Redéfinir la logistique inverse

Article réservé aux abonnés

Le ministère allemand de l’Environnement a présenté en août un projet de loi sur les retours (reverse logistics) dans le commerce électronique. L’objectif du texte est de limiter la destruction d’articles renvoyés à l’expéditeur, alors que depuis des mois, une polémique sévit dans le pays à ce sujet.

La Bevh (fédération du commerce électronique et de la vente par correspondance) est soulagée. Le projet de loi sur les retours, présenté en août par la ministre de l’Environnement, la sociale démocrate Svenja Schulze, est moins restrictif que ce que redoutait le secteur. La fédération se félicite tout particulièrement du fait que le projet n’interdit pas purement et simplement la destruction des articles retournés. L’objectif de la loi est d’obliger les professionnels à maintenir et conserver les articles invendus en état d’être revendus, et d’éviter de recourir à la destruction pure et simple par souci de rentabilité. Le texte prévoit d’obliger le secteur à tenir protocole de sa politique d’invendus.

Poids des Verts

Les Verts – dont le poids électoral ne cesse d’augmenter dans le pays – S’étaient dits favorables à l’interdiction pure et simple de la destruction d’articles invendus, après l’éclatement d’une polémique à ce sujet en juin 2018, alors que la chaîne de télévision publique ZDF diffusait un reportage consacré à la politique des retours d’Amazon en Allemagne. Des salariés interrogés de manière anonyme rapportaient passer leur journée à détruire à la broyeuse quantité d’articles « en bon état » retournés par les clients : réfrigérateurs, machines à laver, téléphones portables et tablettes, matelas et meubles seraient détruits à grande échelle, lorsque les clients renvoient l’article à l’expéditeur dans un délai de quatorze jours comme les y autorise la loi allemande, sans qu’ils aient à en justifier la raison. Toujours selon les salariés, l’entreprise estimerait que détruire purement et simplement les invendus coûterait moins cher que de les remettre dans le circuit de la vente. Amazon dément alors l’information. Quelques mois plus tard, une étude publiée par l’université de Bamberg relativise les déclarations des salariés d’Amazon. Selon l’université, 280 millions d’articles sont retournés chaque année en Allemagne – numéro deux mondial de la vente sur Internet derrière la Chine – à l’expéditeur, soit un paquet sur six.

Pour certains types de produits comme les vêtements et les chaussures, le taux de renvoi atteint même 50 %. Certains géants du secteur, tels Zalando (ancienne start-up de 15 000 salariés et 5,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires) ou About You ont fait d’une politique de renvois très favorable au client l’une des caractéristiques de leur modèle commercial. Au grand dam des défenseurs de l’environnement.

« Notre société de consommation détruit toujours plus de ressources et accélère la crise climatique », estime Viola Wohlgemuth, spécialiste de la consommation de Greenpeace. Selon les calculs de l’association, les articles renvoyés sont responsables en 2018 de 238 000 tonnes de CO2, « l’équivalent de 2 200 trajets en voiture entre Hambourg et Moscou ».

20 euros par retour

Les articles retournés coûtent également cher aux entreprises. Sa politique indulgente est rendue responsable par les économistes des mauvais résultats de Zalando au troisième trimestre de l’année passée. En moyenne, les retours coûtent 20 euros à l’expéditeur : 10 euros pour le transport et 10 euros pour la manutention. Dans bien des cas, jeter l’article plutôt que le remettre en rayon est perçu comme plus économique. Certains articles, tels les matelas, ne peuvent être remis dans le circuit de vente pour des raisons d’hygiène.

Selon les calculs de l’université de Bamberg, 3,9 % des 280 millions d’articles renvoyés par l’expéditeur sont détruits, soit 11 millions d’articles. La société de conseil EHI Retail Institute estime, à la suite d’un sondage auprès des professionnels du secteur, que 70 % des articles renvoyés retournent dans le circuit commercial. Amazon affirme ne détruire que 0,05 % des articles retournés. Le reste serait vendu au rabais par le biais de plateformes type eBay, à des grossistes spécialisés dans les articles avec défauts, à l’étranger ou donnés à des associations de bienfaisance. La loi allemande limite cette possibilité, tout don en nature étant soumis à la TVA. Les professionnels du secteur demandent au ministère des Finances de réformer la loi fiscale à ce sujet, comme c’est déjà le cas pour les biens alimentaires, exonérés de TVA en cas de dons.

Actualités

Actualités

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15