Selon l’article L4121-1 du Code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour « assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs ». D’après, la directive CE n° 89/391 du 12 juin 1989, il a même une obligation de résultat (Cass. Soc. 28 février 2006, n° 05-41555). « Mais cette obligation de sécurité a “muté”, estime Sébastien Millet, avocat au cabinet Ellipse Avocats. En effet, elle permet aussi de sanctionner l’employeur dans des domaines variés, même en l’absence d’accident ou de dommage. » Des décisions très importantes ont été rendues concernant par exemple la réparation du préjudice d’anxiété lié à l’exposition à des substances nocives ou toxiques (Cass. Soc. 11 septembre 2019, n° 17-24.879), ou encore l’interdiction de prendre des mesures organisationnelles de nature à compromettre la sécurité ou la santé physique et mentale des salariés (par exemple, un système de rémunération variable entraînant un risque routier a pu être jugé comme illicite : Cass. Soc. 15 octobre 2014, n° 12-29235 ; C. Transp., L1311-4). Sans remettre en cause cette exigence d’effectivité, la jurisprudence en droit du travail considère qu’il s’agit d’une obligation de prévention et qu’il appartient à l’employeur de démontrer qu’il a pris toutes les mesures prévues par les articles L4121-1 et L4121-2 du Code du travail (Cass. Soc. 25 novembre 2015, n° 14-24444).
Lorsque la violation de l’obligation de sécurité a causé un accident, sur le plan de la responsabilité civile, c’est la responsabilité de l’employeur (personne morale dans l’immense majorité des cas) qui sera recherchée par la victime, essentiellement sur le terrain de la faute inexcusable, afin d’obtenir devant le tribunal des affaires de l’Assurance maladie la réparation des préjudices non indemnisés dans le cadre de la législation AT/MP.
Cela n’exclut pas les poursuites pénales qui visent à faire sanctionner les atteintes aux valeurs sociales protégées par le Code du travail (la sécurité des salariés) et par le Code pénal (la vie et l’intégrité physique d’autrui). « La responsabilité pèse ici au premier plan sur le chef d’entreprise (personne physique), dans la mesure où il est tenu de veiller de manière personnelle et constante à l’application des règles destinées à protéger la santé et la sécurité des travailleurs placés sous son autorité, reprend l’avocat. Pour autant, la responsabilité pénale de l’employeur peut aussi être engagée en l’absence de dommage [cf. par exemple le délit de mise en danger délibérée de la vie d’autrui réprimé par l’article 223-1 du code pénal]. Typiquement, la simple inobservation d’un texte édictant une prescription particulière de sécurité ou de prudence prévue par la réglementation du travail peut constituer une infraction formelle, même sans accident. » À méditer.