Sécurité et environnement plaident en faveur du platooning

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Pourquoi et comment le platooning pourrait devenir une technique pertinente pour le transport routier à longue distance ? Illustré par les projets européen ENSEMBLE et français sur l’A63, le 47e congrès ATEC-ITS, les 22-23 janvier à Montrouge (92), a apporté une série de réponses.

Le 8 octobre dernier, au congrès de l’OTRE, Jean-Baptiste Djebbari a annoncé que le platooning pourrait être testé en France dès 2020. Soit l’expérimentation, pour la première fois sur le territoire national, de convois de deux poids lourds ou plus reliés entre eux par une technologie de connectivité et équipés, chacun, d’un système automatisé d’aide à la conduite selon la définition de l’European Automobile Manufacturer’s Association (ACEA). Dans cette perspective, le secrétaire d’État aux Transports avait précisé qu’un décret était à l’étude autorisant ces tests. « Sa publication est imminente », confie Olivier Quoy, directeur général d’Atlandes. Avec plusieurs partenaires, dont l’OTRE et la Région Nouvelle-Aquitaine, le concessionnaire de l’A63 porte un projet de platooning supposant la mise en œuvre préalable d’un cadre réglementaire adapté autorisant la circulation de véhicules à délégation de conduite.

À travers le monde et en Europe en particulier, plusieurs tests de platooning ont déjà été menés. Au moyen d’une circulation rapprochée de véhicules distants d’une dizaine de mètres seulement (contre 50 mètres selon la réglementation en vigueur), ils ont démontré un potentiel d’amélioration de l’efficacité du transport routier de marchandises en termes de sécurité routière, de réduction des consommations et des émissions liées ; dont de CO2 jusqu’à 25 %. Le projet présenté par Olivier Quoy lors du 47e congrès ATEC-ITS croise ces enjeux : « Sur l’A63, nous constatons 80 000 passages “tandem” environ, soit deux poids lourds de la même société passant en moins d’une minute d’intervalle dans la même gare. Soit un potentiel d’environ 20 000 convois par an et par sens ou 80 par jour ouvré. » Sur l’A63, une autoroute récente, Atlandes a mis en place une modulation des tarifs en fonction de la classe Euro des camions ainsi que des dispositifs permettant de suivre leur poids en mouvement, leur nombre d’essieux et leur silhouette. Grâce à ces dispositifs et mesures, le concessionnaire possède une connaissance fine de son flux de poids lourds. « Aujourd’hui, plus de 70 % de ces véhicules sont Euro VI. Depuis 2014, le trafic PL a progressé de 21 % mais les polluants atmosphériques associés ont diminué de 52 % pour les oxydes d’azote (Nox), 45 % pour le monoxyde de carbone (Co), 22 % pour les particules PM2,5 et de 15 % pour les particules PM10. L’enjeu aujourd’hui concerne les émissions de CO2 » … étroitement liées à la consommation des véhicules. En matière de sécurité, le deuxième défi concerne le nombre de camions ne respectant pas la distance réglementaire de 50 mètres : « 10 % des PL ne la respectent pas. »

Contours du projet

Dans l’attente de la publication du décret et des autorisations de circuler en mode « platoon », le test envisagé sur l’A63 vise à réduire la consommation et les émissions de CO2 liées ainsi qu’à sécuriser un flux dont les interdistances ne sont pas toujours conformes à la réglementation. Il comporte trois dimensions dont « la conduite des camions avec l’utilisation d’un radar de régulation des distances paramétré à une distance inférieure à 50 mètres, le reparamétrage à 50 mètres en sortie de la zone expérimentale et la formation des conducteurs », explique Olivier Quoy. Ses autres volets couvrent le suivi et la surveillance du trafic au moyen de plusieurs technologies, et la communication entre les couples conducteur-véhicule et entre les couples véhicule-conducteur et un PC de contrôle. « Les convois testés seront composés d’au moins trois véhicules pour analyser les comportements des camions de tête, du milieu et de queue. » Les tests seront menés sur la partie nord de l’A63 entre les diffuseurs 16 (Labouheyre) et 18 (Saugnacq-et-Muret), soit sur une trentaine de kilomètres, et des observations seront réalisées sur une zone plus étendue entre les diffuseurs 12 et 18. Le déploiement de l’infrastructure sur ces tronçons a fait l’objet d’un dossier auprès de la Région Nouvelle-Aquitaine par un consortium rassemblant NeoGLS, GEOSAT, l’Université Gustave Eiffel (ex-Ifsttar) et Atlandes. « Ce projet sera candidat au programme européen ERTICO. »

Vers un platooning multimarque

Dans sa phase de lancement, il pourra s’appuyer sur les enseignements des autres tests de platooning déjà lancés en Europe et sur les premiers travaux du projet européen ENSEMBLE (ENabling SafE Multi-Brand Platooning for Europe). Présenté par Bernard Jacob de l’Université Gustave Eiffel, « il est piloté par l’association professionnelle néerlandaise TNO. Il rassemble une vingtaine de partenaires : des constructeurs de poids lourds (DAF, Daimler, Iveco, MAN, Scania, Volvo Trucks et Renault Trucks), le CLEPA regroupant les équipementiers européens, Bosch, Brembo, Continental, NXP, Wabco et ZF, et des centres de recherche (IDIADA, Université Gustave Eiffel, KTH et VU Brussel). » Mené dans le cadre du programme ERTICO, ce projet a débuté le 1er juin 2018. Il est doté d’un financement européen conséquent de 20 M€ sur trois ans. Pour une mise en œuvre effective du platooning, « une approche intégrée multimarque est requise ». Tel est l’objet du projet ENSEMBLE. « Il vise notamment à établir un cahier des charges harmonisé du platooning multimarque avec la définition d’un protocole de communication véhicule à véhicule (V2V). »

Démonstration en conditions réelles dès 2021

Pour obtenir une interopérabilité multimarque, un volet important du projet consiste à convenir de normes acceptées par tous les intervenants. Ses recherches porteront sur deux niveaux du platooning : « L’aide à la conduite qui sera déployée par le biais d’une démonstration en conditions réelles de circulation à une échelle transfrontalière, et l’autonomie de conduite qui ne sera qu’étudiée. » À l’issue de ces travaux, ENSEMBLE permettra d’évaluer « les impacts sur la sécurité routière, les infrastructures, l’économie de consommation de carburant et la réduction des émissions associées ». Englobant aussi les effets sur la fluidité du trafic et le comportement des conducteurs, « les bénéfices économiques et environnementaux du platooning seront montrés pour chaque niveau dans un livre blanc qui proposera des spécifications fonctionnelles pour les deux niveaux ».

Après la définition de l’environnement du projet ainsi que des fonctions de communication et logiciels nécessaires en 2019, débuteront dès avril 2020 les essais sur piste en Espagne au moyen de convois multimarques. En parallèle, des études seront menées sur les modèles économiques et les attentes du marché. En 2021, les recherches cibleront les effets du platooning sur les infrastructures avant une étape ultime consacrée à une démonstration du niveau 1 (aide à la conduite) en conditions réelles de circulation annoncée en mai 2021.

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