ selon le Shanghai Containerized Freight Index (SCFI), ce qui équivaut à 0,19 $ par mille nautique (10 624 milles nautiques 19 675 km) pour 0,64 $ entre Shanghai et Los Angeles (5 818 milles nautiques, 10 774 km).

Alors qu’il vient de lancer son nouveau service Santana avec le départ, le 5 septembre, du MSC Lily (8 819 EVP) au départ de Shanghai vers la Californie, MSC est monté à deux traversées hebdomadaires sur le service saisonnier 2M Sequoia, exploité au sein de son alliance avec Maersk. Les sisterships MSC Virgo et MSC Aries, d'une capacité de 15 000 EVP quitteront Yantian les 8 et 11 septembre respectivement

Ocean Alliance : une solution pour 57 nouveaux navires à remplir ?

Baromètre de la reprise espérée de l'économie mondiale

Sur un plan macroéconomique, dans un contexte incertain, l’économie reste fragile alors que la première phase de l’accord commercial signé en janvier entre les deux géants économiques de la planète, Chine et États-Unis, doit entrer en vigueur. Pékin s’est engagé à importer pour 200 Md$ supplémentaires de produits américains sur deux ans. En échange, Washington doit surseoir à toute nouvelle hausse douanière. Si l'excédent commercial de la Chine en août s'est inscrit à 58,9 Md$ (contre 62,3 milliards en juillet), celui avec les États-Unis s'est creusé à 34,24 Md$.

Les exportations chinoises ont toutefois signé ce mois-là leur meilleure performance depuis le début de l'épidémie de Covid-19, avec une croissance de 9,5 % (sur un an). Mais les importations ont de nouveau marqué un repli (- 2,1%), après une baisse de 1,4 % en juillet, signe de la faiblesse du marché intérieur chinois.

Adeline Descamps

Les porte-conteneurs reprennent (un peu) leurs traversées

 

 

 

 

 

 

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