Tout avait pourtant bien commencé ! À l’issue des années 2016-2018, marquées par des grèves, l’année 2019 semblait partie pour figurer parmi les meilleurs exercices du transport combiné rail-route. De trop nombreux événements contraires ont, toutefois, sapé cette croissance à deux chiffres qu’avaient enregistrée plusieurs acteurs du secteur au cours du premier semestre 2019. Les difficultés ont commencé à partir de l’été 2019, avec une coulée de boue sur l’axe France-Italie. Puis des intempéries du côté de Béziers ont provoqué l’arrêt des circulations sur la transversale sud durant plusieurs semaines. Ces interruptions provisoires de circulation ont bien montré la difficulté à mettre en place des itinéraires de substitution. Les mouvements de grève commencés à partir de la première semaine de décembre 2019 ont fini de casser cette belle dynamique.
Les événements contraires se sont poursuivis en janvier 2020 avec la poursuite des grèves et le blocage des grands ports maritimes. Et comme si cela ne suffisait pas, c’est à présent le Covid-19 qui cristallise les inquiétudes pour une durée indéterminée.
Heureusement, l’heure n’est pas au défaitisme, tant les chargeurs et autres transporteurs maintiennent leur confiance dans ce mode de transport. Reportées de quelques semaines, les deux nouvelles liaisons Hupac P400 Anvers-Barcelone et Perpignan-Cologne sont devenues opérationnelles, respectivement en février et mars 2020. D’autres lignes devraient voir le jour tant les besoins de report modal sont importants. Ils seront accompagnés par un plan de relance du fret ferroviaire qui a été présenté à la DGITM (Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer), le 27 février 2020, par l’ensemble des acteurs de la filière. Ce plan, qui doit faire l’objet de négociations tout au long de l’année, comporte un ensemble de propositions fortes qui ne sont pas sans rappeler celles mises en œuvre avec succès en Allemagne et en Suisse.
La première mesure viserait à obtenir un triplement de l’aide à la pince. Elle passerait, ainsi, de 27 à 81 millions d’euros par an ! La seconde proposition, tout aussi emblématique de cette volonté de changer de braquet en faveur du report modal, prévoirait une division par deux du coût des sillons. La question du développement des terminaux de transport combiné étant également de la première importance, un grand plan de financement pour la rénovation/modernisation de ces installations serait également acté. Il comprendrait la création de nouveaux terminaux. Massifier davantage, tel est l’un des autres enjeux du transport combiné. La réponse résiderait dans la multiplication des trains longs de 850 m dont la longueur pourrait être portée à 1 000 m par la suite. Les essais de ce type de trains ayant déjà été couronnés de succès, ce sont les financements qui manquent là encore pour parvenir à cet objectif. C’est une même volonté d’aller plus vite qui prévaut pour une amplification du déploiement du gabarit P400. Les ports français ne sont pas oubliés par le plan de relance, mené en parallèle avec l’élaboration d’une stratégie nationale du fret ferroviaire engagée par le gouvernement. « Il conviendrait, à cet effet, de mettre en place des mécanismes incitatifs pour les opérateurs afin d’encourager le report modal dans les ports français », explique Aurélien Barbé, délégué général du GNTC (Groupement national des transports combinés). Il ajoute : « le 46-tonnes continue de figurer dans nos priorités. Cette dérogation de 5 % en pré ou post-acheminement permettrait de compenser la rupture de charge inhérente à la technique du combiné par rapport au tout routier ». Enfin, l’amélioration de la qualité des sillons dans le fret ferroviaire demeure une attente forte des opérateurs. En attendant, les acteurs de la filière travaillent activement sur les mesures compensatoires liés aux récents mouvements sociaux. Les pertes s’élèvent à plusieurs dizaines de millions d’euros. Les pistes explorées concernent le paiement des sillons. L’arbitrage rendu par le ministère des Transports est attendu dans les prochaines semaines.