Le fer de lance à l’international du groupe Alainé

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Huit mois seulement après avoir intégré le transport combiné rail-route à son développement à l’international, le groupe Alainé fourmille de projets pour amplifier le recours à ce mode de transport vertueux pour l’environnement.

Près de soixante-quinze ans après sa création dans le Macônnais, le groupe Alainé cultive toujours la discrétion. Pourtant, son développement récent dans le combiné rail-route pourrait servir d’exemple à d’autres transporteurs qui hésitent encore à franchir le pas. Même s’il avait ponctuellement recours au mode ferroviaire en période d’étiage des fleuves sur lesquels étaient acheminées ses marchandises en combiné fleuve-route, le groupe Alainé n’avait pas été conduit à privilégier le rail pour ses transports à l’international jusqu’à une période récente. Tout a changé fin 2017 en conjonction de plusieurs phénomènes. Le premier était celui, maintes fois observé depuis, de la pénurie de conducteurs routiers longue distance. Le second avait trait au coût toujours en hausse de l’énergie fossile. L’augmentation des taxes au niveau international constituait le troisième facteur tandis que le dernier concernait l’urgence climatique. Le groupe était, en quelque sorte, un peu précurseur pour répondre aux enjeux environnementaux, dans la mesure où les clients chargeurs français semblent encore assez peu concernés par le transport « vert ». Actuellement, leur priorité reste toujours le prix. « Une fois pris en compte tous ces facteurs, nous nous sommes aperçus que le train pouvait constituer une bonne alternative à la route à condition d’accepter un certain nombre de contraintes inhérentes à ce mode de transport. Nous nous sommes donc adaptés au train et non l’inverse », explique Renaud Paulat, membre de la direction générale du groupe Alainé, chargé des activités internationales route et développement du ferroviaire. Poursuivant son propos, le dirigeant note au passage que « la France est très en retard sur la multimodalité », et souligne que « l’emploi de remorques P400 constitue la condition sine qua non pour débuter dans le multimodal. Nous l’avons fait en l’espace de six mois seulement, ce qui à l’échelle ferroviaire peut apparaître comme un dossier rondement mené ».

Un taux de service compris entre 90 et 95 %

Justement, la nouvelle autoroute ferroviaire Calais-Le Boulou mise en service par VIIA le 19 mars 2019 répondait à cette attente. Encore fallait-il que soit créé un arrêt intermédiaire à Mâcon, une première dans le système opérationnel des autoroutes ferroviaires. Comme tous les partenaires ont poussé en même temps – dont la Région Bourgogne-Franche-Comté, qui a financé des travaux de rénovation de la ligne juste avant que le service ne devienne opérationnel – le groupe Alainé a pu embarquer ses premiers P400 et autres citernes dès l’ouverture de la ligne. Il s’était, entre-temps, équipé de 100 remorques acquises auprès du constructeur allemand Kögel, un investissement de 3 M€. En revanche, les conteneurs-citernes pouvant transporter jusqu’à 35 000 l de produits alimentaires (huile, vin, jus de fruit, etc.) ont fait l’objet d’une location. Estimant que le rail s’inscrit en complément de la route, le transporteur bourguignon ne peut que se féliciter d’avoir opté pour ce mode huit mois plus tard. Le taux de service est, en effet, compris entre 90 et 95 %, ce qui est jugé comme satisfaisant par le groupe. Surtout, les trains P400, eu égard à leur grande longueur, sont considérés comme prioritaires au même titre que les… TGV. VIIA dispose aussi d’un pool de conducteurs en cas de mouvements sociaux. Seule pierre d’achoppement, les travaux qui peuvent être conduits à tout moment sur les voies.

Client satisfait de l’autoroute ferroviaire, puisqu’elle lui permet d’acheminer des remorques et autres conteneurs-citernes sur les terminaux de Calais, Mâcon et Le Boulou mais aussi sur celui d’Orbassano (en utilisant l’autoroute ferroviaire Calais-Orbassano), le groupe Alainé fait déjà transporter par le rail plus de 600 remorques par mois.

Accélération de la montée en puissance

« Nous espérons doubler ce nombre dès l’année prochaine, indique Renaud Paulat. C’est la raison pour laquelle nous avons passé cette semaine une commande pour une centaine de remorques P400. Nous recevrons les 30 premières juste à temps pour le doublement des fréquences sur Calais-Mâcon-Le Boulou prévu en janvier 2020. Ce passage à 12 fréquences hebdomadaires nous permettra d’avoir une plage horaire plus élastique et moins contraignante qu’avec un seul départ journalier. »

Ce doublement du nombre de remorques transportées a quelque chose à voir également avec la possibilité de créer un arrêt à Mâcon sur l’autoroute ferroviaire Calais-Orbassano. Si les discussions aboutissent sur ce point avec VIIA, ce nouvel arrêt pourrait devenir opérationnel à la fin du premier trimestre 2020. Mais là ne s’arrêtent pas les projets à venir. Le groupe Alainé pense déjà au coup d’après avec la possibilité qui lui serait donnée de faire transporter ses remorques sur un nouveau service de transport combiné rail-route reliant Fos-sur-Mer à Bettembourg (Luxembourg) via Mâcon. Là encore, ce service pourrait devenir opérationnel dès la fin du premier trimestre de l’année prochaine.

10 M€ de revenus supplémentaires

Tous ces développements, qui seront accompagnés par la poursuite des investissements réalisés par la CCI Saône-et-Loire, auront un impact fort sur le chiffre d’affaires du groupe. Ainsi, les activités intermodales rail-route pourraient générer 10 millions d’euros de revenus supplémentaires au cours du prochain exercice. D’autres avantages vont découler de ce recours accru au rail. Le groupe évitera la congestion aux ports liée à l’entrée en application du Brexit à une date encore indéterminée. Les nouvelles règles liées au cabotage ne s’appliqueront pas au transport multimodal. La possibilité de pouvoir transporter plus de 44 tonnes de PTAC en traversant les frontières internationales constituera, en outre, un avantage indéniable par rapport à la route. Enfin, l’augmentation du coût de la tonne de CO2 devrait devenir exponentielle et donc favoriser une fois de plus le rail.

L’ensemble de ces atouts mis bout à bout devraient donc, mécaniquement, entraîner la création de nouvelles relations de transport combiné rail-route. Selon le groupe Alainé, qui voit le transport combiné rail-route comme le fer de lance du développement de ses activités à l’international, il existe de nombreuses voies de progrès quant à la diffusion de ce mode de transport. À commencer par le fait, selon Renaud Pulat, « qu’il n’existe pas sur l’ouest de la France de liaisons nationales éligibles au P400 ». SNCF Réseau a déjà promis d’étendre ce réseau tout comme celui où circulent déjà les trains longs (850 kilomètres sur une longueur potentielle de 2 400 kilomètres). C’est la possibilité de rapprocher encore un peu plus les prix du train de ceux de la route.

Le choix du rail-route encore aléatoire

La réussite rapide du groupe Alainé dans ses activités rail-route devrait faire des émules, mais il n’en est rien. Le transporteur n’a reçu, à ce jour, aucune demande de transporteurs potentiellement intéressés par le recours à ce mode de transport. Au contraire des pays limitrophes qui ont largement développé le transport combiné rail-route, la France est donc à la traîne dans ce domaine. Nul doute qu’une médiatisation accrue de ses atouts constitue l’une des voies possibles pour lui permettre de prendre enfin toute sa place au sein de la logistique… française.

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