Tout comme le premier paquet européen dévoilé le 31 mai dernier traitait de la route, un éventail de propositions législatives devrait être présenté à l’automne concernant le ferroviaire et les transports combinés. Les professionnels attendent une évolution de leur secteur via la révision de la directive européenne 92/106/CEE, mise en œuvre le 1er janvier 1993. « Alors que le TRM européen a été transformé en 25 ans, le transport ferroviaire de marchandises, lui, ne s’est transformé ni techniquement ni économiquement ni socialement pour se mesurer à armes égales avec le TRM », déplore Yves Laufer, président du Groupement européen du transport combiné (GETC). Il rappelle ainsi qu’une autre directive (91/440/CEE), qui impose la séparation de l’infrastructure ferroviaire de l’exploitation, doit être mise en œuvre par tous les membres de l’Union, comme pour les autres modes de transport aérien, routier, fluvial et maritime. Le rail fait figure d’exception avec deux pays qui résistent à la mise en place d’une règle unique européenne : la France et l’Allemagne.
Ancien dirigeant chez Calberson International et grand défenseur des transports combinés depuis le début des années 2000, Yves Laufer milite en faveur du report modal. Il défend notamment une révision du règlement 96/53 définissant les poids et dimensions des véhicules routiers et des matériels. Il a choisi pour cheval de bataille ce qu’il appelle « l’élimination du chaînon manquant ». « Il s’agit de supprimer les vulnérabilités du modèle de transport actuel, c’est-à-dire les ruptures. Pour reprendre la formule de l’OCDE : l’intermodalité est une intégration, explique le président du GETC. Les ruptures, ce sont les transbordements, les manutentions, les reconditionnements. Elles engendrent pertes de temps, parcours à vide, immobilisations aux frontières… ».
En dehors du transport routier de marchandises, où la semi-remorque et le duo tracteur-conducteur constituent une unité d’œuvre capable d’opérer d’un point A à un point B de façon indépendante, les autres modes mutualisent leurs équipements respectifs au moyen des porte-conteneurs, péniches ou trains. Pour Yves Laufer, la solution consisterait alors à adopter une largeur de référence de 2,60 m pour les semi-remorques et caisses mobiles. Cette largeur uniforme permettrait à l’euro-palette de 1,20 m x 0,80 m d’occuper l’espace disponible, tout comme la palette nord-américaine de 49’’ x 40’’ dans la largeur de 8’64’’, ce qui n’est pas possible avec le conteneur ISO de 8’(2,45 m) de large. « Le TRM s’est imposé partout, dans le monde entier, comme le mode dominant. Il est donc logique que les caisses mobiles en transport combiné et conteneurs s’adaptent au semi-remorque, argue-t-il. L’adoption de cette largeur uniforme permettra de réaliser une intermodalité parfaite entre les quatre modes de surface. Ensuite, afin d’optimiser cette solution, il faudrait opter simultanément comme unité d’œuvre universelle le conteneur 53’x8’6x9’6, soit une longueur de 16,15 m x 2,60 m x 2,90 m, déjà utilisée en Amérique du Nord, qui augmenteraient aussi les capacités d’emport des euro-palettes », précise le président du GETC.
Depuis plusieurs années, Yves Laufer porte son dossier auprès des organisations intergouvernementales telles que l’OCDE, de l’ONU, de l’IRU (organisation mondiale du transport routier), l’UIRR (union internationale pour le transport combiné rail-route)… En janvier 2016, un courrier de la commissaire européenne aux Transports, Violeta Bulc, lui stipulait que la révision de la directive sur le transport entraînerait une consultation publique, l’occasion pour lui de défendre son projet d’introduction d’une nouvelle norme pour les unités de transport. S’il était entendu, son projet fera-t-il l’unanimité pour être adopté ? La réponse n’interviendra sans doute pas avant 2019, le temps que les propositions soient étudiées, discutées et appliquées.