P-dg de Transports Location Constantin (78), une société qui réalise 8 millions de francs de chiffre d'affaires annuel, Didier Constantin a senti le vent du boulet. « J'ai été contraint de céder deux ensembles routiers. Cela m'a permis de tenir le coup », explique le transporteur qui mettait à la disposition de Grimaud 6 véhicules sur les 20 qu'il possède. Six mois après le dépôt de bilan du groupe des Deux-Sèvres (repris depuis par Ziegler et rebaptisé Grimaud Logistique), les quelque 6 000 sous-traitants vivent des situations contrastées. Ceux qui ont pu s'appuyer sur la loi Gayssot (art. 10) ont limité la casse. A fin mai, selon les chiffres émanant de la cellule liquidative mise en place à Bressuire, 16 millions de francs auraient ainsi été remboursés aux transporteurs au titre de l'action directe sur un passif comptable fournisseurs qui s'élèverait à 78 millions de francs. « Attention, cette somme correspond à ce qu'auraient dû verser les clients à Grimaud. Or, à ma connaissance, il n'y a pas eu pour l'instant de double paiement », précise un responsable de Cogefor, un cabinet spécialisé dans le contrôle de gestion désigné par le parquet. Chargée des questions juridiques à la Fédération nationale des transports routiers (FNTR), Florence Berthelot a recensé 115 entreprises concernées par le dépôt de bilan de Grimaud. Le montant global des créances est de 15 millions de francs, la plus petite étant de 717 francs, la plus importante de 3,6 MF. « Si certaines sociétés ont pu récupérer leur dû, il n'en est pas de même pour celles qui travaillaient au forfait journalier ou celles placées dans l'impossibilité d'identifier les destinataires et les expéditeurs », explique Florence Berthelot. C'est le cas notamment des Transports Vigouroux (82) qui assuraient, pour le compte de Grimaud, des trafics de quai à quai. « Nous avons perdu 544 KF. Aujourd'hui, je suis écoeuré », soulève Robert Vigouroux, le P-dg. Un sentiment de malaise accentué par le fait que des promesses n'ont pas été tenues. C'est le tribunal de Bressuire qui devait ainsi faire parvenir aux transporteurs un avis officiel leur permettant de prouver que la mauvaise passe qu'ils traversaient n'étaient due qu'au non recouvrement des créances. Un document que les entreprises attendent toujours et qu'elles n'ont donc pas pu transmettre aux Directions régionales de l'équipement (DRE) chargées d'apprécier leur capacité financière.
Le tribunal de Bressuire vient en outre de refuser de diligenter une enquête pénale sur la responsabilité personnelle des dirigeants de Grimaud. Une démarche sollicitée par Thierry Deville, avocat de l'Organisation des transporteurs européens (Otre). Lequel envisage aujourd'hui de saisir le juge d'instruction. Florence Berthelot est elle plus nuancée. « L'action en complément de passif à l'encontre de la famille Grimaud reste une éventualité mais il faut pour cela prouver que la cessation de paiement était bien antérieure au dépôt de bilan. Or, celle-ci a été prononcée le 8 janvier, soit un jour avant le dépôt de bilan. »