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Le groupe VW, et sa marque MAN, annoncent des chiffres extrêmement ambitieux quant à la conquête du marché par les véhicules électriques. Bien que leur débarquement soit annoncé « pour demain », le flou subsiste à propos des conditions précises de déploiement des flottes électriques et du prix du matériel. Pour ne rien arranger, le programme industriel semble avoir pris quelque retard.

En novembre 2017, le groupe VW a annoncé un investissement de 34 milliards d’euros d’ici 2022 dans les véhicules électriques, la conduite autonome et la mobilité connectée afin de « disposer de la plus grande flotte électrique du monde ». Ce budget est évidemment réparti entre les douze marques du groupe et leurs différentes gammes. Il n’en est pas moins extraordinaire puisqu’il est quinze à trente fois supérieur aux dépenses suscitées chez chaque constructeur de poids lourds par le passage à Euro VI et les actualisations de gammes concomitantes.

95 % de camions électriques en 2040 selon VW !

MAN prévoit un décollage très rapide des ventes d’autobus électriques qui, selon ce constructeur, occuperont 20 % du marché européen des véhicules neufs en 2020, 50 % en 2025 et 60 % en 2030. Pour les VUL, les parts de marché de l’électrique seraient deux fois plus faibles avec 10 % en 2020, 25 % en 2025 et 35 % en 2030. Quant aux camions électriques, leurs ventes seront très dépendantes des réglementations locales, mais pourraient atteindre 10 % du marché en 2024, 50 % en 2029 et même 95 % en 2040 ! Ce dernier chiffre est très surprenant car il fait fi des autres solutions alternatives aux carburants fossiles, fondées sur la valorisation de la biomasse. Pour faire basculer le marché, le groupe VW considère que les grands groupes de transport auront un rôle essentiel. Il faut toutefois pour cela qu’ils y aient un avantage économique. Or, le TCO n’est pas le point fort des véhicules électriques tels qu’ils sont envisagés à court terme. Ce seront donc les contraintes réglementaires qui feront évoluer le marché, ou pas. Afin de réduire les coûts, la mutualisation est souhaitable. Il y a donc une certaine communauté de conception entre la chaîne cinématique des autobus électriques que MAN présentera le 12 juin prochain à Paris, et les camions électriques de la marque. Alors que les autobus électriques MAN devraient être produits en série à partir de 2019, il faudra attendre 2021 pour qu’il en soit de même des camions électriques MAN. Les premiers exemplaires de ces derniers doivent faire l’objet d’essais en flotte dès cette année dans les entreprises membres du CNL (Council für nachhaltige Logistik, conseil autrichien pour la logistique durable).

Le programme subit visiblement des retards car MAN annonçait en février 2017 le début des essais pour novembre 2017 par neuf membres du CNL (Gebrüder Weiss, Hofer, Magna Steyr, METRO, Quehenberger, REWE, Schachinger, SPAR et Stiegl) à raison d’un véhicule expérimental pour chacune de ces entreprises. A propos de Magna Steyr, ce constructeur automobile utilisera un camion électrique MAN pour la logistique interne de son site de Graz (Autriche). Toujours en février 2017, le début de production de l’eTGM, version électrique du TGM, était annoncé pour fin 2018 mais semble subir un contretemps. Quant au VUL électrique de MAN, l’eTGE, il sera produit en série à partir de juillet 2018. Au cours de sa phase de lancement, il s’adressera prioritairement aux flottes et sera fourni avec les services de conseil nécessaires à son intégration aux parcs existants. L’eTGE arrive sur un marché déjà occupé par le Renault Master ZE, l’Iveco Daily électrique et par le Gruau Electron II.

Priorité à la charge nocturne

Directeur général de MAN France, Jean-Yves Kerbrat déclare « MAN a travaillé avec deux-cents de ses clients. Leurs commentaires et ceux des villes nous amènent à conclure que pour un emploi quotidien, priorité est donnée à une utilisation ininterrompue, sans recharge intermédiaire. De plus, l’augmentation rapide des performances des batteries permettra dans un proche avenir d’atteindre des niveaux d’autonomie adaptés aux besoins des livraisons urbaines ». Après l’enthousiasme suscité par l’OppCharge qui autorise une faible capacité de batteries au prix d’une multiplication des points de recharge sur les zones de circulation, le principe de réalité l’emporte. En effet, rares sont ceux qui souhaitent investir dans un saupoudrage de stations de recharge « par biberonnage » à travers la ville. Jean-Yves Kerbrat poursuit « Il subsiste un certain nombre de questions concernant la disponibilité de l’énergie et l’infrastructure de recharge. MAN considère la normalisation des interfaces et celle des technologies de recharge comme un challenge important qui n’a pas encore été vraiment résolu. C’est pourquoi le groupe VW est impliqué dans les travaux du CharIn (Charging Interface Initiative) et soutient les activités du Comité européen de normalisation en électronique et en électrotechnique (CEN/CENELEC). L’objectif est de capitaliser sur le lancement réussi de l’interface CCS (Combined Charging System) pour les voitures particulières et de promouvoir la standardisation de la recharge dans les centre-villes, d’abord pour les bus électriques, puis pour les camions électriques. MAN participe activement aux échanges entre fabricants à travers les comités de l’association allemande de l’automobile (VDA), l’association des entreprises de transport allemandes (VDV) et l’Union internationale des transports publics (UITP). »

De la camionnette au tracteur de distribution

L’eTGE est un VUL électrique dont l’autonomie atteint 160 km en conditions optimales (20 kW/100 km) et dont la charge utile varie entre 900 et 1 700 kg pour un PTAC compris entre 3,5 et 4,25 t. Le moteur électrique synchrone à aimants permanents de l’eTGE délivre jusqu’à 100 kW et 290 Nm. Le véhicule atteint 90 km/h, mais il est plutôt prévu de l’utiliser à des vitesses plus faibles, conformes à celles du trafic urbain. La batterie stocke 36 kWh et MAN annonce qu’elle n’aura perdu que 15 % de sa capacité de recharge après 2 000 cycles charge-décharge correspondant à dix ans d’utilisation. La batterie est modulaire et peut être remplacée par sous-ensembles. Cette batterie est compatible avec la charge rapide (recharge à 80 % en 45 minutes avec une prise 40 kW) autant qu’avec la charge lente depuis une prise domestique. Pour ses batteries, le groupe VW utilise la technologie de batterie lithium-ion NMC (nickel, manganèse, cobalt) et adapte ses packs et leur refroidissement aux différents domaines d’utilisation. Pour la distribution lourde, MAN prévoit un tracteur 4x2 ainsi qu’un porteur à trois essieux 6x2*4 (6x2-4 selon la notation MAN) susceptible d’être carrossé avec un fourgon sec, avec une caisse frigorifique dotée d’un groupe de réfrigération électrique ou encore, avec des supports swap pour conteneurs. Le montage d’un hayon repliable ou rétractable est prévu dans le porte-à-faux arrière (2,375 m). Tous ces véhicules sont apparentés à la gamme TGM. Ils reçoivent une suspension pneumatique intégrale. Celle-ci est justifiée par la sensibilité aux chocs et aux vibrations des packs de batteries. Techniquement, ce sont ces derniers qui différencient les versions tracteur et porteur. A bord de ces camions, les accumulateurs sont placés dans le volume habituellement affecté au moteur thermique ainsi que dans l’empattement, à l’extérieur des longerons. Le châssis court du tracteur, limite la capacité à environ 135 kWh (8 packs) alors que le porteur accueille quelque 200 kWh (12 packs) grâce à son empattement qui atteint 4,725 m. En conditions idéales, le constructeur annonce 190 km d’autonomie pour le porteur et 130 km pour le tracteur. La recharge peut s’effectuer avec une borne distribuant du courant alternatif (400 V). Dans ce cas, la puissance admissible est limitée à 22 kW. En revanche, la charge rapide depuis une borne 150 kW est possible avec une borne distribuant du courant continu (800 V). La température des batteries est contrôlée par la circulation de liquide de refroidissement (eau et glycol). Le porteur a un PTAC de 26 t. Il n’est pas prévu pour remorquer et sa charge totale (carrosserie et charge utile) atteint 15,5 t. Quant au tracteur, son PTRA s’élève à 32 t (PTAC 16 t avec 8 t de report de charge sur la sellette). Il se destine à la traction de semi-remorques de distribution urbaine pesant 24 t en charge. Le moteur électrique de ces camions est de type synchrone à aimant permanent. Il fonctionne à un régime maximal de 4 100 tr/min et développe une puissance de 250 kW (340 ch) en utilisation normale ainsi qu’un couple de 2 100 Nm. Ponctuellement, ces valeurs peuvent atteindre 350 kW (476 ch) et 3 500 Nm. Naturellement, tous les auxiliaires sont entraînés électriquement qu’il s’agisse du compresseur de climatisation, des pompes d’assistance hydraulique ou du compresseur d’air. Le prix des eTGM n’a pas encore été communiqué. MAN annonce cependant que les véhicules d’une part, et leurs batteries d’autre part, pourront être achetés, loués ou faire l’objet d’un leasing. Forcé par les réglementations locales, le camion électrique trouvera probablement sa place dans le paysage urbain au cours des prochaines années. Il lui manque encore une source d’électricité effectivement verte ainsi qu’un réseau de moyens de recharge adapté. C’est bien sur ces deux points que la propulsion électrique pourrait achopper. Pour les constructeurs, ce ne serait pas une mauvaise nouvelle car cela leur laisserait le temps, non seulement de peaufiner leurs solutions techniques, notamment celles des batteries, mais aussi de faire valoir les vrais avantages environnementaux des solutions non électriques.

MAN et l’hydrogène

Depuis le milieu des années 1990, MAN et le groupe VW ont expérimenté des générateurs de courant électrique fondé sur des piles à combustible fonctionnant à l’hydrogène. A propos de l’hydrogène le Dg de MAN France, Jean-Yves Kerbrat, déclare « Nous regardons de près les développements du marché et nous étudions comment cette technologie pourrait être déployée auprès des clients d’une manière économiquement viable en considérant le coût total de détention et l’infrastructure nécessaire. Si le zéro émission est vraiment l’objectif, alors la solution hydrogène aura un potentiel ». Sur ce dernier point, il faut rappeler que la production d’hydrogène est énergivore. Il faut donc disposer d’électricité verte pour produire un hydrogène qui serait réellement respectueux de l’environnement.

Le MAN eTGE, jumeau du VW eCrafter

Le VW eCrafter pèse 2,5 t à vide et offre un volume utile de 10,7 m3 (L3H3). Il est entraîné par un moteur électrique E85 développant 100 kW et dispose d’une autonomie de 160 km selon cycle européen NEDC. Sa recharge est possible avec du courant alternatif (7,2 kW) ou continu (40 kW). Dans ce second cas, la charge rapide est possible. Les premiers exemplaires sont en test chez les clients depuis fin 2017, la production en série étant prévue pour l’été 2018.

En 2020, Volkswagen lancera un camion léger électrique

Complétant par le haut le Fuso eCanter, le VW e-Delivery est un camion électrique de moyen tonnage développé par la branche brésilienne de Volkswagen. Avec un PTAC compris entre 9 et 11 t, il offre une charge utile comprise entre 4,5 et 6,7 t. Son moteur WEG AL160 de 80 kw (109 ch) est alimenté par une batterie LiFePO4 offrant jusqu’à 200 km d’autonomie. Le freinage par récupération d’énergie se caractérise par le dosage permis par les trois crans du ralentisseur. En test chez des clients brésiliens à partir de 2018, l’e-Delivery sera commercialisé en 2020. A ce jour, seule sa diffusion au Brésil a été annoncée, mais il est évident qu’il trouvera sa place en Europe si le marché le demande.

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