Il y avait du beau monde le soir du vendredi 16 septembre à Verlinghem (Nord) : Damien Castelain, le président de la Métropole Européenne de Lille, avait effectué le déplacement en compagnie de quelques élus. Des entrepreneurs bien connus du transport régional également : Michel D’Haenens, Patrice Depaeuw, Philippe Bailly… Au total, 150 personnes étaient réunies. L’objet de cette rencontre : les quarante ans des Transports Sion. « C’est un tournant de la vie, même dans le cas d’une entreprise, indique Jean-Marc Desmedt, P-dg. Nous voulions montrer à nos clients, à nos fournisseurs et à nos collègues que nous nous portons bien. Et que nous sommes toujours là. » Si les Transports Sion font partie du paysage, parfois, on a tendance à oublier qu’ils existent. Ou on ne les voit plus trop, déplore le président, accompagné de Ludovic Vanoverschelde, directeur général. Ce n’est pas forcément un mal. Ça veut aussi dire que l’entreprise d’Houplin-Ancoisne, à deux pas de Lille, a su traverser les décennies. Celle-ci possède une histoire classique : un fondateur, André père, qui livre du grain et se retrouve sollicité pour faire du transport au retour ; un fils, André toujours, qui développe l’activité transports en s’orientant vers la distribution. Puis, en 2006, le changement de régime, l’année des 30 ans. André Sion atteint l’âge de la retraite et décide de vendre l’entreprise. Patrick Bouchez et Jean-Marc Desmedt se portent alors acquéreurs, avant que ce dernier n’en prenne la présidence en 2010.
Évidemment, ces 40 ans n’ont pas été un long fleuve tranquille. La société familiale a connu son lot de difficultés, notamment entre 2007 et 2009. À l’époque, l’équipe précédente décide d’ouvrir une nouvelle agence à Rouen. Mauvaise pioche. Elle fermera au bout de deux ans, conduisant au licenciement de la quinzaine de salariés normands qui y travaillaient. Cette expérience malheureuse, loin des bases nordistes, convainc les deux nouveaux hommes forts de l’entreprise, Jean-Marc Desmedt et Ludovic Vanoverschelde, de ne pas se disperser et de miser sur la proximité. Un maître mot chez Sion : « Je ne suis pas persuadé qu’en transportant loin, on gagne beaucoup d’argent, analyse Jean-Marc Desmedt. Sur des longues distances comme l’Espagne ou l’Italie, nous sommes incapables de rivaliser au niveau des prix avec les transporteurs étrangers. Faisons notre métier là où nous savons le faire : dans la grande région, c’est-à-dire sur des axes Lille-Rouen, Lille-Paris, Lille-Est pour des lots et demi-lots. » Les Transports Sion sont également présents dans la distribution dans les Hauts-de-France et les Ardennes, avec un portefeuille global de 300 clients. Une vingtaine d’historiques représentent 60 % du chiffre d’affaires : Total Lubrifiants, Air Liquide, DSM Food Spécialities, Aldi Marché, etc. « Nous œuvrons dans les secteurs de la grande distribution, l’industrie, dont le pétrochimique, l’agroalimentaire, la distribution, l’horticulture, l’environnement, l’imprimerie, etc. Nous exploitons également une activité de sous-traitance ». Un autre secteur d’activités devrait s’ajouter à cet inventaire ces prochaines années : le recyclage et les transports de déchets. « D’où cette notion de proximité, renchérit Jean-Marc Desmedt. On ne transporte pas du déchet sur mille kilomètres ». Ce choix de développement correspond à l’ADN du président, déjà actionnaire d’autres sociétés nordistes spécialisées dans le recyclage et le déchet. « Je connais ce métier, je possède quelques contacts, autant en profiter. » Des investissements seront bien évidemment nécessaires, par la création d’une branche dédiée avec des véhicules spécifiques.
Si le développement dans le secteur environnemental fait partie des prochaines échéances de la société, qui est passée de 90 à 110 salariés en dix ans, ce n’est pas la seule. Les Transports Sion ne manquent pas de défis au moment d’aborder cette nouvelle décennie. L’un des plus immédiats consiste à améliorer la performance en termes de traçabilité et d’informatique. Une complète refonte du système d’information est en cours. « Le client veut savoir où se trouve son produit en temps réel. À nous d’être capables de lui répondre précisément. Nous savons faire du transport, nous savons confirmer que nous l’avons bien opéré. Mais notre process d’information doit être développé, avec des outils modernes, comme la géolocalisation. » Dans une société qui a conservé un fonctionnement familial comme Sion, cette évolution doit s’accompagner d’un dialogue avec les salariés, reconnaissent le P-dg et le directeur général. Fini par exemple la photocopie du bon de livraison à trois reprises, « il faut devenir une entreprise en phase avec son époque. Du coup, les habitudes vont changer, mais ce temps gagné avec le système d’information nous permettra de nous concentrer sur d’autres tâches : le développement commercial en fait partie. Aujourd’hui, nous vivons sur nos acquis, avec un travail certes bien fait, mais une société ne peut pas s’en contenter si elle veut être encore présente dans dix ans. » Deadline fixée pour cette refonte du système d’information : fin 2017. Autre projet dans les cartons, à moyenne échéance, un déménagement.
À Houplin-Ancoisne, les Transports Sion occupent encore leur emplacement d’origine, le bâtiment historique en bordure de Deûle. Pour atteindre les grands axes, comme la RN 41, il faut traverser les villes voisines. En 2016, ce n’est plus trop en phase avec l’activité d’un transporteur moderne, analyse le duo. « Chaque camion perd quinze à vingt minutes. Sans oublier les nuisances chez les riverains, moins patients aujourd’hui. Nous devons évoluer vers un autre positionnement géographique, dans une zone, proche des grands axes. Mais rien n’est encore fait. » Les deux hommes sont également attentifs à une autre évolution de leur métier : le développement des transports propres. « Nous le savons : les camions devront être de plus en plus propres, notamment pour accéder aux villes de demain. Les impacts en CO2 sont de plus en plus importants dans les appels d’offres. Et même dépasser l’obligation : « Nous voulons en faire un véritable argument de différenciation. » S’ils n’ont pas encore réalisé les investissements dans les camions au gaz, les Transports Sion n’y voient aucune objection à moyen terme. Mais les prix s’en ressentiront, forcément. « Les clients devront suivre. Certains sont déjà en demande. » C’est une évidence : les Transports Sion n’ont pas l’intention de sombrer dans la crise de la quarantaine.
CA 2015 : 7,8 M€
Effectif : 110 salariés (dont 85 chauffeurs)
Flotte : 30 porteurs, 40 tracteurs, 60 remorques
Activités : lot, 1/2 lot, distribution