Face au tapis rouge déroulé pour la motorisation hydrogène, les acteurs du GNV ont tenu à souligner les intérêts de la motorisation gaz, notamment pour les véhicules lourds, lors d’un point presse organisé le 8 septembre dernier. Selon l’association française du gaz naturel pour véhicule (AFGNV) le GNV peut être considéré comme une solution "low tech" pour améliorer la qualité de l’air, avec l’avantage d’être immédiatement accessible à tous : il émet ainsi deux fois moins de Nox qu’un Euro VI Diesel en conditions réelles d’exploitation et 89 % de moins de particules que le seuil de la norme Euro VI.
Le risque ? Ne plus pouvoir entrer en centre-ville
Autre atout indéniable pour les livraisons urbaines et souvent nocturnes, l’émission de bruit est réduite de 50 % (la plupart des véhicules GNV enregistrent un niveau sonore en deçà de 60 dB) et tous les véhicules bénéficient de la vignette Crit’Air 1, qui les autorise à circuler lors des pics de pollution et dans les Zones à Faible Emission (ZFE). Une évidence pour le groupe Carrefour, qui fait actuellement circuler 450 camions roulant au BioGNV (sur un total de 3 500 véhicules). "Le risque maximum serait de ne plus pouvoir entrer dans les centres-villes, nous sommes obligés d’anticiper les décisions des villes vis-à-vis des ZFE et de l’exclusion du Diesel, ainsi que sur les péages et et les taxes CO2. Nous préférons au contraire influencer la solution, grâce à notre masse. En 2012, lorsque nous nous sommes lancés dans le GNV, on nous prenait pour des fous. Depuis, tout un écosystème s’est mis en place avec les transporteurs comme Perrenot, des distributeurs de gaz comme Engie et des constructeurs comme Iveco", témoigne Philippe Pieri, directeur stratégie et achats et développement durable du groupe.
Croissance de 20 % par an
Selon le dernier comptage de l’AFGNV, plus de 22 000 véhicules GNV circulent aujourd’hui en France, dont 10 491 véhicules légers, 4 087 poids lourds, 2 004 bennes à ordures ménagères et 3 865 bus et cars. Depuis 2014, les immatriculations des véhicules lourds au GNV augmentent en moyenne de 20 % par an. Poussées par les incitations des chargeurs et les projets de ZFE, les ventes de camions gaz progressent de 20 % chaque année depuis 2014, avec + 26 % l’an passé.
La France comptait 149 points d’avitaillement fin août 2020 et devrait en totaliser 235 à fin août 2021, avec actuellement une offre supérieure à la demande selon Gilles Durand, secrétaire général de l’AFGNV. Ce dernier précise que le taux d’incorporation de biométhane dans le GNV est passé de 12 % en 2018 à 17 % en 2019 et devrait être supérieur à 20 % en 2020, en phase avec l’objectif de 100 % de biométhane dans le GNV fixé pour 2050.
Ne pas répéter les erreurs du passé
En comparaison, Carrefour indique avoir poussé à l’ouverture de 14 stations bio GNV, qui monteront à 21 d’ici fin 2022. Le groupe de distribution souhaite en effet poursuivre son investissement dans la motorisation gaz. "Notre vision est très pragmatique. Carrefour est engagé dans la baisse des émissions de CO2 et actuellement le GNV, et surtout le bioGNV, représente la seule alternative crédible au Diesel. Nous allons ainsi déployer à court terme 1 200 camions bioGNV à l’horizon 2022", souligne Philippe Pieri. Mais pas question pour autant de convertir toute la flotte. "Nous ne sommes pas partisans de telles ou telles énergies, nous devons rester agiles. Il s’agit de ne pas répéter la même erreur qu’avec le Diesel et de se retrouver en monogamme, c’est pourquoi nous songeons également à des solutions hydrogènes. Ces modes ne s’opposent pas, nous les utiliserons en parallèle", soutient-il.
Projets de recherche
Carrefour est ainsi engagé sur trois projets de recherche autour de l’hydrogène, avec le projet Cathyopé, qui consiste à modifier un camion Diesel de 44 t en retrofit par GreenGT (premiers tests imminents). Le groupe est aussi présent sur le projet européen H2Haul, qui vise à stimuler la production en série de poids lourds à hydrogène en Europe (les premiers tests sont prévus en 2022-2023) et Hyammed (pour Hydrogène à Aix-Marseille pour la Méditerranée), qui est destiné à produire de l'hydrogène décarbonée en grande quantité et à définir un réseau de distribution pour poids lourds. "Notre groupe travaille également avec la société Retrofleet pour le retrofit hydrogène d’utilitaires et dispose également de la plus grande flotte de transpalettes à pile à combustible en Europe, sur notre site de Vendin-le-Vieil (62), avec 150 unités", complète Philippe Pieri.