Au moment où la Commission européenne s’apprête à communiquer en mai les principales mesures des Initiatives routières pour la législation sociale du TRM ; les divisions au sein de l’UE se durcissent. D’un côté, les pays d’Europe de l’Ouest comme la France, l’Allemagne et l’Autriche ont adopté des mesures jugées protectionnistes par les pays d’Europe centrale et de l’Est. De l’autre, les pays de « Visegrad » (République tchèque, Slovaquie, Pologne, Hongrie) sont accusés d’alimenter une concurrence déloyale en raison des faibles salaires de leurs conducteurs. Le mécontentement est tel que les gouvernements tchèque et slovaque menacent d’instaurer des contre-mesures à l’application du salaire minimum en France. Depuis le 1er juillet 2016, les conducteurs étrangers qui effectuent du cabotage à l’intérieur des frontières françaises sont tenus, conformément à la « loi Macron », d’être rémunérés selon le droit du travail français, et ce, dès leur entrée sur le territoire. Dit autrement, un conducteur tchèque devrait donc être payé 10 € de l’heure, au lieu des trois euros qu’il perçoit dans son pays. Pour rappel, le salaire mensuel minimum correspond en République tchèque à 40 heures de travail hebdomadaires. Il est de 2 € de l’heure ou de 334,55 € par mois depuis le 1er janvier 2015. Cependant, le droit du travail tchèque prévoit plusieurs niveaux de salaire minimum, au nombre de 8, selon lesquels le salaire minimum est majoré. Les conducteurs routiers ayant la responsabilité de garder et d’entretenir un poids lourd (? 3,5 t), appartiennent au niveau 3 et ont droit à un salaire minimum de 407, 27 € brut par mois (source : Étude CNR, le TRM tchèque, 2015).
La France n’est pas le seul pays visé par les menaces des gouvernements tchèque et slovaque. En Allemagne et en Autriche, les règles sociales en vigueur sont similaires. « Il existe certains services où vous passez régulièrement plusieurs frontières, notamment dans les transports. Insister sur le système actuellement appliqué sous-entend avoir des frais administratifs très élevés et des problèmes bureaucratiques vraiment très importants », a expliqué en mars le Premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka. Sans compter que lors des contrôles policiers, il est demandé aux conducteurs internationaux leur contrat de travail traduit dans la langue du pays ainsi que différents documents comme leur déclaration de revenus. À l’évidence, c’est sur ce terrain que Prague et Bratislava pourraient réagir. « Nous pourrions effectivement leur rendre la monnaie de leur pièce, a convenu Michaela Marksovà, la ministre tchèque du travail et des affaires sociales. Par exemple, dès qu’un chauffeur autrichien pénétrerait sur notre territoire, nous pourrions exiger qu’il nous présente les mêmes documents traduits en tchèque que ceux qui sont réclamés lorsqu’un chauffeur tchèque travaille et livre en Autriche. »