Paul-Antoine Jung, vous avez pris en janvier 2023 les rênes du groupement après le décès du fondateur du groupement Joël Vigneron en décembre 2022, Olivier Perrin, vous succédez à Jean-Christophe Edy, directeur de réseau qui prend sa retraite. Comment s’organise la nouvelle direction ?
Paul-Antoine Jung : Nous sommes sur une continuité. Nous n’avons pas le but de révolutionner l’ADN de Tred Union. Nous avons gardé l’esprit, tout en y apportant des évolutions sur l’organisation. Nous avons ajouté des points plus formels qu’avant, par exemple, en plus de nous voir régulièrement, nous organisons deux grandes réunions par an entre nous deux : l’une pour déterminer les objectifs et l’autre en fin d’année pour voir si le cap fixé a été tenu. Cette organisation nous permet de fonctionner confortablement. La stratégie proposée par le président est discutée en CODIR, validée par l’assemblée générale puis communiquée à l’ensemble des adhérents
Olivier Perrin : Sur le plan opérationnel, la transition est plus aisée de mon côté car Jean-Christophe m’accompagne encore jusqu’à la fin de l’année. À travers cette transmission, les rôles s’établissent de plus en plus. Nous échangeons dans un esprit de bienveillance mutuelle. Notre binôme avec Paul Antoine se construit petit à petit au fil des événements qui sont nombreux chez Tred Union. Sa stratégie pour notre groupement est claire, les adhérents connaissent la direction à suivre et il sait trouver les mots et faire passer les messages avec efficacité et toute l’aisance nécessaire pour le faire en douceur même lorsque le sujet est sensible comme la décarbonation de nos adhérents. C’est agréable d’œuvrer ensuite pour animer le groupement dans cette ligne de conduite. Il laisse aussi de la place à la création et aux propositions de nouvelles animations, c’est appréciable pour l’opérationnel que je suis. Et j’ai la chance d’avoir en la personne de Jean-Christophe Edy, qui a construit l’organisation du groupement au côté de Joël qui était un visionnaire, le guide parfait pour la passation de témoin. Tred Union ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui sans ces deux grands hommes et notre tâche ne serait pas aussi aisée sans leur travail préalable depuis près de 15 ans.
Tred Union s’était fixé trois enjeux principaux pour l’année 2023 : se concentrer sur ses adhérents, les fédérer autour de projets communs et booster l’aspect achats via la création d’une cellule dédiée. Où en sont ces trois objectifs ?
O. P. : Le plan de marche est respecté. Une dizaine d’adhérents nous ont rejoints cette année et nous avons également eu des départs en raison de rachats d’entreprises, de départs à la retraite. Mais, conformément à la stratégie proposée par Paul-Antoine, nous ne nous focalisons pas sur le nombre, nous préférons avant tout qu’ils partagent bien les mêmes valeurs. Il reste actuellement une dizaine de zones blanches en France, de départements sans adhérents. Si on les comble, ce sera avec des candidatures de dirigeants qui ont envie de s’investir, d’échanger avec les autres adhérents... Nous nous consacrons en revanche beaucoup aux besoins des adhérents, par exemple en matière d’accompagnement pour la transition énergétique ou en proposant diverses formations. Nous avons également structuré notre cellule achats en recrutant et en définissant les process d’achats. Nous avons ainsi professionnalisé la relation avec les fournisseurs, et nous devrions avoir davantage de partenaires pour le sourcing à l’avenir. Comme nous avons tous à y gagner en achetant ensemble de plus gros volumes, nous poursuivons le travail débuté il y a 18 mois. Notre centrale d’achat se structure, nous avons expérimenté des achats groupés sur des véhicules moteurs et non moteurs, des pneumatiques, des produits d’arrimage, des chariots de manutention. Toutes les expériences nous ont confortés dans notre choix de poursuivre cette démarche. Nous avons beaucoup appris de notre expérience et nous recommencerons en 2024 sur d’autres sujets. Si nos adhérents ont des difficultés pour défendre leur prix de vente, ils ont besoin de leur groupement pour mieux acheter pour garder leur marge qui sont réduites.
Vous fixez-vous de nouveaux objectifs pour 2024 ? Quels sont les projets de développement pour le groupement en matière de maillage, d’adhésions, de programmes pour les adhérents, etc.?
P.-A. J. : L’un des gros projets porte sur la partie environnementale. Un partenariat a été conclu avec le cabinet Carbone 4, spécialisé dans la décarbonation des entreprises, pour accompagner nos 79 adhérents, à établir leur bilan carbone. Une dizaine d’entreprises sont déjà en mesure de communiquer sur leur bilan 2022, l’ensemble des adhérents le sera pour le bilan 2023. Je rappelle que l’ensemble des Tred Union ont déjà pris l’engagement dès leur adhésion d’être à minima charté CO2. Pour aller plus loin, l’objectif 2024 pour tous les adhérents est de passer au Label CO2 définit par l’Ademe. Ce passage sera facilité par le travail réalisé pour le bilan carbone. Par ailleurs, certaines entreprises font appel à de la sous-traitance et ne pourront donc pas parvenir à la labellisation mais ont l’obligation de poursuivre leurs efforts au niveau de la charte.
O. P. : Cette année, nous mettons aussi l’accent sur la prévention du risque routier. Sur le coût de l’assurance d’une entreprise, 80 à 90 % concerne le cout de repose sur la gestion de la flotte. Il faut donc améliorer nos statistiques, diminuer notre fréquence d’incidents pour présenter de meilleurs bilans aux assureurs. Et nous poursuivons cette année le développement de la partie achats et fédérer nos adhérents pour acheter ensemble lorsqu’on a des besoins. Par exemple, sur l’activité logistique, comme tous nos adhérents possèdent des espaces de stockage couverts, nous avons un volume total, 1,4 million de m2, qui nous permet de négocier certains coûts.
Comment recrutez-vous les nouveaux adhérents ? À quels critères un dirigeant doit-il répondre pour pouvoir devenir adhérent ?
O. P. : Tred Union, c’est avant tout un partage de valeurs communes décrite dans notre PACTE (autour des valeurs de Participation, Acceptation, Communication, Talent et Écologie) par des hommes et des femmes qui ont une envie dévorante de se confronter, de partager, de se rassurer, de découvrir avec leurs homologues métiers, mais aussi de se former. Tous ces échanges entre adhérents se réalisent lors de nos animations en commission thématique, réunion fonctionnelle, réunion de secteur régionale, séminaire de cohésion ou encore formation. Une chose est certaine, Tred Union n’est pas construit pour une entreprise qui ne veut pas bouger et se chalenger.
La multiplication des opérations de concentration dans le secteur du TRM vous inquiète-t-elle ?
O.P. : Avec le contexte économique actuel, le secteur du TRM va inévitablement se concentrer. Les dirigeants vont forcément vouloir s’armer pour être moins vulnérables sur le marché. Chez Tred Union, nous avons aussi observé des fusions-acquisitions. Certaines même entre adhérents, comme cela a été le cas avec les Transports Blanchard-Coutand (TBC) et par le groupe Douaud. La question s’est posée dans le cas d’un rachat d’un adhérent par un groupe, de pouvoir rester dans le groupement, mais ce n’est pas dans l’ADN de Tred Union de conserver un adhérent qui intègre un groupe d’envergure même si les attaches sont fortes avec ses représentants.
Par rapport à la conjoncture actuelle, les adhérents vous ont-ils fait part d’une baisse d’activité ? Comment Tred Union a-t-il aidé les transporteurs face à l’inflation au niveau des achats ?
P.-A. J. : La conjoncture économique n’a clairement pas été favorable pour le transport. À cela s’ajoute l’inflation des coûts pour les entreprises. Pour tenter de réduire les charges de nos adhérents, nous leur avons proposé de mutualiser davantage d’achats notamment sur les véhicules, les pneumatiques et les supports d’arrimage. Et les prix – qui ont augmenté bien plus que de raison - devront être revus à la baisse ! Nous avons l’intention de fédérer les adhérents sur les achats lors de nos futurs appels d’offres, afin de répondre à leurs besoins. Nous devrions pouvoir progresser sur la partie Achats pour la fourniture d’emballages et de conditionnements ainsi que d’équipements de sécurité (extincteurs, etc.).
Y a-t-il des postes sur lesquels vos adhérents vous ont fait des remontées particulières en matière de besoins ?
P.-A. J. : Nous avons constaté que bon nombre d’adhérents ont vu une hausse démesurée voire une résiliation de leur assurance flotte, alors qu’il n’y a aucune sinistralité correspondante. Nous pensons que le transport paie pour l’ensemble des autres secteurs atteints par la recrudescence des catastrophes naturelles. Nous devons accompagner les adhérents sur le sujet, et nous allons proposer dans le courant du premier semestre une solution novatrice pour ne plus subir la situation. En parallèle, Nous allons négocier avec les courtiers d’assurances pour des protections spécifiques au TRM telles que les marchandises transportées, l’assurance des véhicules en leasing ou encore l’assurance dépannage des véhicules.
O. P. : À mon arrivée, j’ai mis en place une commission QSE (Qualité sécurité environnement) qui est composée principalement de préventeurs embauchés par les adhérents. On travaille sur la mise en place d’indicateurs de performance qui seront déployés dans les entreprises pour montrer aux assureurs que nous mettons le maximum d’actions de contrôle en place pour réduire la sinistralité. Nous organiserons également une journée dédiée (Tred Road Safety Truck) le 4 octobre, pour animer des ateliers sur les risques routiers chez tous nos adhérents.
En 2019, le groupement Tred Union avait noué un partenariat avec Logcoop pour une meilleure représentation en Europe. Où en est cette collaboration ? Le groupement souhaite-t-il renforcer ses actions au niveau européen ?
P.-A. J. : Pour ne rien vous cacher, le partenariat n’a pas réellement été fructueux pour Tred Union. C’était davantage Logcoop qui nous avait sollicité que l’inverse. Le groupement a toujours la volonté de s’ouvrir à l’Europe, notamment pour accompagner nos adhérents dans le développement à l’international (Royaume-Uni, Espagne, etc.). Nous avons d’ailleurs des adhérents déjà présents à l’international, comme Verploegen aux Pays-Bas et Rigoni en Espagne. Cette année TC transport a ouvert en Angleterre et rejoint Euro Chanel qui y est déjà présent depuis de longues années. Nous restons également ouverts à accueillir des adhérents étrangers. Nous avons d’ailleurs reçu des candidatures provenant de l’Italie. En tant que groupement, Tred Union permet aux dirigeants de ne pas rester seuls face à certaines problématiques, notamment la transition énergétique. Outre l’accompagnement vers le label Objectif CO2, quelles autres actions menez-vous en la matière ?
En tant que groupement, Tred Union permet aux dirigeants de ne pas rester seuls face à certaines problématiques, notamment la transition énergétique. Outre l’accompagnement vers le label Objectif CO2, quelles autres actions menez-vous en la matière ?
O. P. : Plusieurs commissions ont été mises en place sur différents sujets. Par exemple, beaucoup d’adhérents s’intéressent aux investissements en photovoltaïque, à la mise en place d’ombrières, à l’implantation d’éoliennes verticales. Nous nous penchons donc sur le sujet. Un autre thème revient régulièrement : le financement de la transition énergétique. Il y a des aides mais beaucoup sont passés à côté, car c’est une vraie nébuleuse, avec des interlocuteurs différents à chaque fois… Notre but est de leur donner des réponses. Des adhérents ont aussi peur de se lancer, se posent des questions. Pour les accompagner, nous organisons des réunions avec des prestataires spécialisés pour qu’ils leur présentent leurs offres disponibles et les informent sur ce qui existera demain. Et nous mettons aussi en place des formations pour les collaborateurs, notamment les exploitants et les commerciaux, pour qu’ils deviennent plus efficients sur la rentabilité de l’exploitation par rapport aux énergies alternatives et qu’ils apprennent à vendre ces nouvelles solutions aux chargeurs.
P.-A. J. : Nous notons surtout qu’il n’y a aucune incitation réelle à la transition énergétique. Par exemple, concernant les biocarburants, il n’y a pas d’aide : pas de baisse d’impôt, la TICPE n’est pas réduite. Il y a bien un suramortissement mais qui compense à peine le surcout du matériel. Il faudrait être beaucoup plus ambitieux pour atteindre la neutralité carbone. J’avais été très déçu d’entendre des politiques soutenir que les transporteurs étaient à la traine, alors que nombre d’entre nous se lancent tous les jours, sans aucune aide ! Pour exemple, La majorité des adhérents de Tred Union ont déjà investi dans une énergie alternative type B100, HVO/XTL, biogaz ou encore électricité.
Tred Union a fait de la formation des salariés mais aussi des dirigeants une force. Quels sont les programmes qui ont été développés en 2023, et quels sont les projets en la matière à venir ?
O.P. : L’offre de formation chez Tred Union a fortement progressé, avec pas moins d’une douzaine de modules créés en 2023 pour que nos adhérents puissent faire face à tout type de situation. Nous avons notamment monté des formations sur des thématiques particulières parmi lesquelles le harcèlement au travail ou la gestion de crise. Nous répondons aux besoins que les adhérents nous remontent. Ainsi, nous avons proposé une formation sur l’optimisation de la communication en entreprise, qui s’appuie sur des illustrations du code de la route. Nous avons également proposé des formations métiers, notamment pour les conducteurs, sur les opérations professionnelles (bâchage/débâchage, chargement/déchargement, accroche/décroche). La volonté de Tred Union étant d’offrir un large panel de formation – présentiel, e-learning, avec du training le plus souvent possible – sur un large panel de sujets pour l’ensemble des collaborateurs de nos adhérents.
Repères Tred Union
Création : 2008
Nombre d’adhérents : 79
Nombre de sites cumulés : 160
Chiffre d’affaires cumulé : 1,7 Md €
Nombre de salariés cumulés : 10 000
Nombre de cartes grises moteurs cumulées : 7200
Nombre de cartes grises non moteurs cumulées : 10 000
Surface de stockage couvert cumulée : 1,4 M m2