Depuis l’arrivée de son nouvel actionnaire, le groupe UMSI (United Mining Suppliers International), en janvier 2021, Alteo s’est doté d’un « plan » pour ne pas avoir à fermer l’usine « comme cela arrive parfois », avance, mi-figue, mi-raisin, Patrick Schneider, son directeur général adjoint, dans le cadre d’un webinaire organisé par Via Marseille Fos sur la filière des vracs solides le 21 mars.
L’entreprise a été embarquée, il y a quelques années, dans ce qui a été qualifié par les associations environnementales de « scandale aux boues roues » en référence aux rejets liquides de l’usine d’alumine de Gardanne (Bouches-du-Rhône) dans la Méditerranée pour lesquels elle avait une autorisation. Il s’en est suivi une bataille politique non sans impacts économiques.
Aujourd’hui, le projet, visant à substituer dans ses process les hydrates d’alumine à la bauxite et à produire de manière plus vertueuse « par la modernisation d’équipements existants et l’intégration de nouveaux procédés », avance. Un projet, effectif, dans lequel elle a investi « plus de 25 M€ ».
Pour ses besoins, l’entreprise doit s’approvisionner en hydrates (400 000 t par an, via les bassins Est) dont le sourcing et l’acheminement ne sont pas problématiques, le produit se transportant très bien par la mer. « Il y a néanmoins des contraintes. On ne choisit pas forcément la taille des bateaux, c'est souvent la source. Le produit exige en outre une grande pureté, ne supportant pas la moindre pollution. Il nécessite un stockage sous hangar obligatoire [la bauxite était stockée à l’air libre, NDLR] », explique le dirigeant.
Des coûts d’exploitation trop élevés
En revanche, une fois à terre, c’est plus compliqué. Les flux import passent actuellement par le terminal Med Europe, au poste 22 des bassins Est, où le fabriquant de spécialité a trouvé des hangars couverts conformément aux exigences de son produit. L’acheminement vers l’usine de Gardanne se fait ensuite par brouettage. Mais le dirigeant reconnaît que la solution n’est pas optimale. « On a pris l'existant. Ces bâtiments sont relativement anciens et petits, ce qui est problématique. La proximité de la ville et les flux de camions font que nous ne sommes pas à l’abri des plaintes de riverains. Cela nous oblige à renforcer nos capacités de nettoyage. Quand on cumule la totalité de ce que l'on veut faire, bien faire, le coût d'exploitation est plus élevé que ce qui était prévu dans notre projet. Le tirant d'eau aussi sera un problème de développement futur », énumère le dirigeant.
Une solution à Fos
De Gardanne, les bassins Est du port de Marseille Fos sont plus accessibles mais à l’Ouest, à Fos, l’industriel dispose d’une connexion ferroviaire directe. Il s’est donc engagé dans la construction d’un nouveau bâtiment de 12 000 m2 et de 24 m de haut sur la darse 1 offrant un espace de stockage d’une capacité de 90 000 t. « On pourra escaler sans aucune difficulté des navires avec des chargements de 50 000 t, ce qui est impossible aujourd'hui sur les bassins est à cause du tirant d'eau (10,20 m). On aura un approvisionnement bord à quai, dans un premier temps avec les grues existantes puis via un système de bande transporteuse capoté », détaille Patrick Schneider.
L’industriel réduit ainsi à néant ses flux routiers : aux 30 à 50 camions par jour va se substituer un seul train quotidien. « On envisage même un trafic limité à cinq jours par semaine, ce qui permettrait une meilleure acceptabilité ».
Janvier 2025 est son échelle de temps. « Il n’y a pas de raisons à ce stade pour que cela ne puisse pas l’être ».
Réduction des émissions de 53 %
Depuis le lancement du « plan », l'entreprise déclare avoir réduit de 53 % de nos émissions de CO2. « Et avec le plan de décarbonation qui vient d'être lancée, nous allons encore diminuer de 10 % à peu près nos rejets et consommations », promet Patrick Schneider. Le report de tous les flux de la route vers le rail et le zéro rejet liquide sont au programme. Aujourd’hui, Alteo rejette encore de l'eau traitée en mer mais envisage un traitement en circuit fermé.
Adeline Descamps