Infrastructures routières : Des budgets d’entretien renforcés et de nouvelles pistes

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Sur une chaussée en mauvais état, l’usure des équipements (pneumatiques, plaquettes de frein) est plus forte.

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[Dernière partie de notre dossier consacré aux infrastructures] Selon un rapport de l’Observatoire national de la Route, 19% du réseau routier national non concédé et 10% du réseau départemental sont considérés en mauvais état. Face aux conséquences multiples, le budget se voit renforcé et quelques pistes émergent.

« Les décentralisations successives n’ont pas rendu clair ce que chacun devait faire. Pendant longtemps, on préférait faire des travaux nouveaux plutôt que de l’entretien. Mais concernant les investissements, on voit que les budgets alloués à la voirie sont en croissance depuis un certain nombre d’années sur tous les départements interrogés et qu’ils sont fléchés de façon plus importante vers la maintenance », observe Pierre Dumas. Il tempère toutefois : « Si la connaissance des infrastructures des départements et métropoles est assez bonne, c’est une autre affaire pour les petites communes, pour lesquelles on constate un problème de connaissances et d’entretien ». La question des ponts illustre d’ailleurs cette problématique, avec la nécessité d’y remédier pour des enjeux de sécurité. Pour Jean-Max Gillet, délégué général de Maintenance de routes de France, syndicat des acteurs du secteur, l’entretien courant des routes communales et intercommunales est le nerf de la guerre. Le professionnel pointe notamment le dérasement des accotements et le curage des fossés comme des travaux indispensables pour la durabilité des routes. Yannis Charbonnier, directeur général des Transports Charbonnier, opère depuis les Hautes-Alpes, Alpes-de-Haute-Provence et le Vaucluse. Habitué aux petites routes de montagne, il dit observer des dégradations liées à un manque d’entretien et occasionnant nids de poule, rétrécissements de voies, déformations de la chaussée. Dans le Nord-Pas-de-Calais, Alexandre Emeille, dirigeant des Transports CAE décrit, lui, des routes en plutôt bon état mais souligne un défaut d’entretien des bords de la chaussée, notamment des végétaux. Un point partagé par son confrère, qui indique qu’ils ont plus d’accidents avec les animaux dans les zones où la végétation y est dense.

Des conséquences multiples

Lorsqu’une route est en mauvais état, les conséquences sont multiples : elles sont limitées en tonnage, voire carrément coupées ou difficilement accessibles, comme en témoigne Yannis Charbonnier : « Avant, lorsqu’il neigeait, nous roulions avec des chaînes. Maintenant c’est impossible car certaines routes sont en trop mauvais état. Résultat, en cas d’intempéries, tout s’arrête alors que nos chauffeurs sont formés et que nous avons des véhicules adaptés ». Sur une chaussée en mauvais état, l’usure des équipements (pneumatiques, plaquettes de frein) est plus forte. En 2020, l’Association Espagnole de la Route a réalisé une étude démontrant qu’une route très abîmée augmentait de 6% les émissions de CO2 sur un PL. « Rouler sur une route en mauvais état accroit aussi la fatigue du chauffeur, car le niveau d’attention est relevé, alors pour nous qui réalisons 60% de notre activité de nuit sur les routes de montagne… » ajoute encore le dirigeant. Et quel impact sur l’accidentalité ? Les défauts d’infrastructure seraient responsables de 30% des accidents mortels mais attention, ce n’est pas la seule raison en cause. Seul 1% des accidents est dû uniquement à un facteur infrastructure.*

Quelles pistes ?

Le rapport de la Cour des comptes sur le réseau national et départemental pointe « une forme de désengagement de l’État à l’égard d’une de ses missions, ce qu’illustrent certaines insuffisances de la gestion de ces infrastructures au regard des impératifs de sécurité routière et de protection de l’environnement ». L’instance recommande de donner les moyens à une politique routière nationale, de renforcer les outils de pilotage et de garantir un service adapté. Départements de France constate : « Beaucoup de départements sont en difficulté et contraints de revoir à la baisse leur politique d’investissement ou leur politique de la route. Nous tirons la sonnette d’alarme : les départements ne peuvent continuer à porter un patrimoine si lourd avec de telles contraintes budgétaires. C’est la question du modèle économique de la route dans son ensemble que nous posons. Certains départements peuvent espérer le retour d’une écotaxe, il y a aussi un débat à venir sur la fin des concessions autoroutières, très rentables. Pourquoi cette manne financière ne bénéficierait pas aux réseaux gratuits ? » Du côté des routes communales et intercommunales, Maintenance des routes, réfute tout argument économique et prône une meilleure connaissance et gestion du patrimoine. « En amont de travaux, il ne faut pas hésiter à faire lire le dossier par un ingénieur, notamment pour faire valider les choix techniques, indique Jean-Max Gillet. Et surtout, faire contrôler les travaux par un bureau d’étude extérieur. Nous estimons que sur les 30% de chantiers contrôlés en France, 50% présentent des non-conformités, dont 1/3 réduisent leur durée de vie de 50% ! »
D’autant que parmi les défis des gestionnaires, celui de la résilience des infrastructures face aux aléas de plus en plus nombreux liés au réchauffement climatique. « Nous avons besoin d’une route plus solide, qui s’entretient plus facilement, moins dépendante des produits pétroliers… Il va falloir innover et nous ne pouvons y être indifférents », assure Départements de France.

*Rapports ONISR sur l’accidentalité routière 2023 et 2021.


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