« Les assurances optionnelles relèvent de l’arbitrage de chaque dirigeant »

Article réservé aux abonnés

L’Officiel des Transporteurs : Parmi le panel d’assurances facultatives que peuvent contracter les PME de transport, lesquelles vous semblent les plus utiles ?

CHRISTIAN SCHMITT : On ne peut pas s’engager ainsi sur la pertinence de certaines couvertures par rapport à d’autres. Le choix dépend des activités spécifiques de l’entreprise, de son fonctionnement, de sa relation client, de son champ d’action, de la typologie des produits transportés, de sa santé financière… En dehors des assurances obligatoires comme celles sur les véhicules et de responsabilité civile professionnelle qui permettent de se couvrir des dommages corporels ou matériels inhérents au risque routier, s’assurer sur des options de risque relève du choix stratégique de chaque entreprise et de l’arbitrage de chaque dirigeant entre la notion d’aléa qui peut intervenir et la mesure du coût de couverture qui peut être supportable ou pas. Mais on peut distinguer deux catégories d’assurances non obligatoires : d’une part, celles liées à l’aléa pur, autrement dit à des évènements imprévisibles, impromptus, intempestifs ; d’autre part, les assurances de confort souvent liées à la santé du personnel pour se prémunir d’un accident de la vie ou d’un conflit avec un salarié.

Quels risques couvre l’assurance sur les marchandises transportées et à quel prix ?

Ch. S. : L’assurance de base sur les marchandises transportées découle du contrat-type national entre un transporteur et son client et de la Convention relative au Contrat de transport international (CMR), au niveau européen. Ces contrats définissent les parts de responsabilité respectives des deux parties en cas de dommage sur la marchandise. Mais il est indispensable pour le transporteur de souscrire une prime d’assurance supplémentaire si la valeur de la marchandise est plus importante que celle couverte par le contrat type établie sur un seuil de tonnage ou sur un remboursement fixé à la palette ou au colis. Souvent, ce sont les chargeurs qui demandent à leurs transporteurs de s’assurer « Ad Valorem » sur une marchandise ou un bien transporté d’une valeur hors-cadre du contrat-type. Ces derniers peuvent contracter une prime d’assurance forfaitaire pour un transport régulier d’un bien d’une grande valeur ou souscrire une couverture temporaire, à la carte, sur un transport spot dédié. Le coût de l’assurance forfaitaire Ad Valorem est en général indexé sur le chiffre d’affaires engendré par le transport récurrent d’une marchandise de forte valeur. Selon les compagnies d’assurance, il peut osciller entre 0,30 et 0,60 % du chiffre d’affaires généré. Alors que l’assurance temporaire Ad Valorem, plus chère, peut s’élever jusqu’à 300 €.

Quelles autres assurances optionnelles vous semblent-elles importantes ?

Ch. S. : Je recommanderais à certaines entreprises dont l’activité de transport s’y prête, de se couvrir contre le risque environnemental. Car si le dommage de pollution occasionné par l’accident d’un camion par exemple est couvert par la responsabilité civile (RC) professionnelle obligatoire du transporteur, celui-ci doit s’assurer sur des conséquences environnementales qui iraient au-delà du champ de dommage couvert par la RC professionnelle. Dans ce cas, il s’agit de se prémunir contre les recours d’organismes ou d’associations pour l’environnement qui peuvent attaquer l’entreprise sur la pollution d’un milieu naturel protégé, comme par exemple la pollution graduelle d’un cours d’eau. Les transporteurs doivent également s’assurer sur le risque de pollution de leurs propres sites, un dommage qui n’est pas couvert par la RC professionnelle. Fuite d’une cuve de carburant, produits dangereux (dédiés à être stockés) déversés lors de leur chargement ou déchargement… sont des risques qui ne sont pas pris en compte par la RC professionnelle classique. L’assureur Axa l’a bien compris qui propose un produit approprié.

La RC professionnelle de l’entreprise a donc des limites. Protège-t-elle la personne physique du ou des dirigeants ?

Ch. S. : Non. Le dirigeant ou les mandataires sociaux de l’entreprise de transport doivent contracter une protection juridique personnelle pour préserver leurs biens personnels notamment sur la question invoquée d’une mauvaise gestion de l’entreprise qui l’amènerait à déposer le bilan ou être en redressement judiciaire. Ils doivent souscrire un contrat de responsabilité civile des mandataires sociaux, une assurance assez récente en France qui se développe depuis une dizaine d’années et qui provient du droit et des compagnies anglo-saxonnes comme Chubb. Cette responsabilité civile personnelle est une extension de la protection juridique personnelle classique. Elle se base sur la couverture d’un certain capital de l’entreprise de l’ordre de 350 000 € à 1 M€ en souscrivant en contrepartie une prime d’assurance entre 800 € et 3 000 € par an. C’est une assurance optionnelle que je recommande aussi vivement.

Vous recommandez moins les assurances de confort. Quelles sont-elles ?

Ch. S. : En cas de décès ou d’invalidité du dirigeant ou d’un cadre qui a un rôle déterminant ou une activité primordiale pour l’entreprise, les transporteurs peuvent se couvrir en contractant l’assurance « homme clé ». Cette assurance définit ou calcule sur la marge brute de l’entreprise un capital à verser pour la pérennité de l’activité si l’homme clé de l’entreprise venait à décéder ou à être invalide. Elle coûte en général assez cher, plusieurs milliers d’euros par an, le prix à payer pour sauvegarder la continuité de l’activité. Les transporteurs peuvent aussi se prémunir contre le risque prud’homal. Il s’agit d’une assurance qui paye ou rembourse les frais de défense juridique (les frais d’avocat) de l’entreprise si elle est attaquée aux prud’hommes par un salarié. Elle a une double casquette car elle peut même prendre en charge les conséquences financières du jugement en cas d’obligation de versement de dommages et intérêts de l’entreprise au salarié. Les transporteurs peuvent néanmoins éviter d’y souscrire en anticipant les conflits avec les salariés et provisionner une certaine somme dédiée. C’est comme s’ils s’auto-assuraient.

Au bout du compte, les entreprises de transport peuvent-elles supporter le coût de toutes ces assurances optionnelles, sachant que la plupart réalisent des marges faibles et subissent de lourds frais fixes de structure ?

Ch. S. : Effectivement, en représentant près 2 % en moyenne du chiffre d’affaires et parfois plus, le poste Assurance constitue un coût pas négligeable pour les transporteurs. Pour une PME qui réalise un CA de 12 M€, l’assurance globale peut en représenter plus de 1,25 %. Pour une autre plus petite de 5 M€ de CA, l’enveloppe Assurance peut s’élever à plus de 1,5 % du volume des ventes. Il s’agit donc pour chaque entreprise d’en mesurer le coût supportable. Hormis les assurances obligatoires et celles plus optionnelles de la couverture Ad Valorem de la marchandise transportée, de la RC personnelle des mandataires sociaux et de la protection contre le risque environnemental qui me semblent le plus souvent pertinentes, le transporteur est amené à opérer un choix stratégique sur les autres assurances facultatives et à mesurer sa capacité à en supporter le coût supplémentaire ramené à la marge lié au kilométrage parcouru par sa flotte de véhicules. Pour optimiser leur poste assurance, les dirigeants ont aussi la possibilité de négocier régulièrement les polices ou les primes d’assurance à la baisse en fonction de leur sinistralité ou en mettant en concurrence les offres des compagnies d’assurance lors des renouvellements de contrats.

Actualités

Grand angle

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15