Un cariste mieux jaugé

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L'importance du nombre d'accidents dans les entrepôts dus à des chariots de manutention a fait réagir la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie. Depuis janvier 2001, elle a fait transformer l'ancien CCP de cariste en un Certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (CACES). Explicité dans la recommandation R389, le CACES se décline en six formations correspondant à autant de catégories de véhicules. L'occasion de rappeler les principes de bases que doit respecter tout conducteur.

Depuis le 1er janvier 2001, les caristes sont soumis à la recommandation R389 du Comité technique national des industries du transport et de la manutention émanant de la CNAM (Caisse nationale de l'assurance maladie). Adopté en juin 2000, ce nouveau texte annule l'ancien R369 datant de décembre 1994, et crée le Certificat d'aptitude à la conduite en sécurité (CACES). Lequel fixe les modalités du contrôle des connaissances de l'opérateur.

Sur le fond, cette nouvelle disposition ne modifie pas la réglementation précédente : pour être en droit de diriger un véhicule de manutention, le cariste doit toujours être en possession d'une « autorisation de conduite délivrée par son chef d'établissement, sur la base d'une évaluation effectuée par ce dernier... ». Ce document écrit, dont la forme reste libre, est le seul susceptible d'être exigé par l'inspection du travail. Il engage la responsabilité pénale de l'employeur. « Si un cariste a un accident dans un véhicule qu'il n'a pas le droit de manoeuvrer, son supérieur est susceptible d'aller en prison », précise Marie-Françoise Courtin, président délégué général de la Fedimag (Fédération nationale des prestataires logistiques et des magasins généraux agréés par l'Etat). L'autorisation de conduite est établie à la suite d'un bilan médical, et après que l'on se soit assuré que le cariste a connaissance des lieux et des instructions à respecter sur le site d'utilisation : protocole de sécurité, plan de circulation, règles de conduite des chariots...

La R389 diffère de la R369 dans sa manière d'évaluer les connaissances nécessaires au maniement d'un chariot de manutention. Auparavant, seul le Certificat de capacité professionnelle cariste (CCPC) était nécessaire. Il distinguait uniquement deux sortes de chariots : les thermiques et les électriques. Le CACES est plus complexe. Il se décline en cinq catégories d'engins en production - les transpalettes à conducteur porté, les chariots tracteurs et à plateau, trois types de chariots élévateurs spécifiés par leur capacité de charge maximale - et une sixième relative au mouvement de véhicules sans activité de production. Un opérateur polyvalent, maniant régulièrement plusieurs types de matériels, devra donc avoir en poche autant de certificats. « Tous nos opérateurs vont devoir suivre plusieurs stages, se plaint Sylvie Maraux, directrice générale de Ditrans, entreprise de 64 salariés installée à Goussainville (95). Avant qu'ils soient tous en conformité avec la nouvelle recommandation, leur manque de polyvalence va être difficile à gérer ».

Autre changement par rapport au texte antérieur, la R389 sépare l'enseignement et sanction des connaissances. Le stagiaire n'est plus noté au cours de la formation, mais doit revenir pour une dernière journée d'examen. Thierry Ranson, directeur d'exploitation du prestataire logistique Stock Express, revendique son métier de base : « nous ne sommes pas un organisme de formation ! ».

Les autres en pâtissent

Les chefs d'entreprises se plaignent du temps « perdu » à satisfaire ce nouveau dispositif. Parce que d'une part, chaque stage nécessite de trois à cinq jours. D'autre part, leur gestion représente, pour les responsables d'entrepôts, des dizaines, voire des centaines de nouvelles autorisations de conduite à remplir. Un vrai casse-tête pour certains logisticiens. Dans l'optique de simplifier le système, l'AFT-IFTIM (Association pour le développement de la formation professionnelle dans les transports), entre autres organismes de formation, propose des forfaits dispensant les enseignements 1, 3 et 5, adaptés aux matériels les plus usités. « Autour d'un tronc commun théorique, nous inculquons les connaissances pratiques correspondant à chaque catégorie de chariot », explique Daniel Grasset, responsable développement de l'AFT-IFTIM. Le candidat, pour obtenir son certificat, devra avoir une moyenne de 7/10 en théorie comme en pratique. « L'ensemble du dispositif peut être réalisé au sein même de l'entreprise », précise Daniel Grasset.

Depuis dix-huit mois, Stock Express a, bon gré mal gré, commencé à organiser la formation de tous ses opérateurs. Si Thierry Ranson se plie au système, il regrette pourtant de ne pouvoir procurer aux autres employés les enseignements dont ils ont besoin. Des modules informatiques sur logiciel Excel, notamment. « Tout notre budget formation passe dans celle des caristes ». Le CACES revient de 10 à 15 % plus cher que le CCP, selon l'AFT-IFTIM. Un surcoût à mettre sur le compte, d'une part, de la majoration du prix que doivent payer les organismes de formation pour obtenir la certification de la Cofrac (Comité français d'accréditation). D'autre part, l'enseignement est devenu multimédia, la partie théorique étant prodiguée sur CD-rom. Plus cher, donc, et c'est le client final qui en paie les frais.

Pour se mettre à jour, les entreprises disposent de quelque temps encore, le CCPC restant valable jusqu'au 31 décembre 2004. En ce qui concerne les nouveaux caristes, les Caisses régionales d'assurance maladie (Cram) recommandent aux employeurs et aux organismes de formation d'effectuer l'évaluation en se rapprochant le plus possible du protocole du CACES. Tout comme le CCPC, celui-ci n'est pas une formation diplômante au même titre qu'un CAP. Il n'existe pas, dans ce domaine, de stage professionnel donnant lieu à délivrance d'un titre reconnu par l'Éducation nationale ou par l'Association de formation professionnelle pour les adultes (AFPA). Le CACES est valable cinq ans. Passé ce délai, le conducteur devra repasser un test d'évaluation. Dans le cas particulier de l'embauche d'un cariste intérimaire, le chef d'établissement ou son ayant droit devra lui délivrer une autorisation de conduite valable dans son entreprise pendant la durée de sa mission.

10 décès en 1998

« La R389 devrait être affichée dans tous les entrepôts », préconise Marie-Françoise Courtin. Elle rappelle que 8 290 accidents sur des chariots de manutention, comprenant un arrêt de travail, ont été constatés en 1998 (1). 529 personnes sont devenues handicapées à vie, et 10 sont décédées la même année. C'est à la suite de ce constat que la CNAM a pris la décision de créer une nouvelle évaluation via le CACES. Selon Hervé Lehembre, directeur ingénierie et exploitation de Giraud Logistics, la première précaution à prendre est de limiter la vitesse de ces engins dangereux. On réduit ainsi les vibrations et donc les risques de renversement.

La recommandation R389 rappelle les principes de sécurité généraux. Il s'agit d'abord d'éviter d'utiliser les chariots à moteur thermique à l'intérieur des locaux. Cependant, en cas d'emploi interne, l'entrepôt doit être suffisamment ventilé pour éliminer les risques présentés par les gaz d'échappement. Concernant le levage de personnes, « il n'est permis qu'avec les équipements de travail et les équipements prévus à cette fin », dit le code du travail (Art. R 233-13-3). Ainsi, certains chariots munis d'un poste de conduite élevable dès la conception tels que les préparateurs de commande et les tri directionnel sont prévus à cet usage. Autre conseil : en cas de chargement d'une remorque par l'arrière, l'opérateur doit s'assurer qu'elle est immobilisée à quai. Il est également tenu de vérifier la tenue du plancher et des parois latérales du véhicule.

(1) derniers chiffres officiels concernant les accidents de travail.

Le CACES en bref

* Six catégories de CACES (Certificat d'aptitude à la conduite en sécurité) ont été créées, selon le type d'engin :

- Catégorie 1 : transpalettes à conducteur porté et préparateurs de commandes au sol. (levée inférieure à 1 m).

- Catégorie 2 : chariots tracteurs et à plateau porteur de capacité inférieure à 6 000 kg.

- Catégorie 3 : chariots élévateurs en porte-à-faux de capacité inférieure ou égale à 6 000 kg.

- Catégorie 4 : chariots élévateurs en porte-à-faux de capacité supérieure à 6 000 kg.

- Catégorie 5 : chariots élévateurs à mats rétractables.

- Catégorie 6 : déplacement, chargement, transfert de chariots sans activité de production (porte engins), maintenance, démonstration ou essais.

Pour les chariots embarqués ou non listés, il faudra que le conducteur possède respectivement le CACES catégorie 3 et 4 avec un complément de formation. Pour les bi et tri-directionnel, à prise latérale et les chariots à poste de conduite élevable, il devra posséder le certificat 5 ajouté d'un test supplémentaire.

- Le testeur doit être une personne physique autre que le formateur.

- L'effectif est limité de 6 à 9 participants par jour pour un testeur.

- L'organisme testeur peut être un organisme de formation ou une entreprise titulaire d'une qualification délivrée par un organisme certificateur de qualité.

- La validation du CACES est de cinq ans.

- Une équivalence CACES est reconnue pour les diplômes d'Etat, titres homologués, en relation avec la conduite de chariots élévateurs et le CCP Cariste définie dans la recommandation R369 ; pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2001. Il existe une possibilité d'équivalence de cinq ans à la date de la formation, pour un examen de conduite (un jour), et un recyclage (un jour) pour la ou les catégories de CACES correspondantes aux engins utilisés en stage. Elle est valable uniquement dans l'établissement du salarié au moment de la formation.

Consignes pratiques

Pour éviter les accidents, il y a la réglementation, mais aussi le bons sens. Huit consignes à suivre.

- Régler le siège à suspension en fonction de sa taille et de son poids.

- Ne jamais circuler avec la fourche en position haute, que ce soit à vide ou en charge.

- Ne pas lever ou circuler avec une charge instable ou mal équilibrée, car le risque de renversement latéral est grand.

- Adapter sa vitesse en fonction de l'état du sol de la charge transportée, de l'itinéraire, du flux de circulation et ralentir aux zones dangereuses sans visibilité : virages, intersections, passages de portes...

- Sur les pentes, en charge, diriger la fourche vers l'amont. Cela pour éviter que la charge glisse de la fourche ou que le chariot bascule vers l'avant.

- Ne pas laisser dépasser de l'habitacle du chariot une partie du corps (bras, jambe, tête...).

- Porter les équipements de protection individuelle suivant les instructions de l'employeur.

- Inspecter les différents éléments du chariot, quotidiennement ou en tout cas avant chaque prise de poste.

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