La fonction de porte-parole n’est pas une mission aisée. Surtout comme l’a reconnu Louis Nègre, sénateur (LR) des Alpes-Maritimes, lorsque le transport n’est pas « la priorité des priorités » de l’élection présidentielle. Est-ce la raison pour laquelle l’écurie de Benoît Hamon, vainqueur de la primaire socialiste, était aux abonnés absents lors de la conférence inaugurale ? Difficile de le dire. Christine Revault d’Allonnes-Bonnefoy, eurodéputée socialiste membre de la commission transport à Strasbourg, est pourtant désignée pour s’exprimer sur ces sujets. Objectivement, Arnaud Leroy, député socialiste représentant Emmanuel Macron et Louis Nègre, sénateur (LR) des Alpes-Maritimes officiant pour François Fillon, ont tous deux délivré un discours structuré. Reste que Laurent Courtois, représentant de Jean-Luc Mélenchon, n’a pas démérité pour aborder le lancinant sujet du fret ferroviaire. « Sur le plan institutionnel, il faut se donner quelques moyens avec un ministère de plein exercice qui s’intéresse aux transports, à la logistique et aux infrastructures », a affirmé Louis Nègre. Une manière de dire qu’il convient de revenir au périmètre qui existait jusqu’en 2007. Nicolas Sarkozy avait alors souhaité fondre les transports dans un grand ministère du développement durable confié à Jean-Louis Borloo. Force est de constater que François Hollande, locataire de l’Elysée depuis 2012, n’a pas modifié ce périmètre. François de Voyer, président du club Audace et soutien de Marine Le Pen (FN), a plaidé de son côté pour deux structures : « un grand ministère de l’Aménagement du territoire, des Transports et de la Politique de la ville, et un autre ministère pour la Mer et de l’outre-mer. » Co-président de l’association TDIE, Louis Nègre souhaite également une « loi de programmation financière et une loi de programmation pour les infrastructures pour 5 ans » afin de permettre la discussion au Parlement. « Nous manquons de débat au sein du Parlement. Or, il faut faire des choix en matière de maintenance et de modernisation de nos réseaux », a-t-il argumenté. Il préconise en conséquence de consacrer 1 % du PIB aux infrastructures. À ses yeux, c’est un minimum pour s’attacher à quatre axes clés : une économie décarbonée, un fret massifié, une fiscalité verte, la qualité de l’air comme priorité absolue.
Le député socialiste Arnaud Leroy, auteur d’un rapport sur la proposition de loi pour l’économie bleue s’inscrit dans une certaine continuité. « On n’a pas besoin de nouveaux états généraux ou de nouveaux rapports, a martelé le représentant d’Emmanuel Macron. Nous voulons avant tout mettre en œuvre le plan France Logistique 2025. » Arnaud Leroy table sur un chiffre de 5 milliards d’investissements nécessaires pour les transports. Fait marquant, le député socialiste a notamment évoqué la question des livraisons urbaines pour souligner l’intérêt de s’inspirer des 35 « villages fret » développés outre-Rhin. « Des équipements logistiques situés à la périphérie des villes allemandes, à proximité des plateformes qui permettent la multimodalité. »
Laurent Courtois, représentant de Jean-Luc Mélenchon et par ailleurs cheminot dans la région des Hauts-de-France s’est montré bon connaisseur des questions ferroviaires. Au nom de la transition écologique, il a annoncé un « grand plan de ferroutage ». Avec quel financement ? « Evidemment, il faut une taxe carbone. Et on ajoutera une taxe kilométrique pour la traversée du pays au niveau du transport routier. Le bon sens veut que tout le monde paie », a expliqué Laurent Courtois, plébiscitant au passage une renationalisation des autoroutes. Arnaud Leroy est resté plus disert sur l’avenir du ferroviaire. « Emmanuel Macron fera des annonces fortes sur ce sujet lors du colloque TDIE du 22 mars » a-t-il souligné.
« Sur le plan institutionnel, il faut se donner quelques moyens avec un ministère de plein exercice qui s’intéresse aux transports, à la logistique et aux infrastructures ». Au chapitre des ports, le représentant d’Emmanuel Macron a appelé à transformer en profondeur le modèle économique actuel des ports français qui repose à ses yeux sur une équation obsolète : import, raffinage sur place, vrac. « Il faut faire des places de commerce. Nous avons du foncier disponible dans les ports », a affirmé Arnaud Leroy. Lequel s’est aussi prononcé en faveur du Canal Seine-Nord à condition que des investissements concomitants soient effectués dans les ports normands. A contrario, le soutien de Marine Le Pen, François de Voyer, s’est dit dubitatif. « Il aurait fallu d’abord développer le port du Havre. Là, on prévoit une infrastructure qui servira les pays du nord de l’Europe. » En attendant la soirée du 7 mai pour connaître le nom du futur locataire de l’Elysée, un chiffrage précis des programmes serait bienvenu avant le premier tour de la présidentielle, le 23 avril.