JEAN-MARC RIVERA : La CAA de Paris a, certes, annulé la représentativité de l’OTRE par une décision inique et incompréhensible. Pour autant, appelé à se prononcer en juillet 2016 dans deux autres instances où la représentativité de l’OTRE était, là aussi, contestée, le Conseil d’État, juridiction administrative suprême, a au contraire estimé que la représentativité de l’OTRE était indiscutable ! L’OTRE rappelle qu’elle est la seule organisation professionnelle à avoir dû subir des enquêtes de représentativité sur la base d’éléments précis fournis à la Direction Générale du Travail, alors même que ses opposants s’appuient sur une représentativité acquise dans le passé, sans avoir eu à justifier le moindre élément. L’OTRE et ses 3 000 entreprises adhérentes seront de nouveau reconnues comme représentatives dans quelques mois, en application de la loi Sapin de mars 2014. Nous pourrons alors constater que les 12 500 entreprises que la FNTR revendiquait ces dernières années seront probablement au moins 3 fois moins nombreuses lors du décompte officiel. Parions que certains de nos détracteurs, tel le Titanic, vont sombrer (sans orchestre !) définitivement dans les profondeurs des abîmes, toute arrogance bue. Contraintes pour continuer à exister, certaines ont déjà effectué le choix de se regrouper au sein d’une nouvelle entité, la Confédération Nationale de la Mobilité, d’autres d’adhérer et de confier leur représentativité actuelle à la FNTR (CSD et UNOSTRA).
J.-M. R. : L’OTRE respecte scrupuleusement ses obligations en matière de transparence financière. Ses comptes sont approuvés en assemblée générale, certifiés par un commissaire au compte et déposés sur le site officiel dédié aux organisations professionnelles. Cette affirmation flirte dangereusement avec la diffamation. Par ailleurs, l’OTRE ne prétend pas être la seule organisation professionnelle de la branche, ni même la plus importante. Mais, loin de l’influence des grands groupes aux capitaux financiers omniprésents chez nos voisins, elle entend défendre les intérêts des PME et TPE du transport routier.
J.-M. R. : Il y a des procédures en cours de la part de différentes Urssaf, notamment celle de Seine-et-Marne, contre des entreprises. En l’occurrence, les Urssaf interprètent le régime du Fongecfa comme un régime de préretraite et non pas de prévoyance. 2017 va donc être une année importante pour le CFA.
Il va falloir s’opposer à l’attitude des Urssaf et se poser la question de la réforme de ce régime. Les entreprises ne souhaitent pas la disparition du Fongecfa mais elles n’oublient pas non, plus la nécessité d’un équilibre entre les obligations liées à la pénibilité et ce Fongecfa. Elles considèrent que, pour les conducteurs, le Fongecfa répond à la question de la pénibilité.
J.-M. R. : Le dossier de la concurrence déloyale et de la régulation du marché figure parmi les sujets prioritaires de l’OTRE. À ce titre, nous finalisons la rédaction d’un document qui doit interpeller les candidats à la Présidentielle afin que chacun s’engage sur ses orientations liées, entre autres, au thème du dumping social. Nous suivons, par ailleurs, de très près le dossier du numérique et de l’émergence de l’économie collaborative. Il nous inquiète beaucoup.
J.-M. R. : Nous voyons arriver aujourd’hui de nouveaux opérateurs qui proposent aux entreprises certaines prestations, sous le format numérique, qui se rapprochent du concept des bourses de fret. On voit bien qu’il existe une volonté politique de laisser s’installer un modèle qui s’appuierait sur le développement du statut de travailleur indépendant. Nous constatons que le nouveau modèle s’installe en concurrence frontale avec des activités où l’emploi salarié est massif, l’un faisant perdre des marchés à l’autre avec des risques, à terme, sur l’emploi salarié. Nous ne sommes pas du tout convaincus que ces 2 modèles peuvent coexister. Nous ne manquerons pas d’interpeller les candidats à la Présidentielle sur ce sujet, qui semble au cœur de leur programme. Nous demeurons extrêmement vigilants sur les propositions émises par tous ces acteurs, notamment parce qu’ils centralisent des données très sensibles pour les entreprises.
J.-M. R. : Nous leur disons qu’effectivement ils peuvent se procurer du fret mais qu’il y a, peut-être, une face cachée derrière ce concept. Nous devons évaluer le risque qui pèse, pour les entreprises, sur toutes les données de géolocalisation que ces plateformes vont connecter, et ce qu’elles en feront ensuite. Par croisement de tous les points de géolocalisation qui correspondent aux nœuds de concentration du flux de transport, n’importe quel spécialiste du DATA vous dira que, sans le savoir et par ricochet, la localisation des lieux d’activité habituels des véhicules peut permettre d’identifier les clients des transporteurs qui utilisent la plateforme. Nous trouvons cela très inquiétant et très dangereux.
J.-M. R. : Ce qui ne fonctionne pas depuis 9 ans, ce ne sont pas tant les règles qui sont en place que les conditions du contrôle de ces règles. Notre axe a toujours reposé sur la nécessité de mettre en place des dispositifs qui permettent de faciliter les contrôles et de mobiliser les forces de l’ordre sur ces contrôles. C’est la raison pour laquelle nous avons vu d’un très bon œil les dispositions de la loi Macron (notamment l’obligation faite de déclaration de détachement de personnel). Ces éléments facilitent, selon nous, l’efficacité des contrôles. Nous avons également accueilli positivement les déclarations d’Alain Vidalies, secrétaire d’État aux Transports, sur le recentrage des contrôles des Dreal sur la voie routière et non sur le terrain des entreprises ; nous adhérons également à l’idée de la nécessité de former de nouveau les personnels motorisés de la police et la gendarmerie à la réglementation transport.
J. M. R. : Les propositions qui sont faites ne nous paraissent pas incohérentes. Mais nous continuons de penser que, même si nous changeons la règle sur le cabotage, nous n’avancerons pas si nous ne sommes pas capables de mieux le contrôler. Nous n’avons pas abandonné notre demande de mise en œuvre d’un carnet de cabotage dématérialisé, c’est-à-dire une obligation de déclaration préalable obligatoire de toutes les opérations de cabotage.
J.-M. R. : Nous ne croyons pas aux messages qui prétendent qu’il s’agit d’un combat impossible. Ce discours, nous ne l’avons que trop entendu, à l’occasion de l’écotaxe notamment et on en connaît le résultat au final. Nous avons conscience que le sujet est compliqué mais, manifestement, la France n’est pas isolée. Deux blocs s’opposent dans l’Union européenne. Pour notre part, nous faisons confiance aux pays qui sont impactés par ce dumping pour se montrer suffisamment forts et convaincants afin d’obtenir les éléments de régulation que nous souhaitons.
D’arrêt maladie en arrêt maladie, Gilles Mathelié-Guinlet n’occupe plus son poste de délégué général depuis le mois de novembre dernier. C’est le divorce entre l’emblématique délégué général de l’OTRE et sa présidente, Aline Mesplès. Selon nos informations, des divergences fortes (sur l’avenir) opposent les deux têtes de l’exécutif de l’organisation patronale depuis plusieurs mois. Mais la situation se serait dégradée au lendemain du dernier congrès qui s’est tenu en octobre dernier (un samedi), une édition marquée par une affluence plus réduite qu’à l’accoutumée. « La volonté d’Aline est de poursuivre l’OTRE sans Gilles », croit savoir un membre de la fédération. Selon cette même source, le conseil d’administration ne serait pas informé de cette situation… Contactée par L’Officiel des Transporteurs, Aline Mesplès a tenu à assurer que « le CA de l’OTRE est bien évidemment informé de la situation et de la décision du bureau exécutif de demander au secrétaire général adjoint d’assurer son remplacement (Ndlr, celui de Gilles Mathelié-Guinlet par Jean-Marc Rivera), tant que durerait cet arrêt de travail ». Et d’ajouter : « L’OTRE continue à assumer ses missions, à préparer une plateforme revendicative pour les prochaines élections nationales ».
S. B.