Une étude pour « verdir » les bateaux du bassin du Nord de la France a été lancée officiellement début juin 2021 par les différents partenaires Norlink, VNF, les ports de Dunkerque et Lille, GRDF.
La première phase de l’étude (confiée à Alternatives Energies) va permettre de réaliser un diagnostic énergétique de cinq bateaux (aussi bien sur les consommations liées à la propulsion que les auxiliaires et les consommations de bord) afin de caractériser les besoins énergétiques en fonction du profil de navigation, des marchandises transportées, des caractéristiques de la voie utilisée, etc. Ces cinq unités sont toutes situées sur le bassin du Nord de la France et desservent des plateformes intermodales, des ports maritimes ou intérieurs ou industriels.
5 bateaux étudiés, réalisant des flux pendulaires courts et captifs
Il faut noter que les cinq bateaux retenus sont intégrés dans « des flux pendulaires courts et captifs du bassin ». Cette particularité fait suite à de premiers travaux initiés en juin 2020 par un groupe de travail réunissant d’abord Norlink et VNF qui ont été ensuite rejoints par les autres partenaires.
Marie-Céline Masson, directrice territoriale Nord-Pas-de-Calais de VNF, explique : « Le bassin Nord-Pas-de-Calais est ouvert vers les grands bassins de navigation du Nord de l’Europe et de la Seine. A cet effet, en préalable à l’étude, le groupe de travail a effectivement caractérisé la présence de deux types de flux sur notre bassin : des trafics de transit ou de longues distances et des trafics correspondant à des flux pendulaires courts et captifs.
Pour ces derniers, les profils de navigation sont connus et réguliers, les chargeurs sont identifiés et impliqués, avec des zones d’avitaillement maitrisables.
Le groupe de travail a alors considéré que ces flux étaient plus simples à convertir rapidement vers une motorisation plus « propre » et a ciblé cette première étude d’audits énergétiques vers les bateaux réalisant ces flux pendulaires et courts »,
2 Freycinet, 2 bateaux de 80 m et 1 de plus de 100 m
Concrètement, le choix des cinq bateaux s’est fait en collaboration avec le bureau d’étude Alternatives Energies pour avoir un échantillon suffisamment représentatif et diversifié de la flotte du bassin.
La directrice territoriale précise : « Différents critères ont été pris en compte tels que la motorisation, la dimension du bateau (longueur, port en lourd) et son parcours (distance, nombre d’écluses…).
A titre d’exemple, sachant que notre flotte circulant sur notre bassin est composée principalement de Freycinet (29 %), de bateaux de 80 m (29 %) et de bateaux de plus de 100 m (20 %), l’échantillon sélectionné comporte 2 Freycinet, 2 bateaux de 80 m et 1 de plus de 100 m. Plusieurs types de flux sont transportés (déchets, vrac, conteneurs).
Pour réaliser le diagnostic énergétique de chaque bateau, le bureau d’étude Alternatives Energies instrumentera chaque bateau. Une instrumentation avec différents appareils de mesure sera installée sur chaque bateau pendant une semaine environ afin de mesurer différents profils de navigation : bateau lège, bateau chargé, manœuvres dans les écluses… Un technicien du bureau d’étude sera présent sur le bateau.
Dans cette première phase, au-delà du diagnostic énergétique, le bureau d’étude établira également des préconisations techniques pour optimiser les consommations énergétiques des bateaux instrumentés sans changement de moteur ».
Il s’agit ainsi d’obtenir rapidement des gains d’émissions avec une optimisation des usages, de la propulsion, des gros postes de consommation à bord, etc.
Proposer des solutions concrètes de motorisation alternatives
La deuxième phase de l’étude sera consacrée à définir des solutions concrètes de conversion à des motorisations alternatives à partir des résultats du diagnostic énergétique. Toutes les pistes de carburation seront étudiées (propulsion hybride, GNC, BioGNC, GNL, biocarburants, full électrique, pile à combustible, motorisation à combustion hydrogène, etc.).
« Avec la deuxième phase de l’étude, il s’agit de proposer des solutions concrètes de motorisation alternatives pour les bateaux instrumentés. Toutes les pistes de carburants alternatifs seront étudiées. Il s’agit d’identifier les options techniques les plus pertinentes, les éléments financiers et le bilan environnemental de la solution projetée », poursuit Marie-Céline Masson.
L’étude est cofinancée par Norlink Fluvial, Voies navigables de France, GRDF, Dunkerque Port et Ports de Lille. Elle est réalisée avec la participation active de la profession fluviale. D’une durée de cinq mois, de premiers résultats devraient être connus au cours de l’automne 2021.
Vers un schéma d’avitaillement
L’étude et ses deux phases constituent une première étape sur la voie de la décarbonation et de la transition énergétique de la flotte du bassin du Nord de la France, d’autant plus avec la perspective de l’arrivée de Seine-Nord Europe à la fin de la décennie.
Aussi, les partenaires préparent déjà l’après, ayant conscience que « l’amélioration de la performance énergétique des bateaux implique d’agir sur tous les maillons de l’écosystème fluvial pour mettre en place des solutions plus propres ».
Il s’ajoute le fait que sur ce bassin régional, « les infrastructures d’avitaillement sont peu structurées, voire absentes ».
Le partenariat prévoit de s’engager dans la réalisation d’un projet commun de schéma directeur d’avitaillement en carburants alternatifs pour le fluvial dans la région.
Selon la directrice territoriale de VNF : « Cette étude est une première phase qui permettra de définir les besoins énergétiques et les solutions techniques de conversion de la flotte. Ces données serviront à identifier ensuite la stratégie de déploiement de l’offre d’avitaillement en carburants alternatifs adaptés aux différents usages de la voie d’eau ».
Interrogée sur les solutions de financement du « verdissement », elle indique : « Le financement du verdissement de la flotte est effectivement un enjeu. Ce sujet a été évoqué lors d’un séminaire « Vert le fluvial ». Une réflexion est en cours au niveau national pour trouver de nouveaux leviers financiers, notamment avec la révision du dispositif PAMI après 2022 et la mise en place de certificats d’économie d’énergie pour le fluvial ».