Hors de la formation, point de salut

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Favoriser l'insertion de personnes handicapées dans les entreprises de transport, c'est l'expérience tentée en Indre-et-Loire par Manpower, l'ANPE et l'association CAP Emploi. Pour un résultat mitigé.

Tordre le cou aux stéréotypes. Tel est le leitmotiv de Brigitte Martinenghi, de l'association Cap emploi, spécialisée dans l'insertion des travailleurs handicapés. « Contrairement à une idée largement répandue, c'est moins la condition physique qui fait obstacle à l'intégration des travailleurs handicapés dans le monde de l'entreprise que le manque de qualification », affirme Brigitte Martinenghi. Et de préciser : « 80 % des personnes handicapées en âge de travailler ont un niveau 5 de formation, c'est-à-dire équivalent au CAP ». D'où l'intérêt de leur proposer des métiers requérant de faibles qualifications et offrant des débouchés significatifs. Une pénurie de conducteurs poids lourds en Indre-et-Loire est ainsi à l'origine d'une action de formation (permis C plus FIMO) conduite par les agences de Manpower de Chinon et Langeais (37), en partenariat avec l'ANPE de Chinon et Cap emploi. « En nous penchant sur les secteurs en manque de bras, il nous a semblé plus facile de proposer aux travailleurs handicapés de suivre une formation de conducteur que de maçon », estime Patricia Tournois, directrice de l'agence de travail temporaire de Chinon.

Convaincre.

Restait à convaincre les employeurs de jouer le jeu. La loi du 10 juillet 1987 impose certes aux entreprises de plus de 20 salariés l'obligation d'embaucher des handicapés à hauteur de 6 % de leur effectif, en contrepartie d'aides directes. Mais dans la pratique, elles préfèrent généralement verser une contribution dite « volontaire », calculée sur l'effectif de la société et pouvant aller de 300 à 500 fois le smic horaire par travailleur « manquant ». En somme, plutôt payer que de recruter des salariés jugés moins performants et plus difficiles à intégrer que les autres. En la matière, les transporteurs routiers ne font pas exception. « Beaucoup d'entreprises nous rient au nez lorsqu'on leur propose les services de travailleurs handicapés. Nous avons beau leur expliquer que tous les handicapés ne circulent pas en fauteuil roulant, elles ne veulent rien savoir », déplore Patricia Tournois. Pourtant, seuls 5 % des handicapés sont dans ce cas, la plupart étant affublés d'un handicap « léger ». Il s'agit donc de convaincre les chefs d'entreprise que ces personnes, une fois formées, sont a priori aussi efficaces que les salariés valides. « Notre rôle consiste à présenter des candidats aptes et dont le handicap soit compatible avec le poste à pourvoir », explique Brigitte Martinenghi pour Cap Emploi. Malgré les difficultés, quelques entreprises ont accepté d'accueillir des travailleurs handicapés à l'issue de leur formation. Laquelle a été financée pour moitié par Manpower et pour l'autre par l'AGEPHI, l'organisme qui gère le fonds d'insertion professionnelle des travailleurs handicapés.

Deux candidats au final.

L'ANPE a sélectionné 80 candidats, en fonction de critères de motivation et d'adaptation aux contraintes du métier. Une réunion d'information, à laquelle s'est présentée une vingtaine de personnes, a ensuite été organisée. Après un entretien individuel, quatre d'entre elles correspondent aux profils recherchés. Deux candidats sont finalement retenus, après une visite médicale et au terme d'un parcours sélectif. « Le métier de conducteur est très exigeant sur le plan physique, il faut être capable de rester assis pendant 12 heures, justifie Brigitte Martinenghi. C'est pourquoi il nous arrive fréquemment de réorienter certaines personnes vers des métiers de la logistique, moins éprouvants ». Le bilan s'avère excellent pour l'un des candidats et mitigé pour l'autre. Ce dernier, qui souffre de tremblements des mains, n'a pas trouvé d'employeur bien qu'il ait été déclaré apte à la conduite et soit détenteur du permis et de la FIMO. Djamel Bekhti a eu plus de chance. « La réussite est totale », s'enthousiasme Patricia Tournois. Djamel Bekhti boite légèrement depuis un accident du travail. Avec sa formation, cet ancien maçon, peintre carrossier de formation a pu travailler à nouveau dans les travaux publics. L'activité de chauffeur courte distance est en effet pleinement compatible avec son handicap qui l'empêche de rester assis très longtemps. En revanche, la conduite alternée avec les déchargements sur les chantiers lui convient parfaitement. « Cette formation m'a redonné foi en moi-même ».

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